Stéphane Bern nous parle d’Elizabeth II
À la veille des festivités liées au jubilé de diamant de la Reine d’Angleterre (86 ans), rencontre avec le journaliste de France 2, spécialiste des têtes couronnées.
Comme nous vous l’annoncions par ailleurs sur ce site (lire les rendez-vous télé : ici , ici et ici ), ce premier week-end de juin verra tous les regards se tourner vers Londres et la reine Elizabeth II (86 ans) dont le Royaume-Uni fête les 60 ans de règne. Pour l’occasion, Stéphane Bern nous parle de ce singulier monarque qu’il a eu l’occasion de rencontrer.
En quoi cette Souveraine est-elle si singulière ?
La reine Elizabeth est entrée de son vivant dans la légende. Elle a fait partie très jeune de l’histoire de son pays, et son règne est l’un des plus longs de toutes les monarchies européennes, après ceux de Louis XIV, de l’empereur François-Joseph et de son aïeule, la reine Victoria. Si bien qu’elle est un personnage historique à part entière. C ‘est aussi l’inconnue la plus célèbre au monde : tout le monde sait qui elle est mais personne ne la connaît vraiment. Je ne suis pas certain que ses proches puissent lever vraiment le voile sur le personnage, car elle représente avant tout une institution. Une institution personnifiée par une femme qui a été tellement habituée à cacher ses émotions – pour n’être que le symbole de la nation -, qu’elle en est encore plus mystérieuse.
«Un humour très british et curieuse de tout»
Lors de vos émissions et portraits, avez-vous pu un peu percer ce «mystère» ?
Avoir eu la possibilité de parcourir en exclusivité l’intérieur du yacht royal, le Britannia, découvrir ainsi l’ancien salon de la souveraine, permet de mieux comprendre qui elle est. Cette femme, qui incarne les vertus anglaises, préférera toujours les promenades dans la lande écossaise, sous la pluie, au soleil de Saint-Tropez. C’est quelqu’un qui adore qu’on lui raconte des histoires, qui a un sens de l’humour britannique prononcé. Curieuse de tout, elle se tient informée de ce qui se fait ou se dit, et sait ce que vous faites lorsque vous la rencontrez. Pour autant, je crois qu’elle ne s’intéresse pas beaucoup à elle, qu’elle n’est pas très égotique.
Et c’est le seul monarque ou presque à n’accorder aucune interview…
C’est le seul. Elle ne reçoit jamais la presse. Enfin, on peut la rencontrer, cela m’est arrivé, mais on ne peut pas la citer. Jamais donc je ne dirai : «La Reine m’a dit…».
«Le sentiment de rencontrer un mythe vivant»
Quels souvenirs gardez-vous de cette ou ces rencontre(s) ?
Vous avez le sentiment de rencontrer un mythe vivant. Son visage figure sur des pièces de monnaie, des billets de banque, des timbres. Elle est sans doute l’une des femmes les plus photographiées au monde et en même temps c’est une femme normale qui vit une situation extraordinaire. Difficile dans ces conditions de goûter à une vie «normale» ! Elle a conscience de son «anormalité», mais ce n’est pas parce que vous en avez conscience que vous ne voulez pas vivre la même chose que tout le monde. Pour autant, elle accepte sans broncher son devoir de monarque. Elle n’a pas à dire si c’est bien ou pas, c’est ainsi, cela fait partie de son quotidien. Elle n’a pas choisi d’être réveillée tous les matins par un joueur de cornemuse sous ses fenêtres : mais elle a une telle dignité et une telle conscience de son devoir qu’elle y a pris goût et même du plaisir. Elle est vraiment incroyable et si pour certains, elle peut paraître dure, avec sa figure d’airain, elle a bon coeur et on la dit très sensible. Récemment, on a ainsi découvert que si elle avait refusé de regagner Londres avec ses petits-fils au lendemain du décès de Diana – un geste mal interprété à l’époque -, c’était sur leur requête.
1.000 bateaux et 1 million de personnes attendues
Vous allez commenter les festivités du dimanche 3 juin liées à son jubilé (sur France 2, à 14h00)…
Je les commenterai aux côtés de Marie Drucker, de Karl Lagerfeld et des envoyés spéciaux de la rédaction de France 2 à Londres, nous allons vivre en direct un grand événement de l’histoire. Ce sera bien évidemment l’occasion de revenir sur les moments les plus importants de son règne, d’évoquer son style, sa manière, son caractère. Et ce grand ballet naval sur la Tamise (ndlr : 1.000 bateaux et 1 million de personnes attendues sur les berges !), à laquelle prendra part la famille royale, me permettra aussi de raconter des anecdotes, d’expliquer la manière dont par exemple on badge les cygnes de la Tamise qui lui appartiennent. Tout comme les baleines et les cachalots, mais ça fait bien longtemps qu’on n’a vu ni baleine ni cachalot dans la Tamise !
«Le jour où elle ne sera plus là, quelque chose aura changé en Angleterre»
Y aura-t-il des similitudes entre ce jubilé et celui vécu en son temps par la reine Victoria ?
Je ne crois pas. Il y a une grande différence selon moi : quand la reine Victoria a fêté son jubilé, en 1897, elle a dû être surprise d’entendre encore quelques applaudissements. L’atmosphère était plutôt glacée, elle était devenue impopulaire du fait de son éloignement, de son désintéressement des affaires après son veuvage. Alors qu’Elizabeth II, vous le verrez, va être adulée. On le voit déjà. C’est un phénomène, les gens ont tous un avis sur elle. On ne dit pas «la reine Elizabeth», on dit The Queen, c’est l’unique, c’est la reine et le jour où elle ne sera plus là, quelque chose aura changé en Angleterre.
Entretien : Clotilde RUEL
Pour en savoir plus, plongez-vous dans l’ouvrage que Stéphane Bern lui a consacré : «Le Destin d’une reine», 176 pages, 26 € env. (Albin Michel)
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