Création d’Israël : le rôle méconnu joué par Staline !
La postérité a fait de la création d’Israël la conséquence directe de la Shoah. Et pourtant…
En 1947, les Nations unies adoptent un plan de partage de la Palestine en deux États, l’un israélien et l’autre arabe. Aujourd’hui, la tragédie vécue par les Juifs d’Europe légitime l’existence de cet État hébreu, au point que le monde a oublié le jeu cynique joué par les grandes puissances dans sa création. Et comme le rappelle «Les Coulisses de l’Histoire», samedi à 20h35 sur La Trois, Joseph Staline a joué un rôle de premier plan dans ce dossier.
Née au XIXe siècle en même temps que le mouvement sioniste, la question de la création d’un État juif en Palestine revient sur le devant de la scène à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Entassés dans des camps, des milliers de rescapés de l’Holocauste refusent de retourner dans leur pays d’origine.
Or, un nouveau départ dans le berceau de leurs ancêtres s’avère compliqué. Les Anglais, qui gouvernent le territoire, s’opposent à leur venue. Londres, qui tient à ménager ses alliés arabes, leur a promis de restreindre les conditions d’entrée dans le pays. Au grand désespoir des premiers pionniers qui rêvent de fonder un vrai État face à une population arabe bien supérieure.
À la tête de l’Agence juive, David Ben Gourion combat cette politique migratoire et active ses réseaux aux États-Unis, forts d’une importante communauté juive. Rapidement, des divergences de vue se font sentir entre Londres et son allié américain. Voyant l’occasion de mettre un pied au Moyen-Orient, d’où l’URSS a toujours été écartée, Joseph Staline entre dans la danse.
Bourbier palestinien
Moscou autorise les Juifs des pays occupés par son armée à franchir les frontières. Une marée humaine se met en marche vers les pays alliés, qui croulent sous le poids des réfugiés.
La situation met le feu aux poudres. Des filières d’immigration clandestine vers la Terre promise se multiplient et une vague d’attentats frappe les intérêts britanniques à Jérusalem durant l’été 1946. L’année suivante, les Anglais jettent l’éponge.
Staline jubile : le front anglo-américain est rompu, le mandat britannique est à l’agonie et l’URSS est en position de force pour peser sur les débats. Les Nations unies sont chargées de trouver une issue au conflit : Ben Gourion plaide pour la création de deux États, l’un israélien et l’autre palestinien, Jérusalem devenant une zone internationale.
Si la plupart des pays démocratiques sont ralliés à la cause sioniste, la grande inconnue reste l’URSS qui, contre toute attente, se déclare favorable. «Ce soutien soviétique à la création d’un État juif en Palestine fut une surprise pour tous les acteurs de l’époque», écrit Laurent Rucker dans «Staline, Israël et les Juifs» (PUF). «Il a longtemps intrigué les historiens.»
Et pour cause, «Staline décida de soutenir le mouvement sioniste au moment même où il engageait, dans son propre pays et dans les « démocraties populaires » est-européennes, une nouvelle vague de répression dont les Juifs étaient l’une des cibles principales.»
Armes tchécoslovaques
Pour les Juifs, la joie est de courte durée car, au lendemain de l’annonce de l’indépendance d’Israël en mai 1948, les voisins arabes s’apprêtent à attaquer. Avec sa modeste armée, Ben Gourion ne peut rivaliser. Il lui faut des armes !
Une fois de plus, Staline vole à son secours. Sous la pression du Kremlin, la Tchécoslovaquie se révèle un fournisseur de premier choix, permettant au tout jeune État hébreu de remporter la victoire. Ben Gourion remercie Staline. Mais la lune de miel entre les deux pays sera de courte durée, le «Père des peuples» voyant finalement dans l’enthousiasme des Juifs soviétiques pour Israël une menace visant à les détourner de l’idéal communiste…
Cet article est paru dans le Télépro du 22/9/2022
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