VIP écolos : militants ou charlatans ?

L’écologiste et acteur Ian Somerhalder, 43 ans, est de toutes les initiatives pour protéger la Terre © Isopix

Grands discours, poings levés, yeux pleins de colère, création d’associations : les stars s’inquiètent, comme nous, pour le climat et l’avenir de la Terre. Leurs actions sont louables lorsqu’elles sont sincères. Ce n’est pas toujours le cas.

Les célébrités contribuent à la diffusion de précieuses informations sur le climat et boostent ainsi de nombreux efforts en matière de politique climatique. D’autant que leur influence sur l’opinion publique est grande. Comme l’analyse Eric T. Kasper, professeur agrégé de sciences politiques à l’université du Wisconsin : «De nombreuses personnes ressentent un lien personnel avec les stars.» Reste à voir que leurs dires ne sont pas du cinéma…

Conscience précoce

Le combat des célébrités pour l’écologie ne date pas d’hier. Robert Redford, 86 ans, est administrateur du Natural Resources Defense Council, organisation fondée en 1970, dont les avocats, scientifiques et autres affiliés luttent pour préserver nos ressources naturelles. Mais comme l’acteur le constate dans Time : «Le mouvement écologiste est devenu puissant à la fin des années 1960, quand les jeunes voulaient du changement. (…) Puis, l’engouement s’est estompé. Pour revenir aujourd’hui par nécessité.» Daryl Hannah, qui a été sa partenaire dans le film «L’Affaire Chelsea Deardon» (1986), est, elle aussi, une militante passionnée, végétalienne depuis de ses 11 ans, et ne compte plus les fois où elle a été arrêtée lors de manifestations : «Je finis par prendre des photos avec les shérifs qui me reconduisent ensuite à la gare !»

Participation

Leonardo DiCaprio a, de son côté, lancé sa fondation en 1998 pour «réunir les meilleurs esprits de la science et de la philanthropie pour répondre à une crise climatique croissante et à la perte stupéfiante de biodiversité menaçant la stabilité de la vie sur Terre.»

Dans la série de films documentaires «Nature Is Speaking», produite par l’organisme de protection de la nature Conservation International, Julia Roberts, 55 ans, prête sa voix à Dame Nature. Comme Sophie Marceau dans «La Nature parle», sa version francophone. Ces petits bijoux cinématographiques ont pu compter sur la participation de nombreuses stars françaises (Nicolas Hulot, Marion Cotillard, Mélanie Laurent…) et bien sûr américaines : Harrison Ford, Edward Norton, Penélope Cruz, Robert Redford et Ian Somerhalder, le beau gosse des séries «Lost» et «Vampire Diaries». À 43 ans, il vient de vendre sa villa de Los Angeles pour s’installer dans une ferme en pleine nature. L’acteur a décidé de changer de vie !

Des stars, comme Emma Watson, 32 ans, prônent les vêtements durables ou proposent des produits plus «verts». Jessica Alba, 41 ans, a fondé la marque Honest Company, éventail d’articles pour la famille, dont des couches biodégradables, des poudres et savons bio.

Faire des vagues

Pour nombre de célébrités, c’est l’or bleu qui s’avère précieux. Matt Damon a créé la fondation H2O Africa, devenue Water.org, pour fournir aux peuples précaires, à travers le monde, l’accès à une eau potable. «Cet accès, c’est non seulement à l’eau, mais à l’éducation, au travail et à l’avenir que nous le souhaitons pour tous les membres de notre famille humaine !», a déclaré le héros de «Good Will Hunting». Shailene Woodley, 31 ans, star de «Big Little Lies», a partagé une expédition sur les flots avec Greenpeace afin d’en savoir plus sur tout ce qui menace les océans. L’actrice s’est aussi associée à une initiative d’American Express afin de protéger les mers. «Les entreprises ont le pouvoir de changer les comportements des consommateurs et ceux-ci ont le pouvoir d’influencer celui des entreprises», note-t-elle. «Il faut prendre conscience des réalités et de nos modes de vie. L’idée n’est pas de tous aller vivre dans les bois ou puiser notre propre eau de source, mais de prendre nos responsabilités vis-à-vis des générations futures !»

Dans son sillage, on remarque Kevin Costner, associé à Blue Planet Water Solution, qui épure les marées noires en séparant pétrole et eau, Jaden Smith, créateur de Just Water qui traque la pollution des océans et Mark Ruffalo, fondateur des associations écologistes Water Defense et The Solutions Project.

En eaux troubles

Tout le monde n’a cependant pas la main aussi… bleue. Un rapport du Los Angeles Times a révélé que certaines stars, dont Sylvester Stallone, Kim et Kourtney Kardashian , ont outrepassé les restrictions de sécheresse estivale en dépassant la consommation d’eau autorisée. Près de deux mille de leurs voisins ont utilisé, eux aussi, plus de 150 % de leur budget mensuel en eau, soit quatre fois plus que le débit admis ! L’avocat de Stallone a cru bon de parler de malentendu : son client essayait juste de garder en vie plus de cinq cents arbres matures sur sa propriété.

Le pire luxe du monde

Tout cela agite la sphère écolo et les économistes, dont le Français Lucas Chancel. Il constate dans le Time : «Si les super pollueurs et les stars ont des dérogations et n’acceptent pas la politique climatique, le public ne l’acceptera pas non plus !»

Certaines grosses fortunes polluent aussi les mers avec leurs yachts. En 2018, les vingt premiers milliardaires ont émis en moyenne 8.000 tonnes métriques de CO2 avec leurs «petits navires» ! Des études de l’Université de l’Indiana qualifient ces moyens de transport «de pire luxe à posséder d’un point de vue environnemental.» Le confinement n’a pas amélioré les choses. Quand les avions ne décollaient plus, une noria de VIP s’est tournée vers le grand large. L’édition 2022 du «Boat International» a noté une augmentation de 25 % des commandes de construction de nouveaux yachts. Un courtier maritime a confié au Guardian : «Chacun veut sa liberté et les plus fortunés peuvent se le permettre !»

Quel pilote y-a-t-il dans l’avion ?

Même catastrophe avec les jets personnels, très appréciés comme alternatives aux vols commerciaux. Leonardo DiCaprio, grand donneur de leçons écolos, prend des vacances sur un yacht XXL dans les Caraïbes et utilise un jet privé. Il s’en est notamment servi pour un aller-retour Cannes-New York, en 2016, afin d’aller recevoir une récompense écologiste au Riverkeeper Fisherman’s Ball !

Leo n’est pas le seul à fauter. Depuis l’apparition de sites tel Flightradar24, qui possède 34.000 récepteurs au sol dans le monde entier, capables de voir les signaux des avions, et de comptes Twitter comme Celebrity Jets, créé par le tout jeune Jack Swenney (20 ans) qui a pu repérer les balades aériennes d’Elon Musk, des stars sont épinglées en plein vol. Parmi les délinquants du ciel, on compte Steven Spielberg, Oprah Winfrey et Kylie Jenner , outrés que «big brother» mette son nez dans leur vie privée. En juillet dernier, Celebrity Jets a pu informer le public que Kylie Jenner avait pris un jet privé pour un trajet de seulement 17 minutes en Californie.

Palme d’or des hypocrites

Mieux encore, ce «flight tracking» (traçage de vol) s’amuse désormais à classer les plus mauvais élèves ! L’une des championnes de l’année 2022 est la chanteuse et actrice américaine Taylor Swift, avec 8.293 tonnes de CO2 émises en sept mois. À titre comparatif, l’Américain moyen n’en émet «que» 15 en douze mois et le Belge, 8 ! Miss Swift s’est défendue, arguant que son avion personnel est parfois utilisé par des proches et non par elle. En effet, avec pareille excuse, on ne peut pas lui jeter tous les fragments de tarmac. Ce serait trop injuste…

Cet article est paru dans le Télépro du 24/11/2022

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