À quoi ressemblait un repas de la préhistoire ?
«Dans les cuisines de la préhistoire» (samedi à 22h25 sur Arte) nous montre comment notre régime alimentaire a contribué à l’évolution de notre espèce.
De nos jours, l’alimentation sous sa forme gastronomique est passée au rang d’art et les chefs les plus inventifs sont des stars. Si nous semblons tous être devenus de fins gourmets, comment nos ancêtres préhistoriques expérimentaient-ils leur alimentation ?
Menu préhistorique
Pour décrypter ce que nos très lointains aïeux mangeaient, il faut s’en référer aux dents, mâchoires, os et excréments retrouvés lors de fouilles archéologiques. Grâce à des analyses chimiques sur des dents, par exemple, il est possible d’obtenir de précieux indices : des stries d’usure verticales traduisent une alimentation riche en produits carnés, horizontales elles indiquent l’inverse.
Durant la préhistoire, période que l’on comprend, généralement, entre l’apparition du genre Homo il y a environ 2,8 millions d’années et l’invention de l’écriture en 3.300 av. J.-C., les régimes alimentaires de nos ancêtres variaient selon différents facteurs. «Nos ancêtres chasseurs-cueilleurs dévoraient peu de viande, par contre beaucoup de plantes différentes. Ils étaient également très friands de moules et de petites proies animales», explique, sur France Inter, le sociologue de l’alimentation Éric Birlouez.
«Mais ils pouvaient aussi se diversifier selon les régions. Si les hommes de Néandertal (300.000 – 30.000 av. J.-C) en Europe glaciaire mangeaient beaucoup de viande, c’était principalement quand il faisait froid, car il fallait s’adapter aux conditions climatiques.»
Grottes trois étoiles
Lorsque nous imaginons nos ancêtres préhistoriques passer à table, nous nous figurons forcément des êtres engloutissant des aliments dans le seul but de survivre. En 2022, une étude menée par des chercheurs de l’Université de Cambridge a démenti cette idée reçue. Selon eux, nous avions déjà l’habitude de relever le goût de nos plats il y a 70.000 ans ! «Notre étude montre que le régime alimentaire des Néandertaliens et des Homo sapiens était complexe, impliquant plusieurs étapes de préparation, et qu’ils s’efforçaient d’assaisonner leurs mets et d’utiliser des plantes aux saveurs amères et piquantes.»
Pour étayer leurs propos, les chercheurs se basent sur de récentes découvertes, comme dans la grotte de Shanidar, au Kurdistan irakien, où des fragments d’aliments anciens ont été retrouvés. «Il s’agissait notamment de moutarde sauvage et de térébinthe (pistache sauvage) mélangées à des aliments. Ces plantes, consommées pendant des dizaines de milliers d’années dans des régions distantes, pourraient être à l’origine des pratiques culinaires humaines.»
Cerveau bien nourri
Dans un premier temps, nos ancêtres ont certes dû s’alimenter sans feu, mais ensuite, il semblerait que la maîtrise de celui-ci ait donné à l’Homo sapiens un avantage décisif permettant, entre autres, à notre cerveau de grossir. Alors que le processus de digestion d’aliments crus ne libérait que 30 à 40 % de leurs nutriments, la cuisson donne l’opportunité au corps de transformer quasiment 100 % de ce qu’il ingère en énergie.
Pour Suzana Herculano-Houzel, biologiste et neuroscientifique, le lien entre l’alimentation et le développement du cerveau est évident. «Ce que notre espèce a gagné en préparant ses aliments, et pas seulement avec le feu, également avant lui en utilisant des outils pour modifier la nourriture, nous a permis d’avoir plus de neurones, donc plus de capacités cognitives», détaille-telle dans le documentaire. «Le nombre de neurones dans le cerveau humain a triplé depuis 1,5 million d’années. Et ceci n’aurait pas été possible sans le changement radical que l’alimentation a apporté.»
Cet article est paru dans le Télépro du 23/5/2024
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici