Rixe à Orly: un an avec sursis requis contre les rappeurs Booba et Kaaris

Rixe à Orly: un an avec sursis requis contre les rappeurs Booba et Kaaris
AFP

Au tribunal comme en garde à vue, ils se sont rejeté la faute. Un mois après la bataille rangée entre Booba et Kaaris à l’aéroport d’Orly, le procureur a requis jeudi un an avec sursis contre les deux rappeurs ennemis.

Le tribunal correctionnel de Créteil rendra son jugement le 9 octobre.

D’ici-là, Booba pourra rentrer en famille à Miami: l’interdiction de quitter la France, imposée à tous les prévenus, a été levée.

Ils sont « tous deux responsables » de la rixe du 1er août, où ils ont « perdu toute lucidité », a estimé le procureur. Ils ont « entraîné leurs gardes rapprochées » dans la bagarre, a dénoncé le magistrat.

Pour les neuf autres belligérants, le procureur a échelonné ses réquisitions selon la gravité des violences et leurs antécédents judiciaires: relaxe pour un membre du clan Booba resté à l’écart, entre six mois d’emprisonnement avec sursis et huit mois ferme pour les autres.

Le représentant du parquet a renvoyé les deux leaders dos à dos: Booba « porte le premier coup de pied », mais c’est Kaaris « qui se lève et va au contact ».

L’audience-marathon a fait salle comble. Dehors, derrière le cordon de police, des dizaines de fans affichaient « team Booba » ou « team Kaaris ».

Passés quelques regards appuyés, Booba, Elie Yaffa à l’état civil, et Gnakouri Okou, alias Kaaris, chacun trois semaines de détention provisoire, sont restés calmes.

Volontiers goguenard en chemise à carreaux, l’autoproclamé « duc de Boulogne » s’est permis des messes basses avec la dessinatrice de presse et a parfois rabroué sèchement les avocats adverses. Son rival de Sevran, chemise blanche, a joué « l’apaisement » et présenté d’emblée ses « excuses ».

– « C’est pas ma faute » –

Le tribunal devait juger la bagarre d’Orly, il a aussi assisté à celle des avocats, qui se sont écharpés lors de l’examen des différentes vidéos de la rixe, chacun criant pour imposer son interprétation des images.

La scène est connue: à sept contre quatre le clan Booba affronte celui de Kaaris. Les bouteilles de parfum de la boutique duty free servent d’armes ou de projectiles. Bilan: des blessés légers dans chaque camp, plusieurs vols retardés et plus de 50.000 euros de casse.

« N’y avait-il pas moyen que cela se termine autrement? », a soupiré la présidente.

« J’aurais bien aimé », a répliqué Booba. « Je me suis défendu, tout simplement. »

S’il a donné le premier coup de pied, c’est parce qu’il se sentait « encerclé » et « menacé » par Kaaris et son groupe, qu’il a « essayé d’éviter ». Il tente ensuite « un coup d’intimidation ».

« C’est vraiment pas ma faute, j’avais pas le choix madame », s’est justifié Kaaris. « J’ai agi par légitime défense du début jusqu’à la fin », a juré le rappeur de Sevran. Selon lui, Booba lui aurait lancé: « lève-toi, salope ! »

« Je me lève, c’est une erreur. Mais je me lève parce que prendre des coups assis, c’est plus grave que prendre des coups debout », a-t-il avancé.

– « Risée d’internet » –

Chaque rappeur devait embarquer dans le même avion pour Barcelone, mais l’enquête ne permet pas de démontrer un quelconque guet-apens, selon le parquet. Loin du coup marketing, « cette rencontre est fortuite », a estimé le procureur.

« Sous le regard des passagers et des réseaux sociaux, cette rencontre ne pouvait que se conclure par une confrontation physique », a regretté le magistrat. À force de « clashs » publics, Booba et Kaaris « se sont créé des personnages forts, puissants, violents, excessifs et déterminés », a-t-il décrit.

Dans ce contexte, « baisser les yeux, détourner le regard, ignorer l’autre, c’est déjà perdre la face », a résumé le procureur. Il a fustigé deux hommes qui « ont perdu toute lucidité », mus par la peur de devenir « la risée d’internet ». Et les a renvoyés à « leurs responsabilités » de « chefs d’entreprise », mais aussi de « pères de familles ».

« C’est tellement simple de dire tous coupables, tous responsables », a réagi l’avocat de Kaaris, David-Olivier Kaminski.

« Où est la violence dans le geste de se lever et de se placer devant quelqu’un? », s’est-il indigné. « Quand on se fait attaquer, il faudrait ne rien faire? »

La légitime défense « ne tient ni pour les uns, ni pour les autres », a rebondi l’avocat de Booba, Yann Le Bras. Mais avant l’embarquement, « qui passe le message d’apaisement? Qui dit +ignorons nous+? C’est le clan Booba ».

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