Dans le dédale des labyrinthes
Arts, sciences, philosophie ou jeu : le mythe du labyrinthe se faufile partout dans nos vies depuis la nuit des temps. Ce lundi à 17h45 sur Arte, la série documentaire «Enquêtes archéologiques» nous emmène en crainte, aux sources de la mythologie.
Au commencement, il y a le mythe du labyrinthe. Et déjà une question : à quand remonte-t-il ? Depuis quelle époque fascine-t-il l’homme ? «Depuis toujours et partout», affirme une étude de l’université libre de Bruxelles. Les premières représentations de labyrinthe et d’acrobaties effectuées avec des taureaux remonteraient à 3.500 ans.
«Égypte, Scandinavie, Inde… : la forme labyrinthique, semble accompagner l’homme dès qu’il tente d’organiser une conception du monde et de son destin dans le monde.» Mais le mythe tel que les Grecs l’ont conçu et nous l’ont transmis remonte au VIIIe siècle avant Jésus-Christ.
Ariane, Thésée and cie
Il y a bien longtemps, Minos, le roi de Crête, demande à l’architecte Dédale de lui construire un palais. Un impératif : l’architecture doit être si compliquée qu’il sera impossible à quiconque qui y est enfermé d’en sortir. C’est que Minos compte y emprisonner le Minotaure, un monstre sanguinaire à tête de taureau et à corps d’homme auquel il offre en sacrifice, tous les sept ans, sept jeunes hommes et sept jeunes femmes originaires de la ville ennemie d’Athènes…
À ce moment interviennent Thésée et Ariane. Thésée : c’est le fils du roi d’Athènes. Ariane : la fille du roi de Crête. Alors que le jeune homme a fait le voyage vers l’île pour faire mordre la poussière au Minotaure et sauver ses concitoyens, il fait la connaissance de la jeune femme. Ils tombent amoureux et pour être certaine de revoir son bien-aimé en vie, Ariane lui confie une pelote de fil : Thésée la laissera courir derrière lui jusqu’à ce qu’il arrive au centre du labyrinthe. Une fois qu’il aura atteint son objectif et tuer la bête, il n’aura plus qu’à suivre le fil en sens inverse pour retrouver son chemin et emmener sa belle.
Thésée fait le job et les tourtereaux prennent la poudre d’escampette. La suite de leurs aventures n’est pas cousue de fil blanc et prend des allures de tragédie grecque. Mais ça, c’est une autre histoire… Le «vrai» labyrinthe ? Il n’aurait jamais existé. À ce jour, les multiples recherches entreprises à Cnossos (Crète), lieu prétendu de sa construction, sont restées vaines.
Pas un jeu d’enfant
Et nous dans tout cela ? Si le mythe est oublié par beaucoup depuis très longtemps, le labyrinthe accompagne notre vie, dès l’enfance. Dans le dédale des exemples, frayons-nous un chemin. Le jeu de la marelle pour commencer. Comme le labyrinthe, il consiste à atteindre un objectif au bout d’une longue route puis de revenir sur ses pas.
Autre grand classique : le jeu de l’oie. Avec ses pièges, ses retours en arrière, il nous amuse depuis plus de trois cents ans. «Le palais des glaces» continue lui aussi à attirer les visiteurs sur les fêtes foraines. Bien plus récent, le jeu vidéo Pac-Man est une version 2.0 du mythe ancestral et à Durbuy, le labyrinthe est une attraction phare pour les touristes chaque été.
L’art du jeu de mots
À peine l’enfant sait-il parler que le labyrinthe s’invite dans son vocabulaire au même titre que bien d’autres expressions tirées de la mythologie. Les noter toutes constituerait un véritable travail de titan. Nous n’ouvrirons donc pas cette boîte de Pandore au risque de nous perdre dans le dédale que nous prose le dictionnaire des expressions.
Les arts aussi débordent de labyrinthe. Des jardins de Versailles à l’opéra (Berlioz et «Le Monstre du labyrinthe», «Ariane à Naxos» de Monteverdi) en passant par le cinéma et la littérature («Shining» de Stanley Kubrick, «Au nom de la rose» d’Umberto Eco) ou la peinture.
La philosophie, la religion ou la psychanalyse ne sont pas en reste. De manière générale, le labyrinthe est considéré comme un chemin initiatique, un voyage semé d’embûches que l’homme doit accomplir «pour se trouver» en version psy, «pour trouver la lumière» en mode «chrétien». Des labyrinthes de toutes les formes, dans tous les domaines, pour toutes les croyances et tous les âges : de quoi s’y perdre.
Cet article est paru dans le magazine Télépro du 25/6/2020
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici