Groenland, eldorado blanc
Ce samedi à 19h30 dans «Le Dessous des cartes», Arte nous emmène sur les terres glacées de cette immense île, objet aujourd’hui de tous les désirs.
Union européenne, Chine, États-Unis… Les yeux des plus grandes puissances mondiales sont rivés sur une île : le Groenland. À tel point qu’en août dernier, Donald Trump n’hésite pas à proposer au Danemark, dont le Groenland dépend, de «racheter » son île. Après la stupeur danoise et un énième incident diplomatique pour Trump, l’offre est laissée sans suite.
Cependant, si l’insolence choque, l’intérêt américain pour ce territoire rappelle au monde son importance stratégique.
Du vert au blanc
En 982, Erik le Rouge, explorateur norvégien, découvre une île située au nord-est de l’Amérique qu’il nomme Groenland littéralement «terre verte». Rattachée au Danemark en 1380, l’île subi un refroidissement climatique en 1500, et seuls les Esquimaux (ou Inuits) y subsistent en maîtres.
En 1721, l’île est colonisée par les Danois. Le royaume en est officiellement reconnu souverain par le traité de Kiel, en 1814. Durant la Seconde Guerre, les États-Unis font de la terre verte devenue blanche leur base militaire.
En 1953, l’endroit devient département danois et accède à une autonomie d’abord interne, en 1979, puis élargie en 2009. «Ce nouveau régime permet aux Groenlandais de contrôler leurs ressources (pétrole, gaz, richesses minières) dont l’exploitation nécessitera d’importants moyens financiers», détaille le Larousse. «Par ailleurs, le groenlandais devient la langue officielle.»
En 2020, après avoir été stoppée par la pandémie, la commission chargée de préparer un projet de constitution pour le Groenland reprend son travail.
Objectif USA : un 51e État
Il y a peu, les projecteurs ont donc été braqués sur le Groenland après que Trump a émis le vif souhait de l’acquérir. Pourquoi le président US vise-t-il cet endroit ? Réponse simple : les terres groenlandaises regorgent de ressources naturelles.
L’attrait pour ses richesses n’est pas neuf. En 2007, un sous-marin russe dépose, par 4.200 m de profondeur, un drapeau aux couleurs de son pays, à l’aplomb du pôle Nord. Objectif : prélever des échantillons du sous-sol marin visant à prouver que la région est un prolongement géologique de la Sibérie, et donc donne des droits à la Russie. «Le Canada a aussitôt riposté en annonçant un programme de construction de navires capables de sillonner l’océan Arctique et de l’explorer », détaille Le Monde.
De leur côté, prospecteurs et compagnies pétrolières arpentent l’île chaque été à la recherche des trésors enfuis. Depuis la fonte des glaces et le recul de la banquise, son sol est plus accessible. «Selon une étude américaine de 2008, en matière de ressources pétrogazières, le Groenland disposerait de 31 milliards de barils équivalents pétrole (soit 15 % des réserves de l’Arabie saoudite)», explique à France 24 Mikaa Mered, professeur de géopolitique et d’économie des mondes polaires. «Mais dans le même temps, malgré les explorations menées depuis trente ans, aucun champ exploitable commercialement n’a été découvert.»
Bouclier de glace
Outre l’argent qu’il pourrait rapporter, le Groenland possède un autre atout : sa position géostratégique. Là encore, les USA en ont conscience depuis longtemps. En 1867, les Américains avaient d’abord tenté d’obtenir un «package» Groenland/Islande, puis, en 1946, Harry Truman avait mis 100 millions sur la table pour l’île.
«Si le Groenland, d’un point de vue identitaire, politique et culturel, est davantage tourné vers l’Europe, de par sa colonisation danoise, d’un point de vue géostratégique, il est plutôt une masse nord-américaine», poursuit Mikaa Mered. «Depuis les années 1940, le Groenland est même vu par le Pentagone comme le premier rideau de défense naturel pour la côte Est des États-Unis…»
Cet article est paru dans le magazine Télépro du 8/10/2020
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