Rencontre avec une calltaker d’«Appel d’urgence» (RTL-TVI) : «C’est l’histoire des appelants, pas la mienne»

Rencontre avec une calltaker d’«Appel d’urgence» (RTL-TVI) : «C’est l’histoire des appelants, pas la mienne»
Pierre Bertinchamps
Pierre Bertinchamps Journaliste

«Appel d’urgence» revient pour une deuxième saison, ce dimanche, sur RTL-TVI. Aurélie, calltaker à Mons, a accepté de parler de son métier.

Après Liège, c’est à Mons que les caméras de RTL se sont posées pour «Appel d’urgence». Comme l’an dernier, l’émission va intégrer les appels du 112 et du 101 qui arrivent depuis le Hainaut (et une partie du Brabant wallon).

Le Centre d’appels d’urgence de Mons reçoit plus de 450.000 appels par an, et il fonctionne avec 52 calltakers et 49 policiers. Cette deuxième fournée sur RTL-TVI comportera six numéros, et «une 3e saison est déjà en préparation», précise la chaîne.

Aurélie, 33 ans, et calltaker depuis six ans raconte son parcours…

Vous aviez une carrière de commerciale. Comment avez-vous fait le pas vers le callcenter des urgences ?

J’ai fait des études d’éducation physique, et j’avais passé le brevet de secourisme. Je suis tombée sur l’offre d’emploi du centre du 112 (urgences médicales). Le monde policier m’intéressait aussi, donc c’était tout bénéfice pour moi de me retrouver à répondre aux appels du 101 (police).

Les appels sont parfois forts émotionnellement. Comment faites-vous pour tenir plusieurs heures ?

Au tout début de ma carrière, j’ai eu sur la même journée, deux appels très choquants. Après le premier, je suis sortie et il m’a fallu trois quarts d’heures pour revenir prendre mon poste et décrocher le téléphone. Et en fait, celui-là, c’était rien… La personne avait un peu gonflé les choses, et quand on a envoyé les secours, il ne s’était rien passé. L’individu avait bu et racontait n’importe quoi. Cette situation m’a appris à ne pas m’investir «moi-même». C’est l’histoire des appelants, pas la mienne. Et je dois prendre énormément de recul par rapport à ce que je reçois comme information. Ce n’est pas toujours évident. On utilise beaucoup l’humour pour dédramatiser des situations.

Je joue dans une troupe de théâtre, donc je n’ai pas la crainte d’être repérée par les gens. Ma crainte a plutôt été au niveau de la sécurité. Là, par contre, je me suis posée des questions. On a parfois des menaces des appelants… Je me suis renseignée auprès des collègues de Liège pour savoir s’il y avait eu des menaces ou du harcèlement, l’an dernier. Et ils nous ont rassurés. Et puis, ça ne va durer que quelques semaines…

Pas de regrets d’avoir changé d’orientation ?

Non. C’est un métier qui n’est pas évident, et même fatigant, mais c’est un chouette métier !

On peut faire toute une carrière à ce rythme-là ?

J’arrive doucement au bout, je le reconnais. J’ai entrepris de reprendre des études en parallèle, pour, au cas où, préparer ma sortie… Mais j’ai des collègues qui sont là depuis très longtemps, qui sont très contents, et ils ne comptent pas partir.

Entretien : Pierre Bertinchamps

Découvrez la bande-annonce de l’émission :

Vous êtes formée pour gérer tous les types d’appels ?

Oui, on ne peut pas, du jour au lendemain, prendre un poste de calltaker et gérer un appel. Il y a une formation à l’académie de police (pour le 101), et une formation en interne où les nouveaux sont en doublure. D’abord passif, et ensuite ils répondent, mais toujours avec quelqu’un à coté en soutien. Dans mon cas, mon tout premier appel était un suicide, et quand mon collègue l’a su, il m’a poussé et il a repris le téléphone. C’est une garantie aussi quand on risque de lâcher prise, surtout quand on commence. Ça arrive encore aujourd’hui. Entre collègues, on peut reprendre un appel si on a du mal à gérer émotionnellement. Nous sommes une équipe.

Dans l’émission, on dit qu’il y a plus d’appels l’été. Pourquoi ?

Il y a les barbecues, le tapage nocturne et la chaleur. Il y aussi plus de bagarres dues à l’alcool. Comme il fait chaud, on consomme plus… On voit vraiment une différence. L’hiver, on reçoit plus d’appels la journée, alors que l’été, ce sera la nuit.

Après la diffusion, vous ne craignez pas d’être reconnue dans la rue ?

Je joue dans une troupe de théâtre, donc je n’ai pas la crainte d’être repérée par les gens. Ma crainte a plutôt été au niveau de la sécurité. Là, par contre, je me suis posée des questions. On a parfois des menaces des appelants… Je me suis renseignée auprès des collègues de Liège pour savoir s’il y avait eu des menaces ou du harcèlement, l’an dernier. Et ils nous ont rassurés. Et puis, ça ne va durer que quelques semaines…

Pas de regrets d’avoir changé d’orientation ?

Non. C’est un métier qui n’est pas évident, et même fatigant, mais c’est un chouette métier !

On peut faire toute une carrière à ce rythme-là ?

J’arrive doucement au bout, je le reconnais. J’ai entrepris de reprendre des études en parallèle, pour, au cas où, préparer ma sortie… Mais j’ai des collègues qui sont là depuis très longtemps, qui sont très contents, et ils ne comptent pas partir.

Entretien : Pierre Bertinchamps

Découvrez la bande-annonce de l’émission :

Vous êtes blasée ?

Oui, on peut dire ça… Après six ans, c’est le cas. Il y a des choses qui deviennent presque banales pour nous. Mais attention, ce qui est «banal» pour nous, ne l’est pas pour l’appelant. C’est aussi la difficulté. On ne peut pas gérer les choses comme si ce n’était rien.

Des situations vous touchent plus que d’autres ?

Oui, mais je ne sais pas vous donner une situation type. J’ai des collègues qui sont très touchés par tout ce qui a trait aux enfants, par exemple. Ce n’est pas mon cas. Chez moi, c’est parfois le ton de la voix et les arrière-plans. Nous avons une imagination débordante, et on n’a que les bruits. Les secours sur place, ils voient des choses horribles, mais ils voient. Nous, on a parfois juste des cris, et on ne peut qu’imaginer. C’est ça qui est difficile. D’autant qu’on n’a jamais la fin de l’histoire…

Il y a des choses qui se terminent bien…

Oui, parfois des gens rappellent. J’ai fait l’objet d’une menace d’un appelant qui, par la suite, a rappelé pour s’excuser. Parfois, on a des retours de la zone de police. A contrario, au nombre d’appels que l’on reçoit sur une pause de 12 heures, si on doit s’attarder sur chaque histoire, on n’en sort plus.

Vous êtes formée pour gérer tous les types d’appels ?

Oui, on ne peut pas, du jour au lendemain, prendre un poste de calltaker et gérer un appel. Il y a une formation à l’académie de police (pour le 101), et une formation en interne où les nouveaux sont en doublure. D’abord passif, et ensuite ils répondent, mais toujours avec quelqu’un à coté en soutien. Dans mon cas, mon tout premier appel était un suicide, et quand mon collègue l’a su, il m’a poussé et il a repris le téléphone. C’est une garantie aussi quand on risque de lâcher prise, surtout quand on commence. Ça arrive encore aujourd’hui. Entre collègues, on peut reprendre un appel si on a du mal à gérer émotionnellement. Nous sommes une équipe.

Dans l’émission, on dit qu’il y a plus d’appels l’été. Pourquoi ?

Il y a les barbecues, le tapage nocturne et la chaleur. Il y aussi plus de bagarres dues à l’alcool. Comme il fait chaud, on consomme plus… On voit vraiment une différence. L’hiver, on reçoit plus d’appels la journée, alors que l’été, ce sera la nuit.

Après la diffusion, vous ne craignez pas d’être reconnue dans la rue ?

Je joue dans une troupe de théâtre, donc je n’ai pas la crainte d’être repérée par les gens. Ma crainte a plutôt été au niveau de la sécurité. Là, par contre, je me suis posée des questions. On a parfois des menaces des appelants… Je me suis renseignée auprès des collègues de Liège pour savoir s’il y avait eu des menaces ou du harcèlement, l’an dernier. Et ils nous ont rassurés. Et puis, ça ne va durer que quelques semaines…

Pas de regrets d’avoir changé d’orientation ?

Non. C’est un métier qui n’est pas évident, et même fatigant, mais c’est un chouette métier !

On peut faire toute une carrière à ce rythme-là ?

J’arrive doucement au bout, je le reconnais. J’ai entrepris de reprendre des études en parallèle, pour, au cas où, préparer ma sortie… Mais j’ai des collègues qui sont là depuis très longtemps, qui sont très contents, et ils ne comptent pas partir.

Entretien : Pierre Bertinchamps

Découvrez la bande-annonce de l’émission :

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