Changement de programme ce jeudi soir sur La Trois

Changement de programme ce jeudi soir sur La Trois
Julien Vandevenne
Julien Vandevenne Rédacteur en chef adjoint

La troisième chaîne de la RTBF rend hommage au Ministre d’État Roger Lallemand, père de la loi dépénalisant l’avortement. Au programme : une rediffusion d’un «Noms de dieux» auquel il avait participé en 2004.

Il y a douze ans, Edmond Blattchen recevait Roger Lallemand, avocat, sénateur, ministre d’Etat (PS), qui vient de nous quitter. Un homme de dialogue et de conviction, qui fut le co-auteur de la loi sur la dépénalisation partielle de l’interruption volontaire de grossesse en 1990. Qui contribua grandement à la mise sur pied de législations difficiles, par exemple contre les mines antipersonnel, contre le négationnisme et aussi pour un droit d’auteur plus équitable. La Trois lui rend hommage ce jeudi soir à 23h55.

Un Laïque qui n’était pas borné

Le ministre d’Etat Roger Lallemand (PS) est décédé dans la nuit du mercredi 19 au jeudi 20 octobre à l’âge de 84 ans. Il était, avec la sénatrice libérale flamande Lucienne Herman-Michielsens, coauteur de la loi qui a dépénalisé partiellement l’interruption volontaire de grossesse, une loi adoptée en dépit de forts clivages entre les mondes laïque et chrétien et qui ira jusqu’à susciter une crise politique majeure au sommet de l’Etat.

Ami de Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, Roger Lallemand a notamment défendu, comme avocat, Régis Debray, détenu en Bolivie pour avoir soutenu Che Guevara en 1967. Il a également été l’avocat de Willy Peers, figure du monde médical, emprisonné pour avoir été à la pointe du combat pour l’avortement en Belgique.

Le sénateur a été à l’initiative d’autres propositions qui ont fait évoluer les causes éthiques, notamment celles qui, portées par ses successeurs à la Haute assemblée, ont permis dépénaliser partiellement l’euthanasie. Dans un communiqué, la présidente de l’association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) Jacqueline Herremans s’est souvenue qu’« avec intelligence, avec courage, avec humanisme, Roger Lallemand, après avoir mené la bataille pour l’interruption volontaire de grossesse, a proposé les principes fondateurs d’une législation de dépénalisation de l’euthanasie ». Elle a souligné qu’« en libre-exaministe, il n’imposait pas son point de vue : il savait écouter, il savait dialoguer, il amenait son interlocuteur à cheminer avec lui, de question en réponse, pour en arriver à démontrer l’inanité du racisme, la nécessité de l’humanisme ».

« Laïque jusqu’au bout des ongles et jusqu’au fond du cœur, il présida pendant ses études le Cercle du Libre examen de l’ULB. Ce n’était pas un laïque borné : il comptait des amis dans tous les milieux et jouissait du respect unanime eu égard à sa sincérité, sa gentillesse et son empathie naturelles », a pour sa part épinglé le président du Centre d’action laïque (CAL) Henri Bartholomeeusen. « Sa présence, au travers de ses engagements et des progrès obtenus en faveur des valeurs universelles que nous défendons, n’est pas près de s’éteindre », a-t-il assuré alors que le CAL milite pour la dépénalisation totale de l’avortement.

Conseiller communal à Ixelles durant 25 ans, Roger Lallemand a été brièvement président du Sénat en 1988, assemblée dans laquelle il a siégé durant vingt ans, jusqu’en 1999. Il a présidé la Fondation du Judaïsme de Belgique, été administrateur de la Ligue des droits de l’Homme et de l’ULB.

Sur Twitter, le président du PS Elio Di Rupo a salué la mémoire d’un « camarade d’exception », une « personnalité hors norme qui fit faire des bonds de géants à notre pays dans tous les domaines éthiques ».

Les réactions ont rapidement afflué à l’annonce de son décès. DéFI a salué sa mémoire ainsi que le vice-premier ministre MR et ministre des Affaires étrangères Didier Reynders qui a évoqué « une figure marquante, une référence ».

Le premier ministre Charles Michel a également présenté ses condoléances à la famille à l’annonce du décès de Roger Lallemand, une personnalité qu’il a bien connue à l’occasion d’un stage dans son cabinet d’avocats. « Il m’a profondément marqué par sa vivacité d’esprit, son engagement humaniste total et une force de conviction qu’il plaçait dans chacun de ses dossiers. J’ai beaucoup appris à ses côtés », s’est souvenu M. Michel. Le chef du gouvernement a également salué l’action politique de Roger Lallemand. « Son nom restera gravé dans l’histoire politique de notre pays. Nous lui devons la loi dépénalisant partiellement l’avortement. Une loi pour laquelle, fidèle à sa méthode, il a transcendé les divergences politiques » a-t-il souligné, rappelant « un combat politique qu’il avait engagé après avoir défendu un médecin ayant fait avorter une jeune fille déficiente mentale ».

Outre les avancées éthiques, on retient également de Roger Lallemand d’autres lois importantes dont celle améliorant les conditions de la détention préventive ou celle sur les droits d’auteur et les droits voisins.

Personnalité d’exception, Roger Lallemand avait été fait commandeur de l’ordre de la légion d’honneur par le président français François Mitterrand. Ombre au tableau, en 2013, le journal L’Echo révélait que le ministre d’Etat, retiré depuis longtemps de la vie publique, était client de la banque HSBC en Suisse, une institution qui a aidé des milliers de Belges à cacher leurs avoirs au fisc belge.

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