Ce trésor de Napoléon volé par Hitler

Un documentaire d'Isabelle Gendre © Mediawan/RTBF

Des deux mille objets subtilisés par le Führer au musée des Invalides de Paris, seule la moitié aurait été restituée après-guerre. Qu’est-il advenu du reste ?

En quittant Paris en 1940, Hitler donne l’ordre de piller les Invalides : les trophées de guerre de Napoléon sont transférés à Berlin pour orner le grandiose musée que le Führer veut construire au sein de sa nouvelle «Germania». Plus de 2.000 objets prennent le chemin du Reich. Après la guerre, un millier seulement seront retrouvés et rapatriés… Qu’est devenu le Trésor de guerre de Napoléon ?

Hitler fasciné

Le documentaire «Le Trésor de guerre de Napoléon» (La Trois, samedi soir) lève un coin du voile sur ce pillage du musée de l’Armée aux Invalides par les Allemands en 1940. Pourquoi et comment ces objets précieux – fusils, armures, canons, épées, drapeaux… -, furent-ils soigneusement sélectionnés par les experts du III e Reich, à destination de Berlin ou de Vienne ? À l’aide de témoignages éclairants d’historiens allemands et français et d’archives filmées des années 1940, le doc analyse la fascination exercée par Napoléon sur Hitler. Dans son bureau à Munich, trône un buste de l’Empereur. Le Führer admire l’homme qui a conquis l’Europe en un temps record, il apprécie le soldat, le propagandiste, l’empereur…

Lors de sa rapide visite parisienne, le 23 juin 1940, Hitler se rend sous le dôme des Invalides et se recueille devant le tombeau de son «modèle». Dès le lendemain, il ordonne de rafler tout ce qui a trait à la grandeur passée de la Prusse et de l’Autriche, dont les trophées sont aux Invalides.

Pillages de Napoléon

En effet, c’est là que, depuis 1794, les Français entassent tableaux, armes, manuscrits et étendards pris dans les territoires conquis par la Grande Armée. Après sa victoire à Austerlitz, le 2 décembre 1805, Napoléon fait vider l’Arsenal de Vienne. L’Empereur pille allègrement les vaincus pour financer ses prochaines guerres et n’hésite pas à spolier des oeuvres d’art. Après la bataille de Iéna, il s’empare de l’épée du roi de Prusse Frédéric II, dont il se considère le successeur, et l’envoie en France. Il va jusqu’à démonter le quadrige de la porte de Brandebourg à Berlin. La célèbre Batterie triomphale (huit canons prussiens pris en 1806 à Vienne) trône devant les Invalides.

Vengeance du Fürher

Aux yeux des nazis, le pillage se justifie donc par le retour à la mère patrie d’un patrimoine culturel d’essence germanique. Après l’armistice de 1940, une unité secrète nazie est créée à Paris pour spolier à son tour les oeuvres d’art du continent. Plus de 2.000 objets exposés ou stockés aux Invalides, qui constituent les pièces les plus prestigieuses de l’histoire de France, prennent le chemin du Reich. La fameuse Batterie triomphale quitte les Invalides, direction Berlin. Hitler venge aussi son pays de l’humiliation du traité de Versailles, signé en 1919, en démontant le célèbre wagon situé à Compiègne pour l’exposer en Allemagne.

Restitution partielle

Nouvelle valse de l’Histoire : à partir de 1942, les pièces importantes du trésor de guerre détenues par l’Allemagne sont évacuées vers des dépôts pour échapper aux bombardements alliés. En mai 1945, l’Américain Eisenhower crée une unité pour restituer les oeuvres aux pays pillés, les fameux «Monuments Men» auxquels George Clooney a consacré un film. L’armure de François I er est retrouvée au Tyrol. Une autre mission de recherche, française, remet la main sur quelque 1.000 objets. La Batterie triomphale regagne les Invalides. Quant au wagon de l’armistice, il a été détruit. Et certaines pièces, situées en zone soviétique, ont simplement disparu…

Cet article est paru dans le Télépro du 26/10/2023.

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