Eurovision : des stars, mais peu d’étoiles !

Des grands noms de la chanson ont tenté le Concours Eurovision, souvent sans véritable succès.

Pour cette 65e édition du Concours Eurovision de la chanson, qui débute mardi soir à Rotterdam, la Belgique (sous la houlette de la VRT) a choisi d’envoyer un groupe connu et reconnu : Hooverphonic. La formation flamande avait été approchée plusieurs fois par la chaîne publique, mais n’a cédé aux sirènes de l’Eurovision que pour l’édition 2020, annulée par la pandémie.

Même si notre pays affiche 62 participations depuis 1956, on compte sur les doigts d’une main les artistes confirmés à l’étranger ou les grandes stars du royaume qui s’y sont collés. Coup d’œil dans le scopitone de l’Eurovision.

La vraie fausse bonne idée ?

Proposer une star internationale au Concours Eurovision, tous les pays en rêvent. Surtout avec le télévoting. Pas de doutes que si Stromae représentait la Belgique, les «douze points» pleuvraient. Vraiment ? «Je ne sais pas s’il aurait envie de participer», sourit Leslie Cable, productrice de l’Eurovision et cheffe de délégation pour la RTBF. «Que Hooverphonic accepte de faire l’Eurovision, je trouve ça super !»

Pourtant, dans bon nombre de cas, les grandes stars ne performent pas à l’Eurovision. «Les ingrédients pour accéder à la finale et terminer dans les premiers, c’est avoir un bon artiste et une bonne chanson. Si la maison de disques vous suit, c’est un plus, et il faut aussi que la communication tienne la route. Quand des artistes comme Patricia Kaas ou Bonnie Tyler vont à l’Eurovision, la communication est très forte autour d’elles. Mais c’est à double tranchant parce qu’on attend tellement de leur passage, que si la chanson n’est « que » bonne sans être extraordinaire, le public est un peu déçu», conclut-elle. Et cela a souvent été le cas.

Total Eclipse of the Point

En 2013, Bonnie Tyler crée la surprise en acceptant de représenter le Royaume-Uni avec «Believe in Me», un titre très country enregistré à Nashville pour son album «Rocks & Honey». Un choix interne de la BBC après l’écoute de l’album avant sa sortie. Tyler terminera 19e en finale. Loin derrière une autre star, Anouk (connue pour le tube «Nobody’s Wife» en 1997), qui se classera 9e pour les Pays-Bas.

La France aura souvent envoyé des artistes déjà confirmés en francophonie et au-delà. En 2009, la Russie organise le Concours et France 3 saute sur l’occasion pour proposer une star française qui cartonne là-bas : Patricia Kaas. Avec «S’il fallait le faire», un titre extrait de l’album «Kabaret» qui n’était pas calibré pour Eurovision. Le public n’octroie que la 8e place à la chanteuse de Forbach, qui en est encore furax.

Trois ans plus tard, Anggun prendra une claque en terminant à la 22e place. Et en 2008, Sébastien Tellier sera victime des polémiques autour de son titre 100 % en anglais, «Divine», en France. Il devra revoir sa copie, mais la cote finale sera mauvaise : 18e sur 25. On épinglera aussi Gérard Lenorman qui, en 1988, tentera la séduction avec «Chanteur de charme». Mais l’histoire se termine plutôt en larmes : à la 10e place, loin derrière Lara Fabian et Céline Dion.

Tubes express

Même les artistes qui ont vendu des millions d’exemplaires le temps d’un été n’ont pas séduit, plus tard, à l’Eurovision. En 2007, la Suisse tente un gros coup en envoyant DJ BoBo, sa plus grande star de l’époque. Tout le monde connaissait son tube planétaire : «Chihuahua». Malgré un bon show autour de «Vampires Are Alive», le DJ ne sera pas qualifié pour la finale…

Même configuration pour Las Ketchup (Espagne) en 2006. Si le monde entier a dansé sur «Asarejé» (12 millions de copies vendues !) durant l’été 2002, «Bloody Mary» n’a pas convaincu à Athènes, et se classe à la 21e place. Le groupe ne s’en remettra pas et sera dissout l’année suivante.

Un autre groupe qui a eu un succès fulgurant : t.A.T.u. Le duo russe avait déferlé sur l’Europe avec quelques succès au tout début des années 2000. À Riga, en 2003, Julia Volkova et Lena Katina, reines de la provocation, font la compétition pour gagner, et malgré le bisou «interdit» entre les deux jeunes femmes, «Ne Ver’, Ne Boysia» (en russe) terminera à la 3e place, juste derrière un certain groupe belge : Urban Trad !

Des Belges pas au top

Des artistes belges confirmés, il y en a eu aussi. En 1990, un an après «Cœur de Loup» qui a cartonné à l’étranger, Philippe Lafontaine proposera à Zagreb, «Macédomienne». Une ballade, dont le Bruxellois a le secret, qui est une ode à son épouse. Les jurys – bien moins romantiques – le classe 12e .

À Bruxelles, en 1987, Plastic Bertrand se déchaîne sur «Amour amour» pour le Luxembourg. L’artiste disco n’y allait pas pour gagner, mais se faire (re)connaître à l’international… Bonne pioche, il finira à la 21e position ! Cette année-là, c’est Umberto Tozzi qui signe une de ses plus belles chansons (en duo avec Raf), «Gente di mare». Et le podium à la 3e marche pour l’Italie.

Dans les années 1970, les Anglais avaient déjà tenté des gros coups avec le groupe rock The Shadows, qui termina 2e , en 1975, grâce à «Let Me Be the One» ; ou à plusieurs reprises Cliff Richard, qui sera le Poulidor de l’Eurovision avec une 3e place en 1973 et la Médaille d’Argent en 1968.

Cet article est paru dans le Télépro du 13/5/2021