Marion Cotillard, l’art de la métamorphose
Marion Cotillard a décidément le don pour ressusciter les gens. Seize ans après « La Môme », l’actrice se métamorphose à nouveau physiquement dans « Little girl blue », un film sur des traumas transmis de mère en fille et qui résonne avec le mouvement MeToo.
La réalisatrice Mona Achache a confié à la star française le rôle de sa mère, l’autrice Carole Achache, qui s’est suicidée en 2016 sans laisser de mot.
Pour tenter de comprendre son geste, Mona Achache, qui joue son propre rôle, fait appel à Marion Cotillard et lui demande d’incarner physiquement sa mère.
Dans une scène silencieuse captivante, la star ôte ses vêtements et endosse ceux de Carole Achache, ainsi que ses accessoires: les mêmes lunettes, bague, collier, sac… et porte une perruque aux cheveux bouclés.
L’actrice glamour cède sa place à une femme plus âgée au type « intello ». Tout au long du film, elle reprend en synchro de nombreux passages de textes ou d’interviews enregistrés avec la voix de Carole Achache, jusqu’à se fondre complètement dans le personnage. L’exercice se révèle si éprouvant que, dans une scène, elle s’arrête pour dire: « je n’ai jamais fait un truc aussi dur de ma vie ».
La « lumière » de Marion
« J’aime la transformation », confie à l’AFP Marion Cotillard. « J’ai plus de facilité à incarner des personnages qui sont loin de moi. (…) C’est là que je découvre le plus sur l’humain », ajoute-t-elle.
Elle précise toutefois que l’histoire « a résonné avec beaucoup de parcours féminins de ma famille, avec beaucoup de femmes tout court ».
L’actrice, pour qui le rôle est un « très beau cadeau », est allée jusqu’à se parfumer chaque matin avec le parfum de Carole Achache, ce qui a ému la réalisatrice.
Dans une scène où les lignes se brouillent, Mona Achache fait remarquer à Marion Cotillard que sa « mère faisait aussi du bruit en buvant son thé ». « Mais je croyais qu’on faisait une pause! », réplique l’actrice.
Pourquoi avoir choisi la star ? « Il y a une espèce de ressemblance invraisemblable avec ma mère jeune, cette espèce de beauté insolente, de liberté, de charisme. Et puis l’histoire est tellement ténébreuse que j’avais envie de lui amener une femme qui viendrait complètement la contredire avec sa lumière », raconte la réalisatrice.
Une histoire ténébreuse qui va être déroulée à travers l’incarnation de Carole Achache: elle plonge dans les souvenirs douloureux de son enfance au sein d’un milieu intellectuel et d' »adultes trop brillants, » dont sa mère, la romancière Monique Lange, épouse de l’écrivain espagnol Juan Goytisolo.
« Pourquoi cette transmission de douleurs? » est la question que pose le film, qui révèle peu à peu les abus qu’ont subi Monique Lange puis Carole Achache, notamment quand elle était petite fille.
« Les femmes sont maudites dans ma famille », peut-on entendre.
Mais le film ne porte pas sur la malédiction, soulignent Marion Cotillard et Carole Achache.
« L’idée de malédiction, elle m’a été transmise par ma mère. C’était un mot que je détestais. L’époque qu’on traverse et ce film m’ont permis de mieux réfléchir. Il n’y a pas de malédiction, il y a un conditionnement », affirme la réalisatrice.
Les faits se reproduisent quand « ce n’est pas guéri, ce n’est pas nettoyé et qu’on ne regarde pas ça en face », précise Marion Cotillard, qui dit avoir participé avec ce film « à un processus de guérison ».
« Depuis MeToo, on sait qu’il y a un nombre ahurissant de femmes qui ont vécu la même chose. (…) Je pense que, pour une guérison complète, on va avoir la nécessité de réunir l’homme et la femme et que l’homme soit dans ce combat aussi », assure la star.
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