Liberace, le roi du kitsch
Grand virtuose, le plus bling-bling des pianistes a marqué la scène américaine par ses extravagances et son sens de la démesure.
Depuis les coulisses, une Rolls-Royce démarre et s’immobilise sur l’immense scène du Hilton de Las Vegas. Un homme vêtu d’un manteau de zibeline à longue traîne en sort. Au public tout acquis à sa cause, il fait admirer ses nombreux bijoux, avant de s’installer derrière son piano pour jouer son répertoire : du Chopin, du Gershwin, des musiques de films, du boogie-woogie ou du jazz. Ainsi débutaient inlassablement les shows de celui dont le public n’a retenu que le nom de famille : Liberace. Mercredi, Arte consacre sa soirée à ce virtuose, icône de la démesure. Après le film de Steven Soderbergh «Ma vie avec Liberace», un documentaire dresse le portrait de ce «roi flamboyant».
Issu d’une famille pauvre, Wladziu Valentino Liberace naît en 1919 près de Milwaukee, dans le Wisconsin. Corniste, son père, immigré italien, le pousse à faire de la musique, tandis que sa mère, d’origine polonaise, estime qu’il s’agit d’un luxe que la famille ne peut se permettre. Dès l’âge de 4 ans, le jeune garçon montre des aptitudes au piano. Et trois ans plus tard, il s’attaque déjà à des morceaux nécessitant une grande technique musicale. Adolescent, il se forge une réputation de showman, avant de se faire remarquer lors d’un récital avec l’Orchestre symphonique de Chicago. Petit à petit, le jeune prodige se spécialise dans le classique, tout en se forgeant un univers et un look au sommet du kitsch.
Mister Showmanship
Parfois moqué par les critiques, Liberace, par ses extravagances, devient pourtant une légende de la scène américaine. Surnommé «Mister Showmanship» («Monsieur Spectacle») ou «The King of Bling» («Le roi du Bling»), il fait un tabac auprès des ménagères grâce auxquelles il fait salle comble. Il remplit les plus grandes salles du pays, telles que le Hilton de Las Vegas ou le Madison Square Garden de New York. Liberace est aussi la vedette de son propre show télé : le Liberace Show. «Je suis un Disneyland à moi tout seul», se vante-t-il.
Conséquence de son immense succès, le pianiste devient l’un des artistes les plus fortunés de son époque. Il achète de nombreuses villas, qu’il décore de dorures, de miroirs et de statues kitsch. Très proche de sa mère, il lui installe même sa propre salle de casino dans l’une de ses maisons.
Vie privée mouvementée
Côté privé, il s’entoure de protégés et d’amants qu’il tente parfois de façonner à son image. Ainsi, il incite son compagnon Scott Thorson à recourir à la chirurgie esthétique pour lui ressembler. Cinq ans plus tard, la relation clandestine et tumultueuse s’achève sous le feu des projecteurs. Le jeune Scott, accro aux drogues, n’hésite pas à réclamer à la star une pension alimentaire. Une affaire qui fait les choux gras de la presse !
Pourtant, redoutant d’être mis au ban de l’Amérique puritaine, ce fervent catholique – chacune de ses maisons contenait une petite chapelle – niera toute sa vie son homosexualité, puis le sida dont il était atteint. Il prétexte un régime à base de pastèques ayant mal tourné pour justifier sa perte de poids ! La maladie finit par l’emporter le 4 février 1987, à l’âge de 67 ans, dans sa somptueuse villa de Palm Springs.
Cet article est paru dans le Télépro du 11/08/2022.
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