Twitter : des badges bleus de certification imposés sans consentement

Profil Twitter d'Elon Musk, propriétaire du réseau social, marqué du badge bleu d'authentification payant, le 20 avril 2023 à Los Angeles © AFP Chris DELMAS

Le système de vérification des comptes sur le Twitter d’Elon Musk semblait ne pas pouvoir devenir plus incompréhensible, et pourtant la perplexité régnait de plus belle samedi, les badges bleus faisant leur retour sur certains comptes de médias ou personnalités – qu’ils le veuillent ou non.

« Sur mon âme je n’ai pas payé pour Twitter Blue, homme de Tesla tu vas sentir passer mon courroux! », a tweeté le rappeur américain Lil Nas X, dont le profil affiche la coche bleue.

Autrefois gratuite, et gage d’authenticité et de notoriété, elle signifie désormais que l’utilisateur est abonné à Twitter Blue (pour 8 dollars par mois) et que son numéro de téléphone a été vérifié par la plateforme.

Jeudi, les comptes qui avaient l’ancien badge bleu l’ont perdu, à moins de payer pour le nouveau, suivant la stratégie d’Elon Musk mise en place cet hiver pour authentifier les utilisateurs et générer de nouveaux revenus.

Mais une partie infime des anciens usagers distingués se sont abonnés – moins de 5% des 407.000 profils concernés, selon le chercheur Travis Brown.

Vendredi et samedi, un nombre croissant de personnalités ont retrouvé une coche bleue, apparemment sans action de leur part, comme l’écrivain Stephen King, le champion de NBA LeBron James ou l’ancien président Donald Trump.

« Non, c’est non »

« Non, c’est non, les mecs », a tweeté samedi la journaliste spécialiste des technologies Kara Swisher, expliquant avoir été « vérifiée de force », sans son « consentement ».

« Les gens doivent savoir: est-ce qu’Elon m’aime pour moi ou pour le 1,49 million de personnes qui me suivent? », a-t-elle ajouté, une heure après avoir affirmé qu’elle ne payerait pas « huit dollars par mois pour une coche bleue et des outils bofs ».

De nombreux utilisateurs authentifiés malgré eux tenaient à faire savoir qu’ils n’y étaient pour rien, car le badge controversé est devenu un symbole de soutien à Elon Musk.

« Merci de noter que je n’ai pas souscrit à Twitter Blue, même si pour des raisons mystérieuses ma coche bleu apparaît de nouveau », a déclaré l’auteur Rick Wilson.

L’économiste progressiste et prix Nobel Paul Krugman, qui s’était moqué de l' »impulsivité mal contrôlée » d’Elon Musk en juillet dernier, a déclaré samedi : « je n’y suis pour rien et je ne paye certainement pas ».

Le patron de Twitter, Tesla et SpaceX lui a répondu avec l’image d’un bébé barbouillé de sauce tomate, pleurant devant son assiette de pâtes et portant un bavoir estampillé de la coche bleue.

Vendredi, le dirigeant avait indiqué qu’il « payait personnellement pour quelques abonnements ».

« Echec et mat », a-t-il mystérieusement tweeté samedi, au milieu des spéculations.

« Le modèle économique de Musk est de falsifier le soutien de célébrités comme une vulgaire boîte de pilules pour faire agrandir son pénis », a lancé l’avocat Max Kennerly.

Grève

Des comptes de personnes décédées, comme le chef cuisinier américain Anthony Bourdain, ont aussi reçu le nouveau badge bleu.

Et de nombreux comptes officiels de médias l’ont également, même le New York Times qui avait perdu début avril sa certification après qu’Elon Musk eut qualifié l’information qui y est publiée de « propagande ».

Certains grands groupes de presse ont un badge doré réservé aux « organisations vérifiées » qui payent au moins 1.000 dollars par mois.

Mais la radio publique américaine NPR et le groupe de médias public CBC Radio-Canada n’avaient toujours pas recommencé à tweeter à samedi.

Ces deux organisations ont récemment suspendu leurs activités sur Twitter pour protester contre les étiquettes que leur avait accolé Twitter: « média financé par le gouvernement » ou « affilié à l’Etat », des termes auparavant réservés aux médias non indépendants, financés par des gouvernements autocratiques.

Vendredi la plateforme d’Elon Musk a supprimé ces labels, y compris pour l’agence officielle chinoise Xinhua (Chine nouvelle) ou le russe RT.

« Est-ce que le but réel de tout ce remue-ménage autour de NPR était d’aider la Chine et la Russie? On dirait bien : en retirant les étiquettes de médias contrôlés par des Etats, Twitter aide la propagande », a souligné Kara Swisher samedi matin.

L’AFP n’a pas sollicité Twitter, qui ne répond plus officiellement à la presse que par un émoticône en forme de crotte.

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