Un téléfilm sur le Brexit proposé aux Britanniques avant un vote crucial
Un téléfilm haletant avec en vedette Benedict Cumberbatch dans le rôle du cerveau de la campagne en faveur du départ du Royaume-Uni de l’Union européenne arrive ce lundi 7 janvier sur les écrans britanniques, quelques jours avant un vote crucial sur le Brexit au Parlement.
« Brexit : The Uncivil War », qui sera diffusé ce lundi à 21 heures sur Channel 4, met en scène les personnages clés et les stratégies à l’oeuvre au cours de la campagne du référendum de 2016, avec un slogan : « Tout le monde sait qui a gagné. Mais peu de gens savent comment ».
Les créateurs de ce téléfilm, commandé en 2017, ne pouvaient pas espérer un meilleur moment pour diffuser ce drame politique de deux heures. L’accord de Brexit négocié par Theresa May avec l’Union européenne sera présenté aux députés britanniques mi-janvier. Le vote était initialement prévu pour décembre mais la cheffe du gouvernement a décidé de le reporter afin d’éviter un probable échec. Il devrait avoir lieu le mardi 15 janvier prochain.
Aujourd’hui, sans solutions alternatives sur la table et avec la sombre perspective d’un divorce brutal à l’horizon, l’enjeu est plus important que jamais pour Theresa May et pour le pays.
Pour les créateurs du film, c’est la période idéale pour raconter comment tout cela a commencé. « Je crois que l’art, le théâtre et le récit ont autant un rôle civique qu’ils divertissent », a déclaré le scénariste de 37 ans, James Graham, à l’occasion d’une projection en avant-première jeudi. « Cela peut nous aider à comprendre ce qui se passe en ce moment d’une manière différente que le journalisme ou les réseaux sociaux ».
« Les vrais décideurs »
Benedict Cumberbatch, connu pour son interprétation de Sherlock Holmes dans une série de la BBC, incarne Dominic Cummings, le directeur de « Vote Leave », le groupe qui menait la campagne officielle en faveur du Brexit et a gagné le référendum malgré le soutien des grands partis politiques au maintien dans l’UE.
Peu connu du grand public, Dominic Cummings a eu un rôle décisif dans la campagne, en particulier en insistant pour que soit menée une campagne sur les réseaux sociaux, plutôt qu’une campagne électorale traditionnelle. Le film le décrit comme un perturbateur autoproclamé déployant des tactiques tirées de « L’art de la guerre » de Sun Tzu.
James Graham a expliqué qu’il avait choisi de mettre en lumière les stratèges du référendum parce qu’ils étaient « les vrais décideurs » tout en étant « des gens dont vous n’avez jamais entendu parler ». « Il est devenu évident pour moi que (Cummings) … était le personnage le plus intéressant, car il est l’agent du changement », a-t-il déclaré.
Les tactiques employées par les militants du Brexit ont été minutieusement analysées depuis le référendum, en particulier l’utilisation de slogans trompeurs et de publicités politiques ciblées.
En juillet, la commission électorale britannique a imposé une amende à Vote Leave pour avoir enfreint le code électoral. M. Graham a dit qu’il ne voulait pas porter de jugement sur les stratégies numériques déployées par les partisans du Brexit, l’enquête étant toujours en cours. « J’espère que nous suggérons, non pas que la technologie et les données constituent un outil de manipulation malfaisant, mais que ce sont désormais les plates-formes à travers lesquelles nous discutons politique. »
« Terrifiant »
Parmi les personnages dépeints dans le film, Boris Johnson et Nigel Farage, deux des principaux militants du Brexit, ainsi que l’homme d’affaires Arron Banks, le grand argentier des « Brexiters », qui fait l’objet d’une enquête sur ses finances.
Le scénario repose sur les livres du journaliste politique du Sunday Times, Tim Shipman, et du responsable de la campagne pour le maintien dans l’UE, Craig Oliver. Le scénariste a également interrogé des membres d’équipes des deux camps et a réussi à convaincre Dominic Cummings de le rencontrer ainsi que Benedict Cumberbatch. Ce dernier a passé une soirée chez Dominic Cummings, discutant avec lui jusqu’à l’aube.
James Graham s’est dit « déconcerté » par les articles selon lesquels Benedict Cumberbatch était mal à l’aise face à la manière empathique avec laquelle Dominic Cummings était dépeint dans le téléfilm final. « Quiconque connaît un peu le métier d’acteur sait qu’il est impossible d’endosser un rôle sans comprendre le personnage – et c’était la principale obsession de Benedict », a ajouté James Graham.
Le scénariste, qui a travaillé pour le théâtre, avait écrit en 2017 la pièce à succès « Ink », à propos du tabloïd The Sun du magnat des médias Rupert Murdoch. James Graham a admis que s’attaquer à la question controversée du Brexit, qui a révélé des lignes de faille profondément ancrées dans la société britannique, était plus que « terrifiant ». « Pour ce qui est des émotions, Rupert Murdoch n’est rien comparé au Brexit ».
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