Êtes-vous chaud
pour la fusion froide ?

La fusion froide, une utopie 
à laquelle certains croient 
dur comme fer © Getty Images

Énergie de demain ou illusion ? Sceptiques et convaincus s’opposent. Ce mercredi à 23h30 sur La Une, «Matière grise» s’intéresse au sujet.

«La révolution électrique», «Science-fiction ou percée technologique majeure ?», «Peut-être la découverte du siècle». Ce jeudi 23 mars 1989, les présentateurs des JT rivalisent de formules accrocheuses pour commenter la nouvelle. Stanley Pons et Martin Fleischmann, deux électro-chimistes américains renommés, viennent d’annoncer leur découverte. Ils ont, affirment-ils, réussi à maîtriser le phénomène de fusion nucléaire à température ambiante. C’est-à-dire ? En plongeant une paire d’électrodes en palladium dans un bocal d’eau lourde (un matériau important pour les réacteurs nucléaires), un excès de chaleur inattendu s’est dégagé. Tout cela à pression et température ambiantes. Une réaction qualifiée de fusion froide.

Une révolution

Jusque-là, comme alternative à la fission (et ses potentiels problèmes, écologiques notamment), on parle principalement de recherches dans le domaine de la fusion nucléaire «qui ne peut, en principe, être obtenue que lorsque la répulsion entre atomes est vaincue à l’aide notamment d’une température très élevée», explique le portail Web Futura. Difficulté : la fusion ne peut s’effectuer qu’à une température de 100 à 150 millions de degrés Celsius (6 à 
10 fois plus que la température du Soleil). Avantage : elle libère une quantité d’énergie près de quatre millions de fois supérieure à celle de la combustion du charbon et quatre fois supérieure à celle de la fission nucléaire. De plus, elle ne produit pas de déchets radioactifs pendant des milliers d’années, comme c’est le cas pour la fission. Revenons à la fusion froide.

Le Saint Graal

Pourquoi cette découverte électrise-t-elle à l’époque le monde scientifique et les médias ? Parce que ce procédé est présenté comme LA solution aux problèmes énergétiques de la planète. Pas de gigantesques réacteurs (comme pour la fusion «chaude»), juste de l’hydrogène (plus exactement du deutérium) qu’on trouve partout en quantité et un certain métal (le palladium) pour produire de l’énergie sans produire de gaz à effet de serre. Crise de l’énergie, réchauffement climatique global causé par le rejet de CO2… : la fusion froide, c’est la clef, le remède, le Graal. En réalité, les scientifiques découvrent qu’ils n’en sont qu’au stade de la quête de l’inaccessible étoile : peu de temps après l’annonce de mars 1989, le monde entier déchante.

Illusion

Aucun chercheur ne parvient à reproduire l’expérience. Pons et Fleischmann sont traités d’imposteurs, la «sauveuse de l’humanité» devient une brebis galeuse de la physique, la fusion froide tombe dans l’oubli. Pas pour tout le monde. Des chercheurs décident de ne pas lâcher l’affaire. 
Régulièrement, certains annoncent avoir trouvé la bonne formule. C’est notamment le cas d’un scientifique japonais en 2008. Nouveau buzz médiatique, nouveau plouf. Cela n’empêche pas Google de rouvrir le dossier. L’entreprise décide de financer les travaux d’une trentaine de physiciens de 2016 à 2018. Elle investit 10 millions de dollars pour savoir si la fusion froide doit être rangée au rayon «énergie de demain» ou définitivement à celui d’illusion. Résultats : les chercheurs reconnaissent «n’avoir trouvé aucune preuve d’effets anormaux allégués par les partisans de la fusion froide», mais continuent à espérer «une expérience référence qui fournira les preuves de la fusion froide». Six ans plus tard, certains continuent d’y croire encore. C’est le portrait de l’un d’entre eux que vous propose «Matière grise express», mercredi sur La Une. Un convaincu, chaud partisan de la fusion froide.

Cet article est paru dans le Télépro du 4/7/2024

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