Michael Bloomberg, un milliardaire hyperactif qui rêve de la Maison Blanche

Michael Bloomberg, ancien maire de New York, songe à la Maison Blanche. Sur cette photo le milliardaire s'exprime à Detroit, dans le Michigan, le 24 juillet 2019 lors de la 110e convention du NAACP, organisation de défense des Noirs américains © AFP/Archives JEFF KOWALSKY

Géant de l’information financière, maire de New York 12 ans durant, militant contre le changement climatique: le milliardaire hyperactif Michael Bloomberg a jusqu’ici toujours hésité à briguer la Maison Blanche.

S’il se décidait à rejoindre la course, M. Bloomberg, 77 ans, arriverait tard dans une bataille pour l’investiture démocrate qui compte déjà 17 candidats, dont trois septuagénaires et un milliardaire, Tom Steyer.

Mais il espère que sa fortune – il est selon Forbes le 9e homme le plus riche du monde – lui permettrait de rattraper le groupe des favoris, dont les sénateurs Bernie Sanders et Elizabeth Warren, deux pourfendeurs des milliardaires et de Wall Street aux idées « extrémistes » selon lui.

Défier Donald Trump, cet autre milliardaire new-yorkais que Bloomberg a fréquenté et parfois complimenté quand il était maire avant de le répudier dès lors qu’il s’est lancé en politique, Michael Bloomberg y songe depuis longtemps.

– Trump, « un escroc » –

« Je suis New-Yorkais, et les New Yorkais savent reconnaître les escrocs, » disait-il de Trump pendant la campagne 2016.

M. Bloomberg avait alors caressé l’idée de se présenter comme indépendant. Avant de soutenir la candidature d’Hillary Clinton, de peur de diviser l’électorat démocrate.

En mars dernier, il annonçait qu’il ne serait pas candidat, jugeant plus utile de soutenir le prétendant qui décrocherait l’investiture démocrate plutôt que d’affronter personnellement un président qu’il juge « incompétent » et « dépassé ».

Mais cet homme d’affaires qui a longtemps refusé toute étiquette politique – conservateur économiquement mais favorable à l’avortement, aux droits homosexuels et militant pour le contrôle des armes à feu – « s’inquiète aujourd’hui de plus en plus » de voir Elizabeth Warren et Bernie Sanders prendre l’ascendant dans les sondages sur le très centriste ex-vice président Joe Biden, selon un proche conseiller.

Peut-il convaincre l’électorat démocrate?

Il fait valoir ses qualités de gestionnaire, qui en trois mandats de maire ont contribué à revitaliser New York après les attentats du 11 septembre 2001, ses efforts pour réguler les armes à feu, ou encore sa lutte pour le climat: ambassadeur spécial de l’ONU depuis 2014, il finance les projets de nombreux Etats, comtés et villes américaines pour réduire leurs émissions carbone.

Comme d’autres milliardaires, ce divorcé, père de deux filles et deux fois grand-père, s’est engagé à redistribuer la moitié de sa fortune.

Il soutient des organisations culturelles, milite contre le tabac ou le vapotage, et a donné en novembre 1,8 milliard de dollars à son ancienne université Johns Hopkins pour payer la scolarité des étudiants modestes. Preuve qu’il est conscient du fardeau de la dette étudiante.

En 2018, il dépensait 100 millions de dollars pour aider les démocrates à reprendre le contrôle de la Chambre des représentants.

– Contre-courant? –

Pourtant, beaucoup le voient comme un milliardaire à contre-courant d’un débat démocrate marqué par la volonté de taxer les riches pour corriger de criantes inégalités, ou la nécessité de mobiliser l’électorat noir qui avait manqué à Hillary Clinton.

Comme maire, Michael Bloomberg, habitué aux jets privés, était déjà accusé d’avoir fait de New York une ville de riches, et de soutenir des pratiques policières discriminatoires à l’égard des minorités.

Personne cependant ne conteste ses qualités de chef d’entreprise, couronnement d’un parcours digne du « rêve américain ».

Né le 14 février 1942 dans une famille juive de la classe moyenne de Boston, il fait de brillantes études d’ingénieur suivies d’un MBA à Harvard.

Il entre chez Salomon Brothers en 1966 et s’y hisse au rang d’associé, ce qui lui vaut, lors du rachat de la banque en 1981, un licenciement assorti d’un chèque de départ de 10 millions de dollars.

Il lance alors sa société d’informations financières, Bloomberg LP, fort d’une innovation qui fera son succès: le terminal Bloomberg, où les financiers affichent en quelques clics des informations du monde entier sur une entreprise ou un marché.

Le terminal, facturé quelque 20.000 dollars par an, s’imposera dans les salles de marché, où Bloomberg est aujourd’hui leader devant Thomson Reuters.

Michael Bloomberg aime dire qu’il a mieux réussi que Trump, beaucoup moins riche alors qu’il bénéficiait dès l’enfance des millions de son père.

La comparaison énerve Trump. Le président américain l’a traité vendredi de « petit Michael » – Donald Trump mesure 20 cm de plus – qui n’a « pas ce qu’il faut pour réussir ».

Les deux hommes d’affaires ont cependant des soucis communs: que ferait Michael Bloomberg de son entreprise s’il était élu? Conserverait-il son « bébé » devenu un média puissant, ce qui alimenterait tous les soupçons de conflits d’intérêts?

M. Bloomberg n’est pas non plus connu pour sa modestie. En 2017, il estimait avoir déjà sa place au paradis, pour avoir « sauvé des millions de vies » grâce à sa lutte contre le tabagisme.

« Quand j’irai au ciel, je ne suis pas sûr de devoir passer un entretien. Je crois que j’entrerai direct, » déclarait-il à la chaîne CBS.

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