Et les Vikings sont devenus chrétiens
Après avoir semé la terreur en Occident durant des siècles, les Vikings tournent le dos à leur culture guerrière. Le Xe siècle marque un véritable tournant dans l’histoire scandinave.
Mis à part des pierres runiques et des récits héroïques rédigés a posteriori, les Vikings n’ont pas laissé de traces écrites. Ainsi, lorsque la sépulture d’un éminent Viking et de son cheval est découverte au Danemark, la nouvelle fait grand bruit. Ce «Viking de Fregerlsev» pourrait devenir une figure emblématique du passé danois, à l’instar de «la fille d’Egtved» (l’âge de bronze) et de «l’homme de Tollund» (un corps momifié datant de -350). Au printemps 2017, des fouilles débutent pour confirmer que ce noble guerrier du Xe siècle était, comme le pensent les archéologues, un proche du roi Gorm l’Ancien. Elles permettent aussi d’éclairer une période charnière, comme l’explique «L’Énigme de la tombe viking» (ce jeudi 6 février à 20.50 sur France 5).
Si les Vikings étaient, selon l’image d’Épinal, de redoutables pilleurs et de conquérants barbares, ils étaient avant tout d’excellents constructeurs de navires et d’habiles marchands. «Ils venaient de pays chiches de biens, accablés par l’humidité et sans grandes ressources», écrivait Régis Boyer dans «Opération commando» (Historia). «Ni agriculture, ni « industrie ». Leur seule possibilité était le commerce, normalement par voie d’eau, ce qui explique que ces maîtres artisans aient mis au point (vers le V e siècle sans doute) leur fameuse embarcation, avec laquelle ils transportaient l’ambre, la laine, le « vadmál » (tissu qui servait à confectionner vêtements et voiles de bateau) ou le bois qu’ils échangeaient en Occident continental contre les marchandises dont ils étaient friands.»
Entre le VIII e et le XI e siècle, les Vikings règnent sur la Scandinavie et sillonnent les mers. Leur vaste empire commercial s’étend de la Turquie aux côtes du Canada. «Chemin faisant, ces navigateurs se sont rapidement aperçus que les territoires qu’ils longeaient ou fréquentaient n’étaient pas des plus pacifiques ou des mieux défendus. Ils n’ont pas mis longtemps à comprendre qu’un bon coup d’épée à tranchant double ou de hache de fer large permettait de résoudre une transaction plus vite et efficacement que d’interminables palabres. Les Scandinaves sont donc devenus pillards.»
Motivations politiques
Pourtant, il y a mille ans environ, leur mode de vie évolue : ils tournent le dos à cette culture guerrière et embrassent des croyances plus pacifiques, se concentrant sur l’agriculture et le commerce. Ce tournant de l’histoire scandinave coïncide avec leur passage du paganisme au christianisme.
Vers 960, le roi Harald Ier , fils de Gorm l’Ancien, se fait baptiser et autorise l’évêque Popo à évangéliser son royaume. Mais cette révolution cache des motivations politiques. Le roi craint le puissant Saint Empire romain germanique, dont l’empereur Otton I er n’a qu’un objectif : convertir le monde au christianisme. Sa prochaine cible ? Le royaume danois. Pour éviter une invasion, Harald accepte de délaisser Odin, Thor et autres divinités au profit du Dieu chrétien.
En fait, par cet acte, Harald I er ne fait qu’apposer son sceau sur une révolution en marche depuis un siècle. Les Vikings s’engagent dans cette voie car ils ont compris que les échanges commerciaux en seraient facilités. Une fois de plus, leur génie marchand parle. Comme le confiait Régis Boyer à Historia, «vous connaissez les meubles Ikea, le saumon de Norvège, le caviar d’Islande et les enceintes Bang & Olufsen ? Les pays scandinaves restent encore aujourd’hui les plus grands commerçants de l’Occident.»
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