Deuxième langue : animal !
Ce lundi à 16h35 avec le documentaire «Le Langage des animaux», Arte nous embarque à la découverte des stratégies mises en place par les animaux pour communiquer entre eux.
C’est sans doute l’un des plus mystérieux domaines du monde animal : la façon dont ils interagissent sans l’art de la parole. Et pourtant, entre chorégraphies, odeurs ou signaux sonores, les animaux ne manquent pas d’imagination pour se faire comprendre de leurs congénères. Décryptage d’une passionnante communication multi-sensorielle.
Jolie mélodie
C’est l’un des sons du monde animal que nous aimons le plus, celui du chant des oiseaux. Et si ces derniers nous réjouissent lorsque nous ouvrons nos fenêtres par une belle matinée de printemps, sachez qu’ils ne sont pas émis uniquement pour le plaisir de nos oreilles. Pour la majeure partie des espèces de volatiles, chanter/parler ne se fait pas à tue-tête, il y a un calendrier à respecter. La saison des amours, le printemps, est la plus bruyante, les mâles usant de toutes leurs vocalises pour attirer une femelle. Vient ensuite le grand silence et l’envol des jeunes.
Le langage des oiseaux se partage en deux catégories : le cri et le chant. Si le premier peut se déclencher spontanément chez un oisillon, en situation de danger par exemple, le chant, comme pour le langage humain, s’acquiert à l’écoute de ses semblables. «Un petit oisillon coupé de tout contact avec son espèce ne saura pas chanter. Si vous isolez un bébé humain, il ne développera pas de langage non plus», explique Laurence Henry, éthologue spécialiste de la vie sociale des oiseaux, dans Philosophie Magazine.
Ça farte ?
Les harengs, ces petits poissons mesurant en moyenne 30 cm de longueur à l’âge adulte, pour un poids d’environ 1 kg, ont une façon de communiquer pour le moins triviale : par l’anus et, plus précisément, à grand renfort de flatulences. Cette découverte peu commune a été réalisée au début des années 2000 par des chercheurs canadiens. Plusieurs indices leur ont permis d’affirmer que ces sons aigus étaient une manière de communiquer. D’abord, le nombre de gaz n’est pas influencé par l’ingestion de nourriture, il ne s’agit donc pas de soulager une possible digestion. Ensuite, ils produisent ces bulles principalement la nuit, elles serviraient donc éventuellement de repère aux harengs pour rester groupés lorsqu’ils ne peuvent pas se voir. Enfin, ces fréquences sonores durent entre une demi-seconde et sept secondes et demi, ce qui fait très long pour un vent, et sont audibles pour les harengs, mais pas pour la plupart de leurs prédateurs. «La fonction exacte de ces sons est inconnue» explique l’enquête, «mais comme leur fréquence s’accroît avec la densité de poissons réunis, un rôle de médiation sociale apparaît probable.»
Langage corporel
Les abeilles communiquent entre elles de bien des façons, olfactives, tactiles et sonores, mais c’est leur «langage corporel» qui intéresse particulièrement la communauté scientifique. On savait depuis un moment que leurs «danses frétillantes» étaient un moyen d’indiquer aux butineuses l’emplacement de parcelles de fleurs. Mais en 2020, des scientifiques ont annoncé, via une étude parue dans PLOS One, avoir décrypté encore un peu plus ce langage à part. Ainsi, «pour indiquer vers quel axe se situe la nourriture, les abeilles font vibrer leur abdomen de façon à décrire l’angle de direction en fonction du soleil. Pour la distance, l’abeille fait varier la durée de la vibration de son corps. Une seconde équivaut à environ 750 mètres», relate Futura-Sciences. «Enfin, pour l’abondance, l’abeille va répéter la danse et effectuer des rotations rapides au plus il y a de la nourriture.»
Signature vocale
Lorsque nous décrochons le téléphone et qu’une voix familière nous parle, nous lui associons spontanément le visage correspondant. Cette capacité, qu’on a longtemps crue uniquement humaine, est bel et bien acquise par certains animaux. C’est le cas des manchots empereurs qui, malgré le brouhaha de leur colonie, peuvent reconnaître leur partenaire et leur progéniture grâce à la signature vocale unique de ces derniers. Ce processus permettant d’associer une voix à un physique – qualifié par les scientifiques de «reconnaissance individuelle intermodale» – est aussi présente chez le lion, la chèvre, le cheval, le chien, le chat, le chimpanzé et le macaque rhésus.
Pandabook
Globalement solitaire, le panda géant a néanmoins un besoin vital de communiquer avec les autres membres de son espèce. À l’état sauvage, ils ont pour habitude de laisser des marques olfactives sur les arbres en y frottant les glandes présentes sous leur queue. Une trace dont l’odeur est bourrée d’informations : elle leur permet de connaître la position d’autres pandas sur un même territoire, mais donne aussi des indications sur leur sexe, leur âge, leur taille, leur statut social et même leur personnalité. «Ces arbres parfumés constituent un « réseau social ». Ce dernier est, comme Facebook, asynchrone, c’est-à-dire qu’il n’est pas nécessaire d’être au même endroit au même moment pour le consulter», détaille à la RTBF Ken Frank, l’un des auteurs d’une étude sur le sujet publiée sur le site de l’ONG BioOne. «Il permet à un individu de diffuser des informations à de nombreux autres spécimens, à la manière d’un enregistrement. Un panda qui marque un arbre n’est pas si différent d’une publication sur Facebook.»
Cet article est paru dans le Télépro du 5/12/2024
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici