Du poisson ? Oui mais de saison !

Vous privilégiez les fruits et légumes locaux et de saison ? Faites pareil avec le poisson.

Une tranche de saumon fumé, une douzaine d’huîtres, quelques Saint-Jacques… Beaucoup de Belges invitent poissons et crustacés à leur table de fêtes. C’est donc le moment qu’a choisi Hugo Clément pour consacrer un numéro de «Sur le front» à la pêche durable. Quels poissons acheter pour ne pas vider les océans ? C’est la question à laquelle il répondra lundi à 21h05 sur France 5.

Manger ce qui est pêché

Il y a deux manières d’établir un menu. La plus logique serait d’aller chez le commerçant, voir ce qu’il propose et établir son menu en fonction. Mais nous agissons le plus souvent à l’inverse : on décide du menu, puis on dresse sa liste de courses. Si les Belges décident de manger du saumon à Noël, du pêcheur au poissonnier, toute la filière doit se mobiliser pour mettre du saumon sur les étals… Et si l’on changeait de point de vue ? «Arrêtons de pêcher ce que l’on veut manger, mangeons plutôt ce que l’on pêche !» Telle est la philosophie de NorthSeaChefs, un collectif belge fondé par Filip Claeys, chef doublement étoilé du De Jonkman, à Bruges.

D’Adinkerke au Japon

Il y a une quinzaine d’années, lors d’un voyage au Japon, Filip Claeys mange du thon. Waow ! Quelle saveur, quelle finesse ! Ce thon n’a absolument rien à voir avec celui que l’on trouve chez nous. Et pour cause: au Japon, le thon est un produit local. Pour Filip, petit-fils de pêcheur d’Adinkerke, cette dégustation fait l’effet d’un électrochoc. De retour en Belgique, il réunit quelques chefs pour réfléchir aux poissons qu’ils proposent à la carte. De Lionel Rigolet à Sang Hoon Degeimbre, les plus grands rejoignent le mouvement. «Pourquoi manger du thon ou du saumon alors que la mer du Nord propose une grande diversité de poissons ?», interroge Christophe Pauly, chef étoilé du Coq aux Champs. «On est de plus en plus nombreux à vouloir manger local, durable et de saison, mais on ignore souvent que cela concerne aussi le poisson.»

Un énorme gaspillage

Le local, c’est devenu une évidence pour beaucoup : mieux vaut des aliments qui ne traversent pas la planète avant d’arriver dans notre assiette. La saison, on y songe pour les fruits et les légumes, mais moins pour les produits de la mer. Or chaque poisson a sa saison, liée à son cycle de reproduction. «C’est un non-sens de manger de la sole en été», explique le chef Pauly. «Elle est pleine de laitance, toute molle et pas très agréable. Par ailleurs, savez-vous que pour obtenir 100 kilos de soles, il faut pêcher une tonne de poissons ?» Le gaspillage est immense car le consommateur veut sa sole et pas les autres espèces remontées avec elle dans le filet. Alors, on en fait quoi ?

Ne plus rejeter à la mer

Autrefois, les pêcheurs rejetaient les poissons indésirables en mer, où ils étaient condamnés à une mort presque certaine après avoir passé plusieurs (dizaines) de minutes sur le pont. Depuis 2019, cette pratique est interdite. Tout ce qui est pêché doit normalement être ramené au port, quitte à être ensuite transformé en farines animales. NorthSeaChefs milite pour que l’ensemble de la pêche puisse être valorisé en cuisine. À Bruges, le chef Claeys propose du tacaud. À Tinlot, Christophe Pauly cuisine la roussette.

Peut-on faire évoluer les mentalités ? Ils en sont persuadés. Il y a quelques décennies, les pêcheurs rejetaient systématiquement les lottes car ils les trouvaient affreuses… Aujourd’hui on sait que les joues, le foie et la queue de lotte sont un délice !

Cet article est paru dans le Télépro du 12/12/2024

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