«Face au juge» (RTL-TVI) : effet télé ou réalité ?
Les intervenants du magazine de Julie Denayer, qui arpente les palais de justice du pays, semblent de plus en plus jouer avec la caméra.
Ce dimanche 7 janvier, «Face au juge» revient à 19h45 pour une nouvelle saison inédite sur RTL-TVI. Les premiers intervenants donnent franchement l’impression de jouer avec la caméra et font de l’esclandre «pour faire le buzz».
«Pour moi, ils sont exactement les mêmes, avec ou sans caméra», explique Sophie Morel, Substitute du Procureur du Roi de Bruxelles. «Avec certaines personnes, je vois, au fil des comparutions, qu’ils essaient de nous amadouer.»
Avec ou sans caméra
Dans cet épisode, on a affaire à un artiste de raï qui fait un peu de show. «Mais une fois qu’il se retrouve devant le juge Hennard, au tribunal, on voit son vrai visage, avec de la provocation et de l’arrogance. La présence de caméras ne changerait rien». La personne en question est récidiviste pour violence intrafamiliale. «C’est un profil-type d’auteur de ce genre de faits. Ils essaient d’être dans la manipulation de la victime, de l’entourage, et de la Justice», ajoute-t-elle.
Parfois les réponses données aux magistrats sont assez irréalistes… «On a ça, sans caméras, tous les jours. C’est le propre des auteurs pour nier des faits. Même quand on leur montre des photos.», surenchérit la Substitute. Ce genre de réponses dignes de la science-fiction ne fonctionne pas. «Mais c’est de bonne guerre, surtout si le doute subsiste», conclut-elle.
Un monde à part
«La législation permet à n’importe qui de se défendre et dire ce qu’il souhaite. Après, il ne faut pas être dupe. Et en l’espèce, il risque une peine lourde», détaille, Olivier Mallinus, également Substitut à Bruxelles. La Justice est humaine, et le prévenu sait aussi que s’il sème le doute, la peine peut être différente, il joue aussi sur ça. «La personne joue sa carte, et souvent elle perd.»
Les cas présentés dans «Face au juge» ne sont pas exceptionnels, précise-t-on encore du côté de la justice bruxelloise. «Je reconnais que c’est une plongée dans le côté sombre de l’humain», admet Olivier Mallinus. «Nous sommes confrontés à un public qui ne sont pas les gens que vous et moi nous côtoyons habituellement. Et parfois, on a des réponses où on se demande si la personne devant nous va réellement se défendre avec ça.» Et cette tendance qui prend de l’ampleur avec les années.
«Peut-être que certaines personnes vont avoir tendance de se jouer de la caméra», confie Julie Denayer, journaliste et présentatrice du programme. «Mais c’est un pourcentage vraiment minime. Et de toute façon, on ne voit pas tout ce qui passe devant le tribunal. Quelqu’un qui veut profiter de la télévision pour se faire une célébrité à son procès, je ne vais pas forcément le garder. Ça ne m’intéresse pas.»
Un an de préparation
Pour la petite histoire, «Face au juge» passe sur W9, et en France, le public pensait que l’émission était faite avec des comédiens. «Tellement on voit des choses incroyables, on a l’impression que c’est irréel, et c’est ça le côté intéressant de « Face au juge », c’est juste un reflet de notre société.»
Les affaires ne sont pas choisies à l’avance par le production. «J’arrive le matin, et je ne sais pas du tout à quoi je vais assister», explique la journaliste. «On s’installe, et on voit ce qui arrive. Je ne sais jamais comment va se dérouler une journée de tournage.»
Il y a d’ailleurs beaucoup de refus des prévenus de passer devant les caméras. «Une ou deux personnes seulement acceptent sur dix». Et parfois, Julie Denayer repart avec aucune image au bout de sa journée. Une saison de «Face au juge» prend un an de préparation.
Pierre Bertinchamps
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