La perfection ? Leur meilleur défaut !
Exposés à un très large public, beaucoup d’artistes surveillent leur travail ou leur look dans le moindre détail. Conscients de cette obsession, ils tentent de la canaliser. Avec plus ou moins de succès…
Tous les créatifs peuvent être à la fois stimulés et obnubilés par l’excellence, qui peut être un lourd fardeau. Michaela Holtz, psychothérapeute spécialisée dans les métiers de l’écran et de la scène, explique au Los Angeles Time : «Durant la performance, un artiste est profondément connecté à sa créativité et à son public. Cette connexion lui fait oublier ses défauts, ses peurs. Mais il suffit d’une remarque, d’applaudissements moins nourris ou d’un regard pour que cet état disparaisse. L’artiste revient alors à la réalité, retrouve ses doutes et se pose plein de questions…»
Exigence féroce
Certains tentent de masquer cette obsession de la perfection, d’autres confient en souffrir. «Je suis une obsessionnelle compulsive et une perfectionniste. Je ne le dis pas avec fierté», déclare Jennifer Connelly, 52 ans. La partenaire de Tom Cruise dans «Top Gun : Maverick» explique : «Je prends mon travail très au sérieux, quand je tourne, je ne pense qu’à ça et, je l’admets, je suis plutôt tatillonne !»
«Nicole Kidman m’a demandé des centaines de fois si telle ou telle prise était bonne chaque fois que nous avons travaillé ensemble !», relate la cinéaste Jane Campion («Portrait de femme», «Top of the Lake»). Quant à Michelle Pfeiffer, elle confie : «Je suis perfectionniste, ça peut me rendre folle. Et excéder ceux qui m’entourent ! Cela étant dit, je pense que c’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai eu du succès. En fait, je me soucie beaucoup de ce que je fais.»
Vice et atout
On peut aussi attraper le virus du perfectionnisme dès le plus jeune âge comme Emmy Rossum, 36 ans. Enfant de la balle, l’actrice a entamé sa «carrière» à 7 ans en étant chanteuse, notamment aux prestigieux Metropolitan Opera et Lincoln Center, à New York. Derrière son joli petit minois, l’héroïne du «Jour d’après» (2004) serait donc d’une exigence féroce avec elle-même. Et autrui. «Tout est une question de contrôle, le perfectionnisme est mon plus grand vice et l’un de mes plus grands atouts !», reconnaît-elle. «Je prépare un tournage avec beaucoup de rigueur. Certains arrivent sur le plateau en sachant à peine quelle scène ils vont jouer. Cela me rend dingue ! Tout ceci doit venir de mes premiers pas : j’ai joué et chanté dans plus de vingt opéras en six langues différentes, aux côtés de personnalités telles que Plácido Domingo et Luciano Pavarotti.» Loin de la complexer, ces expériences lui ont donné le goût du «presque parfait». «Depuis cette époque, je suis très dure avec moi. C’est en quelque sorte en contradiction avec l’idée de l’art, car ce sont les imperfections qui rendent un artiste, humain. J’en suis consciente, mais on ne se refait pas !»
Recul nécessaire
Emma Watson, 32 ans, inoubliable Hermione de la saga «Harry Potter», était rigoureuse avant même d’être actrice professionnelle. «Mes parents ont une éthique forte, ils m’ont inculqué l’amour, le respect pour son travail. Et la fierté de le faire !», indique-t-elle à l’édition britannique de Marie Claire. «Heureusement, tout s’est bien passé pour moi à mes débuts. Si j’avais eu une mauvaise critique, j’en aurais été malade. J’ai donc dû revoir mes critères artistiques ou physiques à la baisse. C’était nécessaire pour avancer !»
La star a trouvé la solution, juste après le triomphe de ses débuts : faire une pause et reprendre des études. «Être à l’université a contribué à me donner une perspective différente. Être entourée de gens qui vivent leur vie d’une autre façon, qui ont des aspirations différentes, a remis les compteurs à zéro. Grâce à ce recul, je suis capable de repérer les moments où ma quête d’excellence pourrait devenir insupportable pour mes collègues ou ma famille.»
Torturées, frustrées…
Plus sensibles, d’autres artistes ont besoin d’aide. Comme l’actrice américaine Ashley Judd, 54 ans. «Le perfectionnisme est une question de passion, d’énergie et de concentration. Mais il peut aussi être source de torture et de frustration !», a expliqué l’héroïne de «Crimes et pouvoir» (2002) à Variety. «J’ai suivi un programme d’un mois et demi pour surmonter mes problèmes émotionnels permanents dont ma grande incertitude. Maintenant, j’essaie de me rappeler qu’en étant aussi exigeant avec soi-même, on s’épuise.»
… déçues
L’actrice et mannequin Zendaya , elle, lutte encore pour trouver ses marques : «Si ce que je fais n’est pas parfait, je suis profondément déçue. En fait, c’est mon don et ma malédiction ! Je dois parvenir à me permettre une marge d’erreur !» Bien que star mondiale, actrice récompensée et icône de la mode, la jeune femme de 26 ans est sa critique la plus dure. Tout comme son compagnon, l’acteur Tom Holland («Spider-Man»), 26 ans lui aussi. Leur credo ? Si ce que tu fais n’est pas parfait, alors autant ne pas le faire…
L’héroïne de «Dune» (2021) parle presque comme une sportive de haut niveau, comme Serena Williams qui ne se pardonne rien, et tente de gérer : «Quand je ne suis pas à la hauteur des critères que je me suis fixés, je peux vite me décourager.»
La plus exigeante
Mais la personnalité la plus exigeante du show-business est sans doute Madonna, 64 ans. La star tient un journal et se souvient avec exactitude des moments de sa carrière où la frustration l’a envahie : «L’un de mes pires souvenirs restera mon show en direct au Super Bowl d’Indianapolis en 2012. J’ai dû composer avec les demandes des organisateurs. J’ai eu 12 minutes et 40 secondes pour mon intervention. J’étais très nerveuse car j’aime tout diriger et là, ce n’était pas possible.»
Le club des héros insatisfaits
De son côté, Tom Cruise (60 ans) est toujours à l’affût du moindre détail susceptible d’entraver un tournage. «C’est un perfectionniste et il s’attend à ce que les autres suivent son exemple», a révélé un proche au Daily Mail. «Toute la vie de Tom est centrée sur son travail.»
Daniel Craig dit n’être jamais satisfait : «Je ne peux pas l’expliquer, c’est dans ma nature ! Je pense seulement que chercher le meilleur en vaut la peine !» Russell Crowe fait échos à ses dires : «Recevoir des récompenses, des prix, n’a rien changé à mon insatisfaction !» Les cinéastes qui l’ont dirigé peuvent en témoigner, comme Ron Howard dans le Hollywood Reporter : «Russell a la tête dure ! Mais après avoir accordé nos violons, j’ai adoré bosser avec lui. Il travaille d’arrache-pied, c’est presque une sorte de performance surnaturelle.» Ridley Scott conclut : «La difficulté motive Crowe. Et ne vous y trompez pas, les meilleurs artistes sont généralement complexes, intelligents. Vous devez être toujours prêt à composer avec les perfectionnistes !»
Cet article est paru dans le Télépro du 2/02/2023.
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