«Le Doc « Stupéfiant »» de ce mercredi soir s’intéresse à la figure du Christ, à la manière dont les artistes s’en sont emparés au fil des siècles. Jésus est-il devenu une superstar ? C’est la question qu’a choisi de poser Léa Salamé en ce soir de Noël, événement qui commémore la naissance – s’il faut le rappeler – de la figure la plus représentée de l’art occidental.
À quoi ressemblait Jésus ? Était-il petit ou grand ? Mince ou gros ? Personne ne le sait puisque les Évangiles ne donnent aucune description physique du Christ. Depuis vingt siècles, chacun peut donc le représenter selon son imagination. Ou presque…
C’est à Rome, dans les catacombes de Domitilla, qu’ont été retrouvées en 2017 les plus anciennes images de Jésus. Elles datent probablement du IVe siècle. On y voit un homme imberbe aux cheveux courts, inspiré de la figure païenne d’Apollon. Il faut attendre le VIIIe siècle pour que Jésus devienne barbu.
À l’époque, une querelle oppose iconoclastes et iconodoules. Les premiers refusent toute représentation de Dieu, craignant l’idolâtrie, les seconds sont persuadés qu’on a besoin d’images comme support de la foi. Le concile de Nicée tranche la question en 787 : il est permis de représenter le Seigneur, mais selon certaines règles. Ainsi apparaissent ces images du Christ que l’on connaît encore grâce aux icônes : barbu, chevelu, de face, le regard fixe et auréolé. Cette représentation désincarnée fera référence durant des siècles. Jusqu’à la Renaissance. Les peintres osent alors s’affranchir des images codifiées et des préceptes de l’Église. Surtout, ils veulent mettre l’Homme au centre de l’univers.
Au fil des siècles et des artistes, de Véronèse à Rembrandt, le Christ peut être triomphant ou souffrant, mais il a un regard expressif, un corps qui frémit, des mains, des muscles… Voire un sexe, comme le Christ nu peint par Michel-Ange dans la chapelle Sixtine, que le pape s’empressera de faire rhabiller par de pudiques drapés. Bref, le Christ s’est fait homme (aussi) dans la peinture. Le phénomène semble s’estomper à l’ère moderne : Renoir ou Magritte ne consacrent plus leur carrière à la figure du Christ. D’autres artistes prennent alors le relais, mais dans d’autres conditions. Ils ne se réclament pas de la religion, ils s’intéressent au Christ comme porte-parole des minorités opprimées : les Noirs, les femmes, les gays… Shocking !
Aujourd’hui, l’image du Christ est souvent utilisée sur le mode transgressif…
Extrait d’un article paru dans le magazine Télépro du 19/12/2019