Que sont devenus les écoliers du 11 septembre ?
Vingt ans après, on a retrouvé les enfants de la classe où se trouvait George W. Bush lorsqu’il a appris les attentats de New York.
C’est une image dont on se souvient tous. Le 11 septembre 2001, alors que deux avions percutent les tours jumelles de New York, le président américain, George W. Bush est en visite dans une classe. Tout à coup, un homme vient lui chuchoter quelques mots à l’oreille…
Vingt ans plus tard, une réalisatrice canadienne a eu l’idée de retrouver les enfants de cette classe. Elle en a fait un très beau documentaire, à découvrir mardi sur Tipik (20.05) et sur Arte (20.50).
Un sniper sur le toit
Que faisiez-vous le 11 septembre 2001, quand vous avez appris les attentats de New York ? Natalia, Megan, Dinasty, La’Damian, Lazaro… ne sont pas près de l’oublier. À l’époque, ils sont élèves de 2e primaire dans une école de Sarasota, en Floride. La plupart sont noirs, proviennent de quartiers défavorisés et n’ont jamais ouvert un livre avant d’être scolarisés. Mais leur institutrice, Miss Kay Daniels, a mis au point une méthode d’apprentissage de la lecture très efficace.
Sa classe a donc été choisie par la Maison Blanche pour lancer une campagne de promotion de la lecture en présence du Président. L’instit n’en revient pas. Ses élèves encore moins ! Stevenson se souvient d’un sniper posté sur le toit de l’école, Dinasty des limousines, Natalia des paparazzi…
Le regard hagard
George W. Bush entre dans la classe, serre la main de Natalia, puis s’assied devant une ardoise où est inscrit le slogan du projet : «Reading makes a country great» («la lecture rend un pays grand»). Les enfants commencent par lire des mots au tableau. Le Président les félicite et plaisante avec malice. Ils entament ensuite la lecture d’un livre. À ce moment, un conseiller du Président s’approche à pas feutrés, mais décidés, pour lui murmurer à l’oreille.
Le visage de Bush se fige pour ne pas se décomposer. Il se mord les lèvres, le regard hagard. «J’ai compris qu’il se passait quelque chose», se souvient Miss Daniels. «Fallait voir sa tête !», raconte Natalia. «Tyler m’a dit qu’il avait peut-être envie de faire pipi…» À peine la lecture terminée, un journaliste interpelle le Président depuis le fond de la classe : «Êtes-vous au courant du crash à New York ?».
Des larmes et du gospel
George W. Bush prend la parole. Il était prévu qu’il évoque les bienfaits de la lecture, mais le discours a été réécrit en urgence : «Nous vivons une tragédie nationale…» Les enfants sont bouche bée. Ils ne comprennent pas tout, mais savent que l’heure est grave. Le Président quitte précipitamment les lieux, les journalistes à sa suite.
Et après ? L’institutrice a éclaté en sanglots, puis elle a chanté du gospel à ses élèves pour les réconforter. Une chanson qui disait : «Ça ira mieux demain. Tenez bon !».
Que sont-ils devenus ?
Vingt ans après, que sont devenus ces enfants doués en lecture censés bâtir la grande Amérique du futur ? Natalia est maman célibataire de deux jeunes enfants. Elle a ouvert une garderie et boucle ses fins de mois avec de petits boulots chez McDo. Alors que son frère est en prison, elle trouve du réconfort dans la religion. La’Damian a été tant marqué par le 11 septembre qu’il a voulu servir son pays et s’est engagé dans l’armée. Fils d’émigrés cubano-mexicains, Lazaro est ingénieur. Il a racheté la maison que ses parents avaient hypothéquée pour payer ses études. Victime de violences conjugales, Megan est en chaise roulante. Dinasty s’est battue pour sortir de son milieu : elle est devenue une brillante femme d’affaires. Tyler, lui, entame son second séjour en prison… Et Miss Daniels leur dit toujours : «Tenez bon !».
Cet article est paru dans le Télépro du 2/9/2021
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