«À plein temps» : un moment chaotique de la vie
Le film «À plein temps» est à découvrir ce jeudi à 20h30 sur La Trois. Rencontre avec Éric Gravel, le réalisateur.
Julie (Laure Calamy) se démène seule pour élever ses deux enfants à la campagne et garder son travail dans un palace parisien. Quand elle obtient enfin un entretien pour un poste correspondant à ses aspirations, une grève générale éclate, paralysant les transports. Julie va alors se lancer dans une course effrénée…
Présenté à la Mostra de Venise 2021, «À plein temps» a été auréolé de deux prix Horizons : Meilleur réalisateur pour Éric Gravel et Meilleure actrice pour Laure Calamy.
Éric Gravel, «À plein temps» commence par un son, le bruit du souffle endormi de Julie, votre personnage principal…
On est dans ce seul moment où Julie est au repos, dans ce moment unique et trop bref où elle peut recharger les batteries. Après, il n’y aura plus jamais de répit. À travers le prisme de cette femme, seule avec ses enfants, j’interroge nos rythmes de vie et nos combats quotidiens. Tout comme Julie, j’habite la campagne. J’ai voulu parler de mes voisins et de ces gens que je croise dans le train et qui font le pari d’habiter loin de la capitale pour une meilleure qualité de vie. C’est un équilibre difficile à trouver et tous n’y parviennent pas.
Avez-vous écrit «À plein temps» pour Laure Calamy ?
Au moment où j’écrivais mon scénario, je n’avais pas d’actrice en tête. Lorsque j’ai commencé à réfléchir à des noms de comédiennes, celui de Laure s’est imposé. C’est une actrice hors norme, elle a un registre immense, du drame en passant par la comédie. C’était intéressant de la mettre dans la peau de cette femme qui traverse un moment très chaotique de sa vie, que les Américains résument par l’expression «the perfect storm» (la tempête parfaite) : quand vous accumulez en un seul moment tous les problèmes possibles et imaginables et qu’il va bien vous falloir résoudre.
Le contexte professionnel compte beaucoup dans votre film. Comment avez-vous choisi celui des femmes de chambre de palaces ?
Je voulais que Julie exerce un métier de service, qui ne s’arrête pas, même s’il y a des grèves généralisées. Lorsque nous préparions le film, Laure et quelques comédiennes ont suivi une formation auprès de femmes de chambre, qui leur ont expliqué chaque geste à accomplir. Je me souviens qu’après une démonstration où ces femmes ont fait un lit impeccable en quelques minutes, nous les avons applaudies. C’était une vraie chorégraphie. Ces femmes avaient la passion du travail bien fait.
Et le contexte social dans lequel s’inscrit votre film est capital…
«À plein temps» se situe pendant un grand mouvement social à l’échelle du pays qui se propage à toutes les sphères d’activités. Ça se met à craquer de partout, un peu comme ce qui arrive à mon personnage. J’avais envie que vivent en parallèle le combat individuel et collectif, que graduellement, on comprenne qu’ils sont liés, racontent la même histoire, que l’un est la conséquence de l’autre. Julie est dans un angle mort. Elle appartient à cette catégorie de travailleurs parmi les plus vulnérables, pour lesquels il y a une vraie difficulté à faire grève ou d’être représentés.
Cet article est paru dans le Télépro du 11/1/2024
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici