Charline Vanhoenacker : «La télé n’est pas le graal pour moi !»

Charline Vanhoenacker : «La télé n’est pas le graal pour moi !»
Julien Vandevenne
Julien Vandevenne Rédacteur en chef adjoint

Ce jeudi soir à 20h25, La Deux lance «Je vous demande de vous arrêter». Un talk-show entièrement dédié à la bêtise !

Conçue à l’origine pour France 4, cette émission est présentée par Charline Vanhoenacker, une journaliste belge qui se fait un nom depuis deux ans maintenant sur la radio France Inter.

Elle nous explique en quoi consiste ce nouveau rendez-vous, qui mérite quelques explications…

Quel est le concept de «Je vous demande de vous arrêter» ?

Deux prime times entièrement consacrés à la connerie organisée. Ce n’est pas un secret, mais la connerie est quelque chose de très sérieux, et qui demande parfois beaucoup de rigueur pour y arriver. J’ai même envie de dire qu’une belle connerie, ça se fait avec amour et originalité.

Pourquoi «organisée» ?

Parce que les gens s’y mettent souvent à plusieurs et de manière réfléchie pour y arriver. Par exemple, l’enseigne Zara qui avait commercialisé un pyjama pour enfant, rayé blanc et noir. Et pour donner un peu de gaieté au pyjama, ils avaient ajouté une étoile jaune… Ce qui a valu au vêtement d’être retiré de la vente au lieu de faire un carton dans les magasins. Pour en arriver là, il a fallu que des gens se réunissent autour d’une table, du styliste à l’équipe marketing, pour arriver à pondre une telle bourde… À aucun moment, lors du brainstorming, personne n’a levé la voix pour dire qu’il y avait un problème quelque part. C’est de ce genre de constat que l’on est parti. Des choses comme ça, il y en a partout que ce soit en politique ou dans le domaine sociétal. L’idée, c’est de dire que c’est grave, mais c’est quand mêle drôle. J’aime bien ce mélange de choses très factuelles qui dérapent, on ne sait pas vraiment trop comment, parce que ça en dit long sur la nature humaine.

Vous allez être à la barre d’un programme télé, alors que vous avouez ne pas trop vous intéresser à la télévision…

J’ai souvent l’habitude de critiquer la télévision, en disant que c’est un lieu où il n’y a pas souvent une véritable liberté d’expression… J’ai donc voulu voir comment c’était ! Pour bien critiquer, il faut l’avoir fait.

Directement en prime time sur France 4 et La Deux, c’est un gros pari ?

Il faut relativiser. Ce n’est que de la télé… Je ne stresse pas parce que je suis inconsciente par nature. Je n’arrive jamais paniquée en studio, j’essaie juste de bien travailler en amont. C’est un secret de réussite ! Ma première grosse expérience télé était le 11 janvier, pour la soirée «Charlie Hebdo», sur France 2 (et La Trois, NDLR). Une émission préparée en un week-end avec Nagui et Anne-Sophie Lapix. Là, il y avait peut-être un vrai risque, mais j’avais choisi de le faire avec les tripes parce que je crois à la liberté d’expression, et je suis une lectrice de Charlie Hebdo. Il y avait une part d’inconscience, certainement.

Vous avez eu carte blanche de la part de France 4 ?

C’était la condition sine qua non. Dans l’équipe de l’émission, nous ne sommes pas friands de faire de la télé à tout prix. La télé n’est pas le graal pour moi. C’est même secondaire à mes yeux, parce que je suis quelqu’un de radio et qui adore le média radio. Le deal c’était : « Ok, je veux bien que le show prenne le pas sur le fond parce que la télé, c’est de l’image, avec les contraintes éditoriales qui vont avec, mais tout ça ne doit pas être un frein à mes libertés.» J’ai une liberté folle sur France Inter, où personne ne relis ce que je fais, je ne veux donc pas faire de concessions en télévision. Là où je suis très reconnaissante vis-à-vis de France 4, c’est qu’avec «Je vous demande de vous arrêter», le service public joue son rôle de créativité et fait confiance à une bande jeune qui n’a quasi jamais vraiment fait de télé…

C’est une émission test, en prélude à une saison complète, l’an prochain ?

Pas du tout ! Nous ne sommes pas partis sur une idée de test. Je n’aurai pas le temps de préparer un programme récurrent. Je suis à Radio France de 7 heures du matin jusque 20h30… C’est un agenda assez lourd, et la télé ne m’intéresse pas plus que cela pour l’instant. J’ai justement accepté le projet parce que c’était deux émissions. Et d’ailleurs, au départ, il ne devait y en avoir qu’une ! Je me suis fait avoir… (rires) Je ne m’attends pas à ce qu’il y ait une suite. Je suis très heureuse en radio.


Il y a beaucoup de belgitude dans le programme ?

Je m’affranchis de le belgitude. Je ne la revendique pas et je ne l’instrumentalise pas. Je l’ai en moi, et elle fait partie de mon ADN. Dans tout ce que je fais, il y en a donc un peu, mais ce n’est pas une émission de Belges, parce qu’il y aura aussi Alex Vizorek. Il y aura d’ailleurs un Arménien dans l’équipe, André Manoukian. Il y aura quelques vannes sur la Belgique, mais ce n’est pas l’objet du programme.

En radio, vous égratignez la classe politique, mais vous ne pouvez pas voter, en France. Est-ce que les hommes politiques n’en profitent pas pour vous rabrouer ?

Non, parce que je ne fréquente pas la classe politique. Je ne sais donc pas s’ils aiment ou pas ce que je fais. Je n’ai quasi pas d’échanges avec eux. Avoir ce type de raisonnement serait stupide de leur part. Ce serait même une belle connerie, que de me dire «Vous n’avez pas droit au débat parce que vous ne pouvez pas voter !» 50% des gens qui manifestent en France, tous les jours, n’ont jamais mis un bulletin dans l’urne… Ce serait le paroxysme de mon intégration en France : «ne pas voter, et ouvrir ma gu… !»

Pourquoi avoir choisi de travailler en France ?

Parce que le terrain de jeu est moins restreint. Si vous comparez la France et la Belgique, même dans le milieu médiatique, c’est un terrain de foot d’un côté, face à une aire de jeu pour enfants, de l’autre. Mais peut-être que si j’étais restée en Belgique, je ferais la même chose sur la RTBF ! Je n’ai pas été frapper à la porte de France Inter, j’ai eu la chance qu’on vienne me chercher, et je me suis laissée embarquer. Là, où j’ai peut-être ouvert quelques portes, c’est que j’ai étudié en France et j’ai donc fait mes stages à Paris.

On va parler de conneries belges dans l’émission ?

Oui, nous en avons trouvé une belle ! Lors de la passation de pouvoir entre Catherine Fonck et Marie-Christine Marghem, quand la ministre sortante offre une lampe qui «fonctionne à l’huile de bras» alors que l’élue MR est handicapée…

Entretien : Pierre Bertinchamps

Découvrez un extrait de l’émission ci-dessous :

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