Cathédrale de Cologne, l’éternel chantier

Au fil des ans, la pollution (notamment des trains et des voitures) a noirci la façade, mais son nettoyage impliquerait un coût inenvisageable © Getty Images/iStockphoto
Stéphanie Breuer Journaliste

Le monument le plus visité d’outre-Rhin est une merveille d’architecture gothique.

Chaque année, six millions de visiteurs se pressent dans la cathédrale de Cologne, un chef-d’œuvre d’architecture qui défie le temps. Avec tous les magnifiques détails qui la composent, elle a été bâtie « pour l‘œil de Dieu » durant plus de… six siècles ! Samedi à 20h50, Arte nous emmène à la découverte de ce joyau de l’art gothique avec le documentaire «Un joyau à la française, la cathédrale de Cologne».

Située au centre de Cologne, au bord du Rhin et juste à côté de l’actuelle gare ferroviaire, la cathédrale s’élève sur les remparts de l’ancienne cité romaine de Colonia, capitale de l’antique Germanie. Après la chute de l’Empire romain et la diffusion du christianisme, une première église cathédrale voit le jour au VIe siècle. Elle est remplacée, trois siècles plus tard, par une basilique inspirée de la basilique Saint-Pierre de Rome, les évêques de Cologne voyant alors leur ville comme la « Rome du Nord ».

Un écrin pour un trésor

De précieuses reliques – comme la férule et des chaînes de saint Pierre – y sont conservées et attirent des pèlerins de toute l’Europe. En 1164, après le sac de Milan, Frédéric Barberousse ramène un trésor qui éclipse tous les autres et l’offre à l’archevêque de Cologne Renaud de Dassel : les ossements des rois mages. Un coffret en or est aussitôt commandé pour les conserver dans la ville rhénane, alors en plein essor. La fabrication de cette Châsse des rois mages dure plus de quarante ans. Chaque année, à l’Épiphanie, ce joyau d’orfèvrerie, l’un des reliquaires les plus importants du Moyen Âge, continue d’attirer des fidèles.

Au milieu du XIIIe siècle, l’archevêque Konrad von Hochstaden décide d’offrir à ce trésor un écrin à sa mesure. Inspirés par les joyaux de l’architecture gothique, apparue en Île-de-France au siècle précédent, les plans de la nouvelle cathédrale à cinq nefs se caractérisent par une recherche inédite de gigantisme et de perfection géométrique.
La première pierre est posée en 1248. Et si la cathédrale est consacrée en 1322, les travaux se poursuivent pendant encore plusieurs siècles, avant d’être interrompus par l’épidémie de peste noire au XIVe siècle, puis au XVIe siècle, sous l’effet de la Réforme de Martin Luther – qui dénonce le commerce des Indulgences, permettant à l’Église de financer les travaux – et de la Renaissance.

Achevée au XIXe siècle

Après vingt ans d’occupation napoléonienne de la ville (1794-1814), dont l’édifice sort relativement épargné, des voix s’élèvent pour qu’on achève dans un même mouvement l’unité allemande et la cathédrale de Cologne. À la même époque, le romantisme allemand réhabilite le Moyen Âge, vu comme un idéal perdu. Dans ce contexte, un marchand d’art de Cologne, Sulpiz Boisserée, nourrit le dessein de reprendre les travaux de la cathédrale inachevée. Soutenu par l’écrivain allemand Goethe et le futur roi de Prusse, Frédéric-Guillaume IV, il met la main, par un incroyable coup de chance, sur les plans originaux. Le 4 septembre 1842, la première pierre du nouveau chantier est posée, pour un coût total de 6 millions et demi de thaler (soit l’équivalent d’un milliard d’euros aujourd’hui).

En 1880, neuf ans après la proclamation de l’Empire allemand, les deux tours de la cathédrale tutoient enfin le ciel, culminant à 157 mètres du sol. Mais la Seconde Guerre mondiale apporte, au siècle suivant, son lot de destructions : neuf des voûtes principales s’effondrent sous les bombardements. Depuis, la cathédrale a bénéficié d’importantes restaurations – avec des apports modernes, dont la verrière dessinée par le peintre Gerhard Richter ou une gargouille représentant un bouc, mascotte du club de foot local -, qui se poursuivent aujourd’hui.

Des chiffres fous

Inscrite au patrimoine mondial de l’Humanité par l’Unesco en 1996, la cathédrale de Cologne affiche des dimensions phénoménales. Elle comporte cinq nefs, dont la plus grande mesure 144 m de longueur sur 45 m de largeur et coupée par un transept de 86 m de longueur. La hauteur de la voûte est de 43 m et ses fondations monumentales s’enfoncent à 17 m sous terre. Sa façade (qui mesure plus de 7.000 m²) est flanquée de deux tours, culminant à 157 m et comptant 533 marches. En 1880, lorsque les tours sont enfin achevées, la cathédrale est alors le bâtiment le plus haut du monde, avant d’être dépassée cinq ans plus tard par le Washington Monument, puis par la tour Eiffel en 1889.

Cet article est paru dans le Télépro du 19/9/2024

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