Dracula : l’éternité, c’est long, surtout sur la faim…

Max Schreck incarne Nosferatu, dans le film de Friedrich Murnau, «Nosferatu le vampire» (1922). Blanc, froid... : c'est le premier d'une longue lignée... Mais celui-ci ne parle pas... © Isopix

Le personnage de Dracula n’en finit pas de nous effrayer. Pourtant, l’image du vampire a bien changé au fil du temps et des réalisateurs… Une étonnante destinée à découvrir ce dimanche sur France 5, dans le documentaire «Dracula, l’éternel».

Si l’on parle de vampire, à qui pensez-vous ? Dracula, bien sûr ! Les histoires de revenants existent depuis la nuit des temps, mais le personnage de Dracula est indéniablement le plus marquant. Il est né en 1897, sous la plume de l’écrivain britannique Bram Stoker (1847-1912). C’est lui qui a conçu le vampire tel que nous l’imaginons aujourd’hui : dents pointues, mains poilues, vêtu de noir et sans reflet dans le miroir, incarnant le mythe de l’immortalité. Depuis, Dracula a été adapté des centaines de fois. Au théâtre, au cinéma, en BD, en dessins animés, en séries télé, en jeux vidéo…

Du baiser à la morsure

Bram Stoker a tout juste 50 ans quand il publie son œuvre majeure : «Dracula». L’histoire d’un jeune clerc de notaire anglais, Jonathan Harker, envoyé régler une affaire immobilière avec le comte Dracula dans la lointaine Transylvanie. L’homme vit dans un mystérieux château et il s’avère rapidement qu’il a des pouvoirs terrifiants. Ce n’est pas un humain, mais un mort-vivant sanguinivore. Chez Dracula, le baiser se fait morsure. Il plante ses dents dans le cou de ses victimes et boit leur sang…

Succès limité

À l’époque de sa publication, le livre ne rencontre qu’un succès limité. C’est le cinéma qui va populariser le personnage de Dracula. La première adaptation date du muet, avec «Nosferatu le vampire» de Murnau, en 1922. Le réalisateur a modifié le nom des personnages et des lieux pour ne pas avoir à s’acquitter des droits d’auteur. La veuve de Stoker lui fera un procès au terme duquel Murnau sera condamné à détruire toutes les copies du film. Pour le bonheur des cinéphiles, quelques unes ont toutefois survécu.

Jack l’Éventreur

Au fil des nombreuses adaptations qui vont suivre, Dracula va toujours déchaîner les passions. Pourquoi ? Parce que l’histoire mêle habilement Éros et Thanatos – le désir et la mort. Et cela entre toujours en résonance avec l’époque. Au moment où Stoker écrit son roman, alors que l’Angleterre victorienne est corsetée dans la morale, Jack l’Éventreur assassine des prostituées à Londres. Certains ne manquent pas de faire le parallèle… Dans les années 1950, lorsque Dracula est incarné au cinéma par Christopher Lee, c’est la dimension érotique du personnage qui est mise en avant. Après la libération sexuelle, cette approche a moins d’intérêt pour le public. Ce n’est pas un hasard si en 1967, Polanski prend tout à coup le sujet à la rigolade avec son «Bal des vampires».

La déferlante «Twilight»

Le personnage du vampire en dit beaucoup sur l’époque. Au milieu des années 1970, l’écrivaine américaine Anne Rice publie «Entretien avec un vampire», qui sera adapté au cinéma avec Tom Cruise et Brad Pitt. Elle révolutionne le genre en s’attachant pour la première fois au point de vue du vampire, en en faisant davantage une victime qu’un prédateur. Dans les années 1980, le vampire devient une espèce de héros romantique. De nombreux jeunes adoptent alors un look teint pâle et cheveux noirs. Et dans les années 2000, c’est la déferlante «Twilight». Avec sa série de romans au succès planétaire, Stephenie Meyer impose le personnage du gentil vampire. Trop charmant pour être encore effrayant. Dans notre époque bien-pensante, il semble n’y avoir plus guère de place pour le diabolique Dracula. Mais les vampires sont immortels…

Cet article est paru dans le Télépro du 19/08/2021.

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