Enfants de stars, victimes de la mode

Kaia Gerber, 20 ans, fille de Cindy Crawford et de l’homme d’affaires Rande Gerber, a entamé sa carrière à 16 ans © Isopix

Les enfants de stars sont une aubaine pour les marques de haute couture…

Sistine, Sophia et Scarlet Stallone (filles de Sylvester), Patrick Schwarzenegger (fils d’Arnold et Maria Shriver), Paris Jackson (fille de Michael), Kaia et Presley Gerber (enfants de Cindy Crawford), Simone Garcia Johnson (fille de Dwayne, The Rock), Iris et Rafferty Law (enfants de Jude), Willow Smith (fille de Will et Jada Pinkett Smith) ou Paris et Dylan Brosnan (fils de Pierce) : les «filles et fils de» stars passés top models sont légion. Pourquoi l’industrie de la mode a-t-elle jeté son dévolu sur ces «héritiers» ?

Des noms rassurants

Jusque dans les années 1990, les mannequins stars n’avaient pas de lien de parenté avec des figures du show-biz. Avec le nouveau millénaire, la donne change. Les réseaux sociaux et la liberté prise par les stars de dévoiler elles-mêmes leurs nouveau-nés et leur vie de famille auraient été les facteurs de ce changement. «Aux États-Unis, les marques ont utilisé la ressemblance des enfants avec leurs illustres parents, leur notoriété par procuration et leurs noms déjà familiers, donc rassurants, pour le public», constate Ivan Bart, président de l’agence de mannequins IMG Models.

Créer des dynasties

Les grandes maisons de luxe ont compté aussi sur ce besoin des Américains de se «créer» des aristocraties semblables à celles qu’ils envient à l’Europe. «La combinaison de la beauté et de l’ascension sociale est irrésistible !», explique Kohle Yohannan, auteur de «Model as Muse». «Ces dynasties comblent leurs fantasmes. Car malgré leurs origines révolutionnaires, les États-Uniens aiment la royauté. Il suffit de voir leur obsession pour la monarchie britannique. Dès que la duchesse de Cambridge, Kate Middleton, porte un nouveau vêtement, ils veulent le même !» À défaut d’avoir d’authentiques familles à blason, ils se choisissent donc de riches lignées dans le show-biz. Ainsi, lorsque Suri, fille de Tom Cruise et Katie Holmes, apparaît pour la première fois à la Une de Vanity Fair en 2006, les ventes grimpent de 60 % !

Dur, dur d’être héritiers

Ce qui n’empêche pas le public d’être très critique à l’égard de ces jeunes, qui feront rêver les consommateurs de demain ! «La foule regarde leurs débuts avec intérêt», souligne Ivan Bart. «Elle veut la preuve qu’ils possèdent du charisme, mais aussi la «star quality» de leurs parents. Quand ils ont ce petit plus, c’est bingo !» Les marques de vêtements choisissent donc ces top models juniors pour leurs gènes, mais aussi pour ce qu’ils ont eux-mêmes dans le ventre. Selon Zoe Hennessey, styliste à Los Angeles, «les enfants de célébrités doivent être plus visibles que leurs aînés. Et donc être plus créatifs, repousser leurs limites, proposer du neuf ! Or, la génération Z est déterminée à faire la différence. C’est ce qui plaît aux marques de mode et de cosmétiques !»

Transgressions

Lila Moss, fille de Kate Moss, et ses jeunes congénères ont capté le message. «Des filles comme Kaia Gerber, Gigi et Bella Hadid sont de bons exemples», indiquait Lila dans InStyle. «Comme moi, elles s’inspirent de leur mère, mais prennent des chemins différents. Il nous faut, nous aussi, gagner la confiance et le respect de l’industrie !» Et s’affirmer, c’est sortir des clous. Lourdes Léon, digne fille de Madonna, est aussi transgressive que cette dernière. L’égérie de Marc Jacobs s’est montrée aisselles et jambes non rasées dépassant d’une mini robe lors du Vogue Fashion Fund de 2018 !

Jaden et Willow Smith, fils et fille de Will et Jada Pinkett Smith, imposent, eux aussi, leurs codes. À l’issue d’un débat houleux sur l’habillement genré, Jaden, frondeur, a tweeté : «Si je veux porter une jupe, je le ferai, et cela définira une nouvelle mode !» Pour Zoe Hennessey, «leur éducation leur a permis d’asseoir leur identité unique. Ni le frère ni la sœur n’ont peur d’être provocants !»

En toute harmonie

D’autres enfants de stars célèbrent une harmonieuse continuité. Lily-Rose Depp , dont la maman, Vanessa Paradis, a été une égérie de Chanel, apprécie de suivre le même chemin. Ambassadrice de la marque depuis 2015, elle confie au Vogue britannique : «J’avais 8 ans, ma mère faisait un essayage et m’a fait monter à l’atelier. Je rêvais de ce métier et Karl Lagerfeld a réalisé mes rêves. Chanel est comme une famille. Je connais toute l’équipe. Travailler avec elle est une grande fierté.»

C’est aussi un bonheur de graver des souvenirs sur pellicule pour Charlotte Gainsbourg et sa fille Alice Attal qui ont posé pour des campagnes «générationnelles» du Comptoir des Cotonniers. L’aisance d’Alice devant l’objectif a rassuré sa mère, comme elle l’a relaté à Madame Figaro : «J’étais heureuse de faire cela avec ma fille. Pourtant, j’ai longtemps été contre. Après le divorce de mes parents, des paparazzis étaient devant chez nous en permanence. Je me suis dit que ma vie privée était à préserver coûte que coûte. (…) Alice, elle, avait envie de poser. On en a parlé. C’est en quelque sorte son premier boulot, et j’ai été fière de l’accompagner. Moi, je subissais les photos, c’était terrible. Ma fille, elle, est très tranquille, à l’opposé de moi, elle semble n’avoir aucune inquiétude !»

Une autre philosophie

Les «enfants de» mannequins sont loin d’être naïfs. Ils semblent aussi vouloir tirer parti de leur célébrité pour transmettre des messages pleins de bon sens. Iris Law, fille des acteurs Jude Law et Sadie Frost, filleule de Kate Moss, communique son enthousiasme à ses followers. «J’espère être un modèle positif pour les femmes», confie-t-elle à l’Officiel. «Sur les réseaux sociaux, je pratique la gratitude, je ne m’attarde pas trop aux apparences, car cela ne devrait pas être la chose la plus importante dans l’existence. J’essaie de me concentrer davantage sur ce que je fais dans ma vie ou pour les autres.»

Sauver le monde

Les fils de l’acteur Pierce Brosnan (ex-007), Paris et Dylan, n’entretiennent pas que la «bogossitude» sur les catwalks. «Grâce au mannequinat, je porte certains des plus beaux vêtements et bijoux de créateurs», reconnaît Paris. «Mais ce job me permet aussi de rencontrer des gens formidables, de voyager.» Ainsi, avec son frère aîné Dylan, il a participé, en 2019, à l’événement «RePlant Love» qui invite des bénévoles à planter plus de 3.000 arbres au Paramount Ranch, dévasté après un terrible incendie, conséquence du réchauffement climatique. «J’ai l’occasion de travailler avec des gens de l’industrie de la mode qui veulent sensibiliser à une myriade de problèmes, de la prévention de la famine à la sauvegarde de l’environnement, en passant par la défense des droits de l’homme. C’est gratifiant !» Voilà de quoi tailler un costume à ceux qui ne voient dans les jeunes top models que des coquilles prétentieuses et vides.

Cet article est paru dans le Télépro du 6/01/2022.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici