La soprano Pretty Yende, à la conquête de l’Everest de l’opéra
Elle est l’une des sopranos les plus cotées de la planète et s’apprête à escalader un sommet de l’art lyrique: la Sud-Africaine Pretty Yende se dit prête à conquérir « la Traviata », mythique opéra dans lequel elle fait ses débuts jeudi à Paris.
Lundi, elle a reçu une « standing-ovation » à l’avant-première réservée aux jeunes de moins de 28 ans de la nouvelle production signée Simon Stone, qui a fait de l’opéra de Verdi une version très inspirée de la génération des « Millenials ».
Pour Pretty Yende, née il y a 34 ans dans un township à 300 km de Johannesburg avant de connaître un parcours extraordinaire qui l’a emmenée dans les plus grandes maisons d’opéra au monde, l’expérience est « divine », malgré la pression de chanter pour la première fois un rôle sur lequel les sopranos sont souvent jugées.
Affronter cet opéra, l’un des plus joués au monde, « a été très éprouvant pour les nerfs (…) c’est tellement connu et vocalement tellement exigeant », dit-elle en affichant un sourire solaire lors d’un entretien avec l’AFP au palais Garnier.
« On me l’a offert à plusieurs reprises mais je n’étais pas prête… je n’avais pas assez d’expérience sur scène, et un rôle comme Violetta nécessite plus qu’un joli visage et une jolie voix », ajoute la chanteuse qui n’aime pas par ailleurs être cantonnée au statut de « star noire du lyrique ».
– « 100 Violetta sur YouTube » –
L’approche décontractée du metteur en scène australien, l’un des plus demandés sur la scène européenne et qui fait également ses débuts à l’Opéra de Paris, l’a « libérée de l’immense responsabilité de Violetta », une courtisane en vue du 19e siècle atteinte de tuberculose qui, éprise d’Alfredo, se sépare de lui à la demande du père de ce dernier avant que les deux amoureux ne soient réunis aux derniers moments de sa vie.
Celle qui est tombée amoureuse de l’opéra à 16 ans en entendant le fameux « Duo des fleurs » de Lakmé dans une publicité, ne veut copier aucune légende du passé mais se félicite de pouvoir « regarder 100 Violetta sur YouTube, que ce soit une vidéo de 1909 ou une datant d’hier ».
Pretty Yende, qui fait partie de la nouvelle génération de sopranos post-apartheid, dit avoir été « sidérée » au moment des ovations.
« Je planais… j’ai senti que j’étais désormais capable de chanter » le rôle, souligne-t-elle. Les places pour les 13 dates parisiennes sont déjà épuisées et l’opéra sera retransmis dans les cinémas en France et à travers le monde le 24 septembre.
« Je viens de vivre les semaines les plus inspirantes de mon +hashtag+ Prettyjourney (signifiant à la fois le voyage de Pretty et beau voyage) », sourit la chanteuse, très connectée sur les réseaux sociaux, notamment Instagram où elle partage abondamment des citations « feel good » pour, dit-elle, se donner du courage et inspirer ses followers.
– « La Pretty d’Instagram » –
Car derrière ses photos très glamour et son côté résolument positif, la Sud-Africaine ne cache pas ses angoisses et ses doutes avec son public.
« J’essaie d’éviter d’entrer en concurrence avec la Pretty Yende parfaite sur Instagram. Je suis quelqu’un de positif mais je ne suis pas toujours forte », confie-t-elle. « La plupart du temps, on n’est pas content de la manière dont on a chanté. On est déprimé, on pleure, on est seul ».
« Je dois être honnête et dire que la carrière d’un chanteur lyrique de nos jours est l’un des choix les plus difficiles à faire en raison du nombre d’exigences extrêmes », indique Pretty Yende.
En 2018, la soprano américaine Lisette Oropesa a confié à l’AFP les pressions de la part de directeurs d’opéra ou de metteurs en scène qui exigent souvent des chanteuses minces et agiles sur scène.
Pour Pretty Yende, « on nous demande d’être plus forts en comparaison à nos idoles du passé qui se concentraient sur la voix. Ça peut être à la fois excitant et décourageant ».
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