Versace, de fil en aiguille
L’Italie a vu naître les Médicis, les Borgia et… les Versace. Ambition, meurtre, déchéance et renaissance… Cette fratrie a créé un empire de la mode synonyme de luxe. Ce vendredi à 22h40, Arte diffuse le documentaire «Versace, les liens du sang».
15 juillet 1997, 9.00 du matin. Un homme entre dans sa somptueuse villa de Miami, un journal italien et le dernier numéro de «Vogue» sous le bras. Deux coups de feu retentissent. L’individu est touché à la tête par deux balles tirées à bout portant. Cet homme, c’est Gianni Versace, l’un des créateurs de mode les plus en vue du moment. Il est la cinquième victime de Philip Cunanan, tueur en série en cavale depuis trois mois. Une semaine plus tard, acculé par la police, Cunanan se donne la mort, emportant avec lui la réponse à la question que tout le monde se pose : pourquoi Versace ?
La Méduse
Giovanni Versace nait le 2 décembre 1946 à Reggio de Calabre, dans le sud de l’Italie. Dès son plus jeune âge, il traîne dans les jupes de sa mère Francesca, couturière réputée dans la région. Le petit garçon se passionne pour les tissus et apprend les ficelles du métier dans l’atelier de sa mère. À 25 ans, il poursuit son rêve en montant à Milan, «the place to be» pour percer dans la mode italienne. Après avoir travaillé pour d’autres, l’ambitieux créateur lance une maison à son nom. Et son entreprise est familiale. Santo, de deux ans son aîné, en établit le business plan : il sera le PDG, Gianni le créateur et Donatella, la petite sœur adorée, directrice artistique. La marque à la tête de Méduse est née. «Un symbole mythologique. Celui qui la regarde ne s’en remet pas. Qui porte du Versace lui sera lié toute sa vie», explique Santo.
V.I.P.
Le flamboyant styliste triomphe, associant comme personne imprimés baroques et couleurs éblouissantes, drapant ses mannequins de soie, de cuir ou d’une maille métallique brevetée. Fort de son succès, l’imperatore entreprend de conquérir le monde. Avec sa ligne de haute couture, il rivalise avec Yves Saint Laurent ou Karl Lagerfeld. Et enchaîne les coups de maître. En 1991, il ouvre son défilé sur la chanson «Freedom !» et fait défiler Naomi Campbell, Cindy Crawford, Linda Evangelista et Christy Turlington, quatre super-models qui apparaissent dans le clip de George Michael. Le créateur fait à nouveau sensation en 1994 en offrant «that dress» à Elizabeth Hurley, arrivée au bras de Hugh Grant à l’avant-première de «Quatre mariages et un enterrement», une robe noire juste fermée par quelques épingles, création iconique de Versace. La Méduse fait de la collaboration avec des stars sa marque de fabrique, habillant les célébrités de tous bords, de Madonna à Lady Di, en passant par Elton John et Sylvester Stallone.
Cadeau empoisonné
Malgré les tensions familiales, la marque est au sommet de sa gloire. Mais l’assassinat de Gianni fait dérailler la machine. Après des funérailles dignes d’un roi, la lecture du testament de Gianni laisse sa famille sans voix. Le créateur a désigné comme seule héritière Allegra, la fille de Donatella. À 13 ans, sa nièce reçoit 50 % de l’entreprise, confiés à sa mère jusqu’à sa majorité. Déjà détentrice de 20 %, Donatella reprend la direction de Versace. Après une période de bienveillance, le monde de la mode rend son jugement : la sœur cadette du génie n’est pas à la hauteur. L’Italienne sombre, abusant de la chirurgie esthétique et de la cocaïne. La diva ingérable est envoyée en cure de désintoxication. À sa sortie, elle finit par trouver son propre style, sans chercher à imiter son frère. Et devient même une icône féministe : «Pour moi, les vêtements sont des armes au service de nos objectifs», conclut-t-elle.
Cet article est paru dans le Télépro du 20/7/2023
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