Grotte Chauvet : temple magnifique des arts préhistoriques

Sous des têtes de chevaux, on distingue clairement celle d’un rhinocéros © Getty Images

En décembre 1994, trois archéologues ont découvert à Chauvet (Ardèche) un lieu datant de plus 30.000 ans avant notre ère, où différents types d’expressions artistiques très maîtrisés n’ont rien de « primitifs » !

Arte nous plonge samedi à 20h50 dans un écrin fermé au public afin de le préserver (mais dont une réplique peut être visitée). À l’intérieur, sur 8.500 m², dessins, peintures, marques en trompe-l’œil et ce qui serait apparemment une forme d’écriture se succèdent, témoignant de plusieurs années de création et d’une époustouflante maîtrise de plusieurs arts.

Émus aux larmes

« On est submergé par la beauté de œuvres ! », confie Carole Fritz, spécialiste en art préhistorique qui dirige les chercheurs autorisés à étudier, quelques mois par an, les multiples trésors. La qualité de l’art sur les murs de la grotte Chauvet-Pont d’Arc (son nom initial), qui renferme plusieurs chambres en enfilade, est si remarquable que l’ensemble a été classé au patrimoine mondial de l’Unesco en 2014. Environ mille créations s’y cachent, entre œuvres d’art abstrait et figuratif. Et montrent que les artistes du Paléolithique savaient peindre dans un style cohérent. En 1996, Jean Clottes, premier spécialiste de l’art rupestre à y pénétrer, s’est dit émerveillé aux larmes par « la vraisemblance des chevaux sauvages et leur vitalité ».

Amphithéâtre naturel

Parmi ces réussites se côtoient « le panneau de la panthère », « le panneau des rhinocéros » avec des lions, un renne et 17 rhinocéros, et un autre panneau illustrant 16 lions chassant 7 bisons. Pour cette fresque, dans cet amphithéâtre naturel, les artistes ont utilisé une technique afin de créer de la profondeur, de la perspective et un réalisme si frappant que les animaux paraissent vivants et semblent bouger si on allume des bougies aux pieds des murs.

Pour les esthètes

N’ayant pas retrouvé d’objets du quotidien, les chercheurs pensent que la grotte n’était pas un lieu de vie, mais bel et bien un endroit visité régulièrement par des esthètes. Jean-Michel Geneste, successeur de Clottes, a noté parmi les représentations de lions, un symbole de pouvoir plus élevé que celui des autres mammifères. En outre, ces peintures sont anthropomorphiques avec, selon lui, « un nez et un profil humains dévoilant une empathie entre les artistes et ces carnivores ». Dans une autre chambre se tient l’œuvre la plus mystérieuse : le pendentif de Vénus. Faite au fusain, elle représente la moitié inférieure du corps d’une femme entrelacée et associée à un homme-bison.

Diverses techniques

Le côté merveilleux de ces créations tient aussi à leurs techniques : charbon de bois, hématite non hydratée, pigment naturel connu sous le nom d’ocre rouge, pinceaux en crin de cheval, tampons, pointes de silex et morceaux d’oxyde de fer taillés en une sorte de crayon. Après avoir choisi leurs instruments, les artistes ont aussi pris un soin méticuleux à gratter les murs avant de les peindre, en dessinant les contours et en utilisant la perspective.

Proto-écriture

Outre ces révélations artistiques, la grotte Chauvet contiendrait aussi une première forme d’écriture. En 2023, Ben Bacon, chercheur amateur, et des experts en mathématiques, archéologie et psychologie ont analysé sur les murs des marquages non figuratifs : barres obliques, points, taches et formes en Y. Cette étape entre une notation avec esquisse de syntaxe et l’écriture à part entière signifierait qu’une forme d’écriture aurait existé avant le sumérien, langage apparu en 3.400 avant J.C. La grotte Chauvet n’a pas fini de nous étonner.

Cet article est paru dans le Télépro du 5/12/2024

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici