Pierre Rapsat, en do majeur

Pierre Rapsat est voué à l’éternité grâce à une voix, des sons, des paroles qui lui survivent vingt après sa disparition © Viva Disc

Il y a vingt ans, Pierre Rapsat disparaissait bien trop tôt. Retour sur le parcours d’un artiste qui avait pourtant la rage de vivre et de chanter.

La famille de sa mère avait fui l’Espagne franquiste et ses massacres, son père était flamand, mais c’est à Verviers, dans la province de Liège, que le chanteur Pierre Rapsat a vécu, depuis l’âge de 10 ans, jusqu’à sa mort prématurée, à 53 ans. Mardi, La Trois lui rend hommage.

Et vogue la galère

Ses débuts musicaux sont loin d’être un long fleuve tranquille. Certes, il tente bien de s’affirmer au sein de différents groupes comme Les Tricheurs, Les Ducs, Laurélie ou, sans doute le plus connu, Jenghiz Khan, mais sans beaucoup de succès. Il décide alors de se lancer dans une carrière solo. De toute évidence, il a tous les atouts pour réussir, en trouvant une forme originale alliant le rock anglo-saxon et la chanson française. Malgré son talent, le public n’accroche pas. Pierre Rapsat s’obstine avec ce caractère fort et combatif qu’il a hérité de ses parents. Il signe album sur album, retravaillant sans cesse ses textes et les arrangements musicaux.

«Lâchez les fauves»

En 1976, la RTB le choisit pour représenter l a Belgique au concours de l’Eurovision où il obtient une honorable huitième place avec «Judy & Cie», titre-phare de l’album éponyme. En 1982, «Lâchez les fauves» est un tournant. L’album s’écoule à 30.000 exemplaires en Belgique. L’artiste se dépense alors sans compter sur toutes les scènes, petites et grandes, et même sur celles de France et de Navarre où il se produit devant un auditoire parfois clairsemé. Jusqu’au jour où il triomphe enfin à Bordeaux.

Enfin !

Les tubes s’enchaînent aussi dans sa discographie, qui s’enrichit avec «Ligne claire» (1984) et «J’aime ça» (1986). Les tournées sont triomphales, notamment au Canada. Malheureusement, la distribution de ses disques y est chaotique, laissant présager une réussite sans véritable lendemain.

En 1986, Pierre Rapsat se produit enfin à Forest National. On croit alors l’artiste belge au firmament de sa carrière, mais elle continue à connaître des hauts et des bas, jusqu’à la sortie de l’album «Dazibao» (2001), qui le consacre à la fois en Belgique et en France, où cartonne également le chanteur Curt Close, dont Rapsat a cosigné plusieurs morceaux. Mais l’auteur-interprète se sait déjà condamné par l’inexorable cancer qui l’emporte le 20 avril 2002. En son honneur et celui de Sylvain Lelièvre, un autre chanteur disparu à quelques jours d’intervalle, le Prix Québec/Wallonie-Bruxelles est rebaptisé Prix Rapsat-Lelièvre, tandis qu’en 2007, à titre posthume, il reçoit un Octave d’honneur dans le cadre des Octaves de la musique.

«Tous les rêves, tous nos rêves», cela aurait été d’être encore «Ensemble», avec Pierre Rapsat. Mais il nous reste de lui, plus que des «Illusions», cet «Enfant du 92e».

Cet article d’Hervé Gérard est paru dans le Télépro du 14/04/2022.

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