Encore plus de publicités sur la RTBF ? Le patron de la chaîne répond

Encore plus de publicités sur la RTBF ? Le patron de la chaîne répond
Julien Vandevenne
Julien Vandevenne Rédacteur en chef adjoint

L’administrateur général de la RTBF a plaidé mardi pour un statu quo en matière de diffusion de publicités sur les ondes de la RTBF durant les cinq années à venir.

« Nous ne souhaitons discuter ni à la hausse ni à la baisse le cadre publicitaire actuel », a indiqué Jean-Paul Philippot lors d’une nouvelle audition devant le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui planche sur le prochain contrat de gestion quinquennal de la RTBF.

Réduire ce volume, comme certains opérateurs ou représentants de la société civile l’ont suggéré lors d’auditions menées ces derniers mois par ce même parlement, ne permettra plus à la RTBF de mener pleinement ses missions, soutenir la création et préserver l’emploi, a-t-il averti.

RTL-TVI accusée d’évasion fiscale

Devant les députés, M. Philippot a rappelé que les recettes publicitaires en télévision à la RTBF avaient baissé de 19% en dix ans hors inflation, ce qui a été compensé par des plans d’économies et une compression du personnel.

Le patron de la Cité Reyers a aussi fermement démenti mardi que la RTBF brade d’une quelconque manière ses espaces publicitaires, comme certains concurrents l’affirment. « Ce n’est pas dans l’intérêt de la RTBF, dont le volume publicitaire est limité, de brader (les prix). Nous occupons une position minoritaire. Ce n’est donc pas nous qui faisons ce marché ».

Visiblement agacé par ces attaques, M. Philippot a décoché une flèche en direction de RTL qui, selon lui, facture au Luxembourg ses écrans publicitaires belges, ce qui lui permet une optimisation fiscale de l’ordre de 4 à 5 millions d’euros.

Pas de licenciements en vue

Quant à l’impact de l’arrivée de TF1 sur le marché publicitaire belge, celui-ci entraînera une perte de recettes estimée à 5 millions d’euros pour la RTBF en 2018, un montant qui ne sera pas compensé par la Fédération.

Ce manque à gagner représente l’emploi de 50 équivalents temps-plein, selon M. Philippot. Mais la RTBF n’a toutefois pas l’intention de licencier ou de revoir à la baisse ses productions pour autant l’an prochain, a-t-il assuré. Cette baisse de ressources sera absorbée par un gain d’efficacité, un meilleur partage de ses contenus et la monétisation de ceux-ci sur les plateformes numériques. « L’équation est compliquée. Les années qui viennent ne seront pas simples… ».

Durant près de quatre heures d’échanges, les députés sont également revenus sur les critiques formulées par les éditeurs de presse francophones qui, au printemps dernier, avaient reproché à l’opérateur public de diffuser gratuitement sur internet trop d’informations écrites, compromettant ainsi leur mutation vers un modèle économique de presse numérique payante. À cet égard, le patron de la RTBF a rejeté la demande des éditeurs de limiter les articles d’info sur le site de la RTBF à 400 signes seulement.

Ouverture à la société civile ?

Pour M. Philippot, un compromis acceptable pourrait tourner autour de 1.500 à 2.000 signes. Celui-ci a réitéré sa volonté de parvenir à une « relation apaisée » avec les éditeurs de presse écrite qui, selon lui, se trompent d’ennemi à l’heure ou Facebook et Google occupent une position de plus en plus dominante. « Nous avons perdu une énergie hallucinante et un temps infini à se tromper d’adversaires. Il n’y aura pas un pour cent de prospérité en plus pour un acteur de la chaîne (médiatique belge) si un autre acteur de cette chaîne s’arrête de travailler ou disparaît ».

La RTBF, a assuré son patron, est désireuse de parvenir à des collaborations avec la presse écrite, sur le plan éditorial, ou en termes de référencement réciproque sur leurs sites respectifs.

En matière de gouvernance, sujet évoqué par les syndicats mais aussi l’association « La RTBF nous appartient » lors de leur audition respective, le président du conseil d’administration Jean-François Raskin ne s’est pas dit opposé à l’ouverture de l’organe à des administrateurs indépendants. Il a toutefois fermement défendu le travail réalisé aujourd’hui par les 13 administrateurs, tous désignés par les états-majors politiques. « Je refuse que ces administrateurs soient considérés comme des hommes et femmes liges inféodés aux partis politiques. Nonante-neuf pour cent des décisions sont prises à l’unanimité. Il n’y a donc pas de logique partisane au sein du conseil d’administration! », a-t-il martelé.

Des recommandations attendues fin 2017

Quant aux rémunérations (prétendument élevées) de certains directeurs de la Cité Reyers, M. Raskin a annoncé mardi que le comité de rémunération de l’entreprise avait décidé ce lundi qu’aucun directeur ne pourrait plus recevoir à l’avenir d’émoluments supérieurs à ceux touchés par l’administrateur général (soit entre 295.000 et 330.000 euros).

La RTBF n’est pas opposée à d’éventuelles règles plus strictes décidées par le législateur. « Nous appliquerons les règles qui s’imposeront à nous », a dit M. Philippot, mettant toutefois en garde contre des mesures qui ne permettraient plus à la RTBF d’attirer les talents dont elle a besoin dans un monde médiatique en pleine mutation où les spécialistes ne sont pas nombreux.

L’audition de MM. Philippot et Raskin mardi clôturent en théorie près de six mois d’auditions menées par le Parlement de la Fédération. Celles-ci avaient dû être interrompues un temps en raison de la crise politique francophone cet été.

Les députés vont à présent rédiger leurs recommandations pour le prochain contrat de gestion. Celles-ci sont attendues d’ici la fin de l’année, voire le début de la prochaine. Il appartiendra ensuite au gouvernement de la Fédération de rédiger et d’adopter le futur contrat de gestion, au printemps prochain vraisemblablement.

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