Pierre Barouh: « un homme, une femme » et des pépites

Pierre Barouh: "un homme, une femme" et des pépites
AFP

« Un homme et une femme » – et Claude Lelouch – lui doivent tant. Alors qu’on célèbre les 50 ans du film palmé à Cannes en 1966, l’auteur-compositeur Pierre Barouh, inlassable globe-trotteur musical, fête lui le demi-siècle d’existence de « Saravah », son label découvreur de talents.

« Comme nos voix ba da ba da da ba da ba da / Chantent tout bas ba da ba da da ba da ba da », c’est lui, sur une musique de Francis Lai. « Quand on partait de bon matin / Quand on partait sur les chemins / A bicyclette », c’est lui aussi. Avec Pierre Barouh, on connaît forcément la chanson.

Mais ce pétillant jeune homme de 82 ans n’est pas seulement un parolier, le plus souvent pour les autres comme Yves Montand ou Françoise Hardy (« Des ronds dans l’eau »). Il a offert avec « Saravah » un espace unique de création à des artistes dénichés en France et dans le monde entier.

Parmi les plus emblématiques: Jacques Higelin, Brigitte Fontaine, Jean-Roger Caussimon, Areski Belkacem, mais également le Bénino-Togolais Alfred Panou, précurseur du slam dans le paysage hexagonal, le Gabonais Pierre Adekengué, aux prémices de la world music, ou encore le percussionniste brésilien Nana Vasconcelos.

Depuis 50 ans, le flair de Pierre Barouh s’est mis au service « du talent des autres », explique-t-il à l’AFP.

Avant d’être un inlassable passeur musical, le jeune homme, qui a également posé ses valises au Portugal, s’essaye au métier d’acteur au début des années 60. C’est alors qu’il fait la rencontre de Claude Lelouch, qui le dirige une première fois sur son film « Une fille et des fusils ».

Pour « Un homme et une femme », Pierre Barouh a plus d’une casquette et joué un rôle déterminant. « J’ai présenté à Lelouch Jean-Louis Trintignant, qui lui a présenté Anouk Aimée », dit-il. Le couple mythique à l’écran est formé. Le sien à la ville aussi puisqu’il se mariera avec l’actrice.

Alors que le réalisateur peine à trouver de l’argent pour tourner son film, Barouh s’offre une nouvelle escapade au Brésil où il se nourrit de cette bossa nova qu’il contribuera à faire découvrir en France.

« Finalement, Claude m’appelle et me dit: +Entre, on va tourner.+ Il vient me chercher à l’aéroport à Orly et je lui fais écouter +Samba Saravah+ écrite en une nuit juste avant de revenir ». Cette chanson séduira également Lelouch qui la fera figurer dans son film.

– « Barouh d’honneur » –

Les acteurs Anouk Aimée (g) et Jean-Louis Trintignant, en mai 1986 au Festival de Cannes

« Il n’était pas prévu de mettre des chansons dans le film, souligne-t-il. C’est, je crois, la première fois qu’on utilisait la chanson comme ça dans le cinéma, qu’on tressait de la sorte ces deux modes d’expression populaire. S’il y avait eu un producteur cela ne se serait jamais produit. Finalement, c’est un distributeur québecois qui a financé le film. » Six mois plus tard, « Un homme et une femme » rafle la Palme d’or à Cannes.

C’est du succès du film que naît Saravah. Pierre Barouh délaisse alors peu à peu les lumières des tournages pour prendre la route le plus souvent possible, aux confins des musiques du monde. Mais sa maison de production a aussi connu des heures difficiles.

« Au-delà du chiffre 3 je ne comprends plus rien, sourit-il. J’ai sauté à pieds joints de répartitions (droits d’auteur) en répartitions de la Sacem. Et heureusement, j’ai rencontré mon épouse japonaise (Atsuko Ushioda) qui s’occupe très bien de cela. »

Cette histoire d’amour le lie alors au Japon, où il part vivre dans les années 80 et mener de nouveaux projets. S’y constitue alors un cercle de fans qui lui vouent une admiration telle qu’ils parviennent à retrouver un documentaire datant de 1969, « réalisé en trois jours à Rio de Janeiro et que j’avais vite oublié ».

Ce film, « Saravah », capte l’essence de la samba et devient culte. « Il a refait surface grâce aux Japonais et depuis on ne cesse de me solliciter au Brésil à ce sujet », s’exclame l’octogénaire, amusé de ce « Barouh d’honneur ».

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