Agriculteurs à bout de nerfs

Balades sans limites à travers champs, clôtures dégradées, détritus déposés… Le monde agricole en a assez des incivilités ruinant son travail. Et le confinement ne fait qu’aggraver les choses !

Les agriculteurs n’en peuvent plus de la délinquance et de la bêtise humaine qui saccagent leur travail et tuent parfois leurs bêtes. Tel est le constat d’un sujet d’«Envoyé spécial», ce jeudi à 21h05 sur France 2.

Et chez nous ? «Ce n’est pas neuf mais avec la crise sanitaire, c’est pire que jamais», affirme José Renard, secrétaire général de la Fédération wallonne de l’Agriculture. L’an dernier, la FWA a lancé trois campagnes pour tenter de faire cesser ces incivilités.

Matelas, sanitaires, déchets verts

Tout commence au printemps 2020, avec le premier confinement. Les gens sont bloqués chez eux, ils font du rangement… mais les recyparcs sont fermés. Fin mars, deux semaines à peine après le début du lockdown, l’asbl Be Wapp interroge les 262 communes de Wallonie. Une sur deux constate déjà une augmentation des dépôts sauvages sur son territoire. Principalement dans les zones agricoles, en bord de prairie ou entre deux champs.

Matelas, vélos, sanitaires, déchets verts… On trouve de tout. «Une fois que ce dépôt est sur votre terrain, vous en devenez légalement propriétaire», explique José Renard. «Les agriculteurs n’ont donc d’autre choix que de nettoyer. À leurs frais.»

La FWA lance alors une campagne d’affichage pour rappeler que la nature n’est pas un dépotoir. «Quelques jours après le lancement de cette première campagne, nous avons été contraints d’en faire une seconde, rappelant cette fois que les champs sont un lieu de production alimentaire, pas un lieu de balade…»

Des canettes dans l’estomac

Aux premiers beaux jours du déconfinement, les campagnes ont été envahies de promeneurs, et tous ne se contentaient pas d’arpenter les sentiers. «Les gens ne font plus la différence entre un chemin, une prairie et un champ. En réalité, ils s’en fichent. Certains sont à pied, mais d’autres en VTT ou en quad. Ils traversent tout. Ça fait de sacrés dégâts sur les cultures en croissance. Ça abîme aussi les prairies. Et je ne vous parle pas du bétail que l’on retrouve sur les routes parce que les barrières ont été ouvertes…»

Au cœur de l’été, la FWA est obligée de lancer une troisième campagne. À Ramillies en Brabant wallon et à Pondrôme dans le Namurois, deux vaches sont mortes après avoir ingéré des bouts de canettes. «Si vous abandonnez une canette dans un champ, elle va être broyée par les machines agricoles, et se retrouver dans le fourrage… Ces petits morceaux de métal sont tranchants comme une lame de rasoir. Ça perfore les organes digestifs. Dans certains cas, le vétérinaire peut essayer de récupérer les fragments métalliques en introduisant un aimant dans la panse de la bête. Mais lorsque les dégâts sont là, lorsqu’il y a des hémorragies, il n’y a plus rien à faire. Il faut euthanasier…» Une trentaine de cas sont répertoriés chaque année dans les fermes wallonnes.

Cette terre qui nous nourrit

Depuis quelques temps, les agriculteurs doivent aussi faire face à l’agressivité de riverains qui ne supportent plus le bruit, la poussière, l’odeur… «On pointe parfois les néoruraux, mais il n’y a pas qu’eux», estime José Renard. «Je crois que les gens ont perdu le contact avec la terre. Autrefois, on avait tous un voisin ou un cousin agriculteur. On savait comment il travaillait. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Les gens semblent avoir oublié d’où vient leur alimentation. Ce n’est pas tout à fait vrai puisque, pendant le confinement, ils ont été nombreux à se fournir chez les producteurs locaux. Malheureusement, ça n’a pas duré. Ce sont pourtant les champs, les prairies, le bétail… et les agriculteurs qui nous nourrissent au quotidien. Alors, s’il vous plait, respectez la campagne et ceux qui y travaillent !»

Cet article est paru dans le magazine Télépro du 11/02/2021.

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