Rodrigo Beenkens : «Pour la première fois, les Belges ont plus à perdre qu’à gagner»

Rodrigo Beenkens : «Pour la première fois, les Belges ont plus à perdre qu'à gagner»
Pierre Bertinchamps
Pierre Bertinchamps Journaliste

Le commentateur attitré des Diables Rouges, sur la RTBF, participe à sa 8e Coupe du Monde, mais doit faire une croix sur le Tour de France…

Si on tient les bons comptes, c’est sa 9e phase finale de la Coupe du Monde de football. En 1986, Rodrigo Beenkens avait été invité dans «Mexigoal» par Michel Lecomte. Depuis, le virus est resté.

«J’en ai fait deux depuis les studios : en 1990 et 2002, et donc ce sera la sixième fois que je me rends sur place», détaille le journaliste.

Niveau pronostics, le commentateur «ne veut pas rentrer là-dedans», mais il explique, par expérience, qu’à chaque édition, «en demi-finale, il y a toujours un pays inattendu». Sera-ce la Belgique en 2018 ? «Ah ah, mais est-ce que la Belgique est encore considérer comme un pays inattendu…» On n’en saura pas plus !

Pour vous, ça change quelque chose si la Belgique est dans le top 8 mondial ?

C’est du jamais vu ! Pour le commentaire, non, ça ne change rien. Mais c’est une situation inédite parce qu’on a plus à perdre qu’à gagner. Au Brésil, le fait d’y être, c’était déjà pas mal. Et je me souviens que les critiques étaient rudes du fait qu’on soit éliminé en 1/4 de finale par l’Argentine… Ici, la Belgique est dans une bonne posture, et si on s’en va en 1/8 de finale, on pourra considérer ça comme un échec.

L’excitation est la même en 2018, qu’en 1994 ?

Par rapport à mon métier, oui. La dernière Coupe du Monde était dans le pays qui a sublimé le football : le Brésil. Et l’Afrique du Sud, c’était la première fois qu’on allait sur le continent africain… D’un point de vue sportif, c’est très intéressant d’autant qu’il y a plus qu’un ou deux favoris. Tout peut arriver, et je trouve ça assez chouette.

On commente encore de la même façon en 2018 ?

Avec les réseaux sociaux, on est abreuvé d’infos, et il faut faire un tri, puis recouper… Ce qui est amusant aussi, c’est qu’au Mondial, nous sommes amenés à commenter des équipes de pays qu’on ne fera sans doute plus jamais comme le Panama ou l’Arabie Saoudite. Le but n’est pas de faire de la géopolitique, mais c’est très intéressant. Le commentateur a un champ de vision plus large que l’écran du téléspectateur. Et pour moi, l’ouïe et l’odorat sont très importants dans un stade aussi. On ne pourra jamais me contredire par rapport à ce que j’entends ou je (res)sens sur place.

En Russie, vous ne craignez pas que pas mal de choses soient cadenassées ?

J’ai posé la question en réunion de rédaction de savoir si les commentateurs ont une liberté de parole totale. La réponse a été «oui». Mon premier match, c’est quand même la Russie qui reçoit l’Arabie Saoudite. Une rencontre compliquée à plus d’un titre. À nous aussi d’être attentifs. Le but n’est pas de faire de la politique dans les commentaires, et on se doit de ne pas choquer… les traditions ne sont pas les mêmes partout. J’ai lu pas mal de bouquins sur la Russie, avant de partir, pour comprendre un peu la façon de vivre et les coutumes.

Sur place, vous en profitez pour visiter les villes qui vous accueillent ?

Dans la phase de poules, c’est quasiment impossible. Après, il se peut que l’on commence à avoir deux ou trois jours entre les matches. Alors on verra… Ensuite, ça va dépendre du parcours des Belges.

Au Brésil, j’ai pu profiter un peu de Rio. En Russie, il y aura des moments frustrants, parce que je voulais absolument découvrir Saint-Pétersbourg, mais je n’y serai que pour un seul match, donc 36 heures maximum. Ce sera juste… Entendons-nous bien, je n’y vais pas non plus pour faire du tourisme.

Le Tour de France va vous manquer, cette année ?

Ce n’est pas possible de faire les deux. Je l’ai fait une fois, c’est très lourd. D’autant que maintenant, les étapes sont intégrales. Le Tour de France, c’est un feuilleton. On ne peut pas arriver, comme ça, en cours de route. Si vous avez raté la moitié de la série, vous n’êtes pas dedans, et puis ça ne se fait pas non plus vis-à-vis de la personne qui vous a remplacé. C’est le foot ou le cyclisme, pas les deux ! Pourtant, je prends sincèrement énormément de plaisir à commenter du cyclisme

Entretien : Pierre Bertinchamps

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