Ainsi fond, fond, fond, le permafrost
Samedi à 23h15 avec le documentaire «Retour à l’âge de glace, l’hypothèse de Zimov», La Trois s’intéresse aux études du scientifique Sergueï Zimov, sur l’écologie arctique. Un sujet glaçant qu’abordera aussi Arte à la même heure, dans «42, la réponse à presque tout».
Dans le documentaire diffusé sur La Trois, nous suivons Sergueï et Nikita Zimov, un couple père-fils de scientifiques russes. En Sibérie, ils tentent une expérience unique : reconstruire l’écosystème de l’âge de glace afin de lutter contre le dégel du permafrost.
Ça va chauffer !
Parmi les glaces menacées par le réchauffement climatique, une catégorie plus spécifique inquiète davantage : le permafrost. Ce permafrost, ou pergélisol en français, est un sol dont la température reste sous le seuil de 0 °C pendant au moins deux ans consécutifs. Ces couches de glaces perpétuelles recouvrent à peu près 25 % de la surface terrestre et sont principalement présentes en Russie, au Canada et en Alaska.
Avant l’augmentation significative de la température globale, ces sols voyaient seulement leur partie supérieure subir la décongélation estivale. Un processus normal qui permet à la végétation de se développer. Mais, avec l’augmentation des températures, les couches profondes commencent elles aussi à suer. «Une zone plus étendue que la France et l’Allemagne est en train de fondre pour la première fois depuis onze mille ans ! Selon les scénarios les plus optimistes, d’ici 2100, 30 % du pergélisol serait amené à disparaître», détaille Good Planet.
Dans l’équipe des pessimistes, des simulations montrent que plus de la moitié des territoires recouverts de cette couche de permafrost pourrait fondre d’ici 2050.
Bombe à retardement
Si la fonte du permafrost fait tant parler, c’est que ce dernier représente une sorte de boîte de Pandore dont l’ouverture et la dispersion des maux sont uniquement empêchées par la glace. Dans un premier temps, en subissant le réchauffement climatique, le permafrost doit faire face à ce qu’on appelle une «boucle rétroactive», comprenez un cercle vicieux.
«Le problème est que le permafrost stocke deux fois plus de méthane CH4 et de dioxyde de carbone CO2 que l’atmosphère terrestre. Ces quantités de gaz à effet de serre correspondent à environ quinze années d’émissions humaines. Libérés, ces gaz entraîneraient un réchauffement climatique encore plus puissant et rapide que prévu», poursuit Good Planet.
Ensuite, plusieurs scientifiques estiment que ce pergélisol renferme d’anciens virus contre lesquels l’homme aurait bien du mal à se défendre, comme l’explique Professeur Jean-Michel Claverie au magazine Géo. «Le vrai danger réside au plus profond du permafrost, à plusieurs mètres de profondeur, dans les couches qui peuvent dater de 2 millions d’années et qui renferment potentiellement des pathogènes inconnus et autres virus géants.»
Zimov à la rescousse
Observer la glace fondre d’un œil fataliste, très peu pour Sergueï et Nikita Zimov. Leur solution : repeupler la toundra sibérienne de ses grands herbivores qui ont déserté les lieux depuis longtemps. En bref, recréer les conditions du Pléistocène, aussi appelé l’âge de glace.
Pour se donner les moyens de réussir, en 1996, père et fils ont créé un enclos de 20 km², une sorte de «Pléistocène Park», en pleine forêt sibérienne pour y faire évoluer yaks, rennes, bisons et bœufs musqués. Ils envisagent même de reconstituer le génome du mammouth laineux de Sibérie.
L’hypothèse que les Zimov étudient depuis maintenant vingt-cinq ans repose sur différents facteurs. Le passage répété des herbivores va piétiner le manteau neigeux et donc permettre au froid de l’hiver d’atteindre plus facilement le permafrost. Les animaux vont aussi favoriser le retour d’un paysage de steppe. Ces grandes étendues dépourvues d’arbres retiennent moins les rayons du soleil et de ce fait, leur chaleur. Un double bienfait, puisque l’écosystème des steppes permet une augmentation de la biodiversité et, contrairement aux idées reçues, retiennent mieux le carbone qu’une forêt.
Le concept des Zimov est répertorié comme l’une des «100 solutions les plus importantes au réchauffement climatique» par le Projet Drawdown, une liste établie par des universitaires, des scientifiques et des politiques.
Cet article est paru dans le Télépro du 4/11/2021
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