EMI : la mort en face
Lundi soir, La Trois tente de comprendre le phénomène particulier de l’expérience de mort imminente.
Événement aussi méconnu qu’intrigant, l’expérience de mort imminente est un état décrit par de nombreuses personnes ayant frôlé la mort. Si le monde scientifique a longtemps considéré ces témoignages avec méfiance, aujourd’hui, il semblerait que l’intérêt prenne le pas sur la suspicion.
Témoignages concordants
Ces dernières années, les expériences de mort imminente ont fait l’objet de différentes études permettant de collecter des milliers de témoignages de rescapés. Au coeur de ceux-ci, plusieurs points communs : sensation de décorporation, comprenez se sentir en dehors de soi, résurgences d’événements importants, vision de proches, morts et/ou vivants, impression de traverser un tunnel, lumière vive, bienêtre et, après la réanimation, adoption d’un nouveau mode de vie. À côté de ces récits positifs, une partie des EMI sont décrites de manière nettement plus négative. «Les caractéristiques générales sont les mêmes qu’une EMI classique, mais vécues avec une tonalité angoissante », explique Christophe Fauré, psychiatre et auteur de nombreux ouvrages à ce sujet, dans les pages de Moustique. «On se décorpore pour se trouver dans l’obscurité totale plutôt que dans un paysage lumineux. Enfin, plus rarement, des personnes se retrouvent dans un environnement hostile, entourées de gens malveillants.»
Cerveau résistant
D’après différentes études, au moins 10 % des personnes ayant survécu à un arrêt cardiaque auraient expérimenté cet état, à la frontière entre vie et mort. Scientifiquement, ce phénomène peut s’expliquer, entre autres, par la mise en veille du cerveau et l’absence d’oxygène. Si cette dernière se prolonge, des neurones commencent alors à s’éteindre pour ensuite mourir. Mais, certaines personnes parviendraient à survivre à ce processus de mort cérébrale. «Ce serait précisément au moment de la « résurrection » que l’EMI se produit. Quand le cerveau est à nouveau irrigué et que les neurones reprennent leur activité», détaille la RTBF. «Les chercheurs pensent que chaque élément d’une telle expérience (tunnel de lumière, sortie hors du corps…) est provoqué par l’atteinte d’une région cérébrale spécifique, en raison du manque d’oxygène qui survient lors de tout arrêt cardiaque.»
Stratégie de survie
En 2021, des chercheurs des universités de Liège et de Copenhague ont recueilli plus de six cents témoignages de mort imminente à travers le monde. Parmi ces centaines de récits, certains racontent avoir traversé une EMI lors d’une agression physique ou sexuelle, mais aussi au cours d’une confrontation avec une bête sauvage. Ici, aucune privation d’oxygène ou atteinte cérébrale pour expliquer l’expérience de mort imminente. Les universitaires ont alors émis une hypothèse : l’EMI serait-elle en réalité une stratégie de survie ? «Dans notre étude, nous montrons que les humains attaqués par de grands animaux tels que les lions ou les grizzlis, par des prédateurs humains tels que les délinquants sexuels, et par des prédateurs «modernes» tels que les voitures lors d’accidents de la route, peuvent connaître à la fois la thanatose (ndlr : le simulacre de mort présent dans le monde animal) et des expériences de mort imminente», précise Charlotte Martial, neuropsychologue du Coma Science Group de l’ULiège. Une nouvelle piste permettant de comprendre les éventuelles raisons biologiques du mécanisme de mort imminente, comme l’affirme le neurologue belge, Steven Laureys : «C’est peut-être la première fois que nous pouvons attribuer un but biologique aux expériences de mort imminente, qui serait le bénéfice de la survie.»
Cet article est paru dans le Télépro du 26/10/2023.
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