Élisabeth Quin («28 minutes» sur Arte) : «Je ne cherche pas l’audience»

Élisabeth Quin © Arte/Pierre-Emmanuel Rastoin
Nicole Real Journaliste

Depuis le mardi 11 avril, Arte a réaménagé son avant-soirée en proposant le «19-21», une tranche horaire de deux heures composée de cinq rendez-vous d’information, de magazine et de reportages.

Le journaliste Jean-Mathieu Pernin fait le lien entre «Regards», «Le Dessous des images», «Arte journal», «28 minutes» et «Le Dessous des cartes – L’essentiel». Élisabeth Quin (60 ans), à la tête de «28 minutes» depuis onze ans, nous en dit plus sur cette innovation.

Ce nouvel access prime time change-t-il le contenu de votre émission ?

Au niveau de la fabrication de l’émission, rien ne change, mais concernant la diffusion, cette intégration ne peut faire évoluer l’émission que de manière positive. Cette tranche 19-21 h, conçue dans la continuité, montrera la singularité de chaque module, mais aussi la complémentarité dans la façon dont Arte envisage l’offre informationnelle.

Pouvez-vous préciser cette offre ?

Elle se distingue par rapport aux images, aux cartes, à la géopolitique, mais aussi aux débats sur l’actualité française, européenne et internationale. Cette tranche horaire de deux heures souligne nos différences dans une parfaite complémentarité.

Pour élargir votre audience, envisagez-vous de faire évoluer «28 minutes» ?

Non car nous ne fabriquons pas l’émission, nous ne choisissons pas les sujets, nous n’invitons pas les personnalités, nous ne créons pas les débats dans le but d’élargir notre audience. Nous réfléchissons en fonction de la spécificité de l’émission. À travers les témoignages, nous souhaitons faire découvrir des personnalités qu’on ne voit pas ailleurs, aborder d’une autre façon les acteurs de la vie culturelle et offrir des débats soit autour de la politique, mais sans politicien, soit autour de la géopolitique ou l’économie avec des experts qui disposent de temps pour s’exprimer sans tomber dans une polarisation de leurs opinions. Ce concept est sûrement à l’origine de la longévité de l’émission.

Comment repérez-vous vos invités ?

Je suis entourée d’une équipe très solide composée de deux rédacteurs en chef dirigeant une quarantaine de personnes. Nous avons quatre programmatrices très complémentaires les unes par rapport aux autres. Certaines ont une approche axée sur la culture générale grand public, les autres se montrent plus pointues sur la philosophie, la politique ou l’économie. Nous sommes un collectif animé par une vraie volonté de ne pas être la voiture-balai des autres émissions. On se fait piquer des idées, des concepts, on s’est déjà fait piller, mais on s’en fiche car c’est la preuve de notre succès. Donc on continue.

Depuis la création de l’émission, quel est son changement le plus marquant ?

Sa durée. Nous avons démarré avec une émission de 28 minutes, d’où son titre. Mais ce timing ne nous permettait pas d’organiser des débats approfondis et son allongement a été un changement fondamental. L’émission telle qu’elle existe aujourd’hui, avec une première partie plus intime et une deuxième partie plus musclée et énergique sans être agressive, sous la forme d’un débat, et une troisième partie plus légère nous convient parfaitement.

Quelles sont les qualités requises pour devenir chroniqueur chez Élisabeth Quin ?

Il faut avoir l’œil qui frise, de l’humour et de la culture.

Pourquoi avez-vous laissé tomber votre brillante carrière de critique cinéma pour présenter «28 minutes» ?

Lorsque j’ai débuté sur le petit écran et à la radio, la télévision commençait à diffuser de moins en moins d’émissions de critique cinéma en tant que telle car elle entretenait une relation incestueuse avec les producteurs de films. Les chaînes n’acceptant plus de discours critique sur le 7e art, les perspectives de mon avenir dans ce domaine se réduisaient. La proposition de présenter «28 minutes», qui m’offrait l’opportunité d’élargir mes champs d’intérêt, est arrivée au bon moment. Ce timing a été parfait pour moi car, en réalité, les émissions de cinéma comme je les voulais et comme je l’entendais n’existent plus. Aujourd’hui, c’est devenu de la promo avec cirage de pompes des invités, ce qui ne m’intéresse pas !

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