«Devoir d’enquête» (RTBF) sur les traces des bébés volés du Guatemala

Colin Fanon enfant, et aujourd'hui © DR

Adoptée par un couple belge dans les années 1980, Coline a été volée à sa famille au Guatemala. Et elle n’est pas la seule…

Coline a été adoptée au Guatemala en 1987. À l’époque, embourbé dans une interminable guérilla, ce petit pays d’Amérique centrale a envoyé 30.000 enfants à l’étranger. Des orphelins de guerre exfiltrés des zones de conflit pour être donnés à l’adoption internationale. Mais ça, c’est l’histoire officielle.

En 2017, quand Coline replonge dans les papiers de son adoption, elle comprend que ça cloche. Non, elle n’était pas orpheline. Ses parents sont en vie et n’ont jamais voulu l’abandonner. Coline a été victime d’un trafic de bébés. Une histoire poignante, à découvrir mercredi à 20h15 sur La Une, dans «Devoir d’enquête».

Au cœur de la filière

«J’ai repris contact avec ma famille via Facebook», explique Coline Fanon (33 ans). «Les réactions ont d’abord été très violentes : « C’est pas possible ! Tu es morte ! » Ma mère s’en souvenait comme si c’était hier. J’ai été séparée d’elle quelques heures après ma naissance. On m’a emmenée en pédiatrie, puis on lui a annoncé que j’étais décédée. Elle a demandé à récupérer le corps, mais ça n’a pas été possible.»

Coline a été volée à ses parents pour partir dans une filière d’adoption. Elle n’est pas la seule. Cinq mille enfants guatémaltèques ont disparu durant ces années noires. Dans les papiers de Coline, un nom interpelle : Ofelia de Gama. Elle a été le témoin de la maman biologique pour l’acte d’abandon (nécessairement faux), puis elle a reçu les parents belges de Coline pour leur remettre la petite fille.

Cette femme, que l’on retrouve dans de nombreux dossiers, est au cœur de la filière. Elle était aussi au cœur du pouvoir puisqu’elle était la belle-sœur du dictateur de l’époque. Ofelia de Gama «distribuait» des enfants dans plusieurs pays du monde. Notamment en Belgique, où elle était en contact avec l’association tournaisienne Hacer Puente, via laquelle Coline et une centaine d’autres petits Guatémaltèques ont été adoptés. Cette affaire est aujourd’hui à l’instruction auprès du Parquet fédéral.

Un combat risqué

Après avoir rencontré sa famille au Guatemala, Coline Fanon a créé l’association Racines Perdues. En moins de deux ans, elle a permis à une quinzaine d’autres adoptés guatémaltèques de retrouver leurs parents biologiques.

Coline interpelle aussi le monde politique, tant à Bruxelles qu’à La Haye. La chaîne américaine NBC News lui a même consacré un long reportage. «On avance bien», dit-elle. Mais elle sait que son combat n’est pas sans risques. Surtout lorsqu’elle retourne au Guatemala, où certains n’ont aucun intérêt à ce qu’elle déterre de vieux dossiers…

Cet article est paru dans le magazine Télépro du 2/1/2020

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