Vingt ans après sa disparition, Nougaro le chanteur-poète inspire toujours

Une photographie d'Odile Mangion du chanteur de jazz français Claude Nougaro sur un mur dans une rue de Toulouse, dans le sud-ouest de la France, le 29 février 2024 © AFP Ed JONES

Claude Nougaro à Toulouse aujourd’hui c’est une statue, une photo géante et même une station de métro, mais c’est surtout une inspiration qui, vingt ans après la mort du poète-chanteur le 4 mars 2004, continue à nourrir les artistes.

« Il reste ce grand-père qu’on a tous en commun », résume Oli du duo rap BigFlo & Oli, nouvel ambassadeur musical de la Ville rose.

« C’est un peu l’ange gardien spirituel des artistes d’ici », dit encore le rappeur, se souvenant d’avoir assisté au cortège funèbre du chanteur décédé à 74 ans, avec sa professeur de primaire en pleurs qui, en cours, enseignait les chansons de Nougaro.

C’était « un maître poète » qui « avait bien compris que l’avenir de la poésie n’était pas uniquement sur le papier mais bien plus par le truchement de la chanson », estime Joël Saurin, ex-bassiste du groupe Zebda, qui produit en mars à Toulouse le spectacle « Ames soeurs », autour d’un album méconnu des années 70, « Soeur Ame ».

« L’âme est le seul monument qui m’intéresse, toujours prêt à la visite, je cherche l’âme en l’homme », cette phrase du poète Nougaro que cite à l’AFP Hélène sa dernière épouse, va d’ailleurs comme d’autres s’afficher en gare de Toulouse-Matabiau, dans le cadre du Printemps des poètes 2024.

« Ses paroles d’amour, comme ses rythmes blues résonnent en nous et dans chaque rue de celle qu’il a contribué à faire connaître sous le nom de +Ville rose+ », souligne le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc.

Hymne à Toulouse

Car, pour tous les Toulousains, le souvenir de Nougaro, natif de la ville, tient d’abord à un « hymne », un « cantique laïque », comme l’avait appelé le quotidien régional La Dépêche du Midi, le jour de sa mort: la chanson « Ô Toulouse ».

Son refrain résonne pour chaque essai du Stade toulousain dans son antre d’Ernest-Wallon et elle ponctue souvent les grands évènements dans la ville.

Selon les biographes de Nougaro, cette chanson-hommage ne l’était pourtant pas dans ses premières versions, marquées par les mauvais souvenirs d’une enfance difficile dans le quartier populaire des Minimes.

Elle a en tout cas associé le chanteur à la ville et à l’Occitanie, même s’il a passé une large partie de sa vie à Paris.

Il y a un « réel attachement identitaire » à la figure de Claude Nougaro, explique Claire Fita, vice-présidente de la Région, qui organise chaque année un prix homonyme distinguant de jeunes artistes locaux.

Depuis 2006, quelque 5.000 jeunes entre 15 et 25 ans y ont participé, tels BigFlo & Oli ou Lombre, autre rappeur originaire de Rodez.

« Pour beaucoup d’entre eux, Claude Nougaro, ça représente un visage tutélaire » et c’est aussi « un emblème de la langue française, de notre région et de notre accent », dit encore Mme Fita.

L’accent, on y revient forcément quand on parle de Nougaro: « c’était sa force en fait », souligne la musicienne Cécile DeLaurentis, marraine du prix cette année.

« Porter son étendard »

« C’est son accent qui a donné le rythme à ses mots, ses phrases, ses mélodies, c’est un exemple très fort », insiste-t-elle.

Plus largement, poursuit Joël Saurin, « c’est aussi le bon contre-exemple à tous les a priori que j’ai entendus dans ma jeunesse, qui étaient qu’avec le français, on ne pouvait rien faire de musical, de rock n’roll ou de swing ».

« Claude c’est une scansion, je ne sais pas s’il prononçait vraiment à la toulousaine, mais c’est un phrasé personnel complètement reconnaissable », décrit Hélène Nougaro.

« Ca a été une influence dans l’écriture, c’est certain », ajoute Oli: « dans sa façon de faire sonner les syllabes, les consonnes, même si c’est très différent, il y a quelque chose où on est allé puiser ».

Alors tant pis si, en Occitanie, certains ont l’impression que Claude Nougaro n’est peut-être pas assez mis sur le même plan que Gainsbourg, Brassens ou Brel.

« C’est ce qui nous rattache encore plus à lui », dit Oli. « Le côté un peu maudit, pas reconnu à 100% nous pousse à encore plus porter son étendard. »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici