La justice américaine annule l’une des condamnations d’Harvey Weinstein pour viol

L'ancien producteur américain Harvey Weinstein au tribunal, le 4 octobre 2022 à Los Angeles

Une cour d’appel de New York a annulé jeudi la condamnation pour viol et agression sexuelle de l’ex-producteur star d’Hollywood Harvey Weinstein en 2020 dans cet Etat, et ordonné un nouveau procès, un revers pour le mouvement #MeToo.

La cour d’appel a estimé que des erreurs de procédure avaient été commises durant le procès à New York. Condamné à de la prison à Los Angeles dans un procès distinct, Harvey Weinstein restera toutefois en détention.

Le mouvement #MeToo contre les violences faites aux femmes avait été déclenché en 2017 par les révélations sur Harvey Weinstein, dont l’influence sur Hollywood était immense.

Il n’a jamais reconnu publiquement autre chose que des relations consenties.

Sa condamnation à 23 ans de prison à New York en 2020 pour viol et agression sexuelle avait constitué une victoire pour ce mouvement.

Mais selon l’une des juges de la cour d’appel, des témoignages portant sur d’autres faits que ceux commis contre les personnes plaignantes avaient été admis, « de façon erronée ». Or ces témoignages avaient « dépeint une image hautement préjudiciable » de M. Weinstein.

« La solution à ces erreurs choquantes est un nouveau procès », a poursuivi la juge Jenny Rivera.

Quatre juges se sont prononcés pour l’annulation de cette condamnation et trois contre.

« Nous savions qu’Harvey Weinstein n’avait pas eu droit à un procès équitable », s’est félicité Arthur Aidala, l’un de ses avocats, parlant d’un « grand jour pour les Etats-Unis » car la décision « nous donne foi dans le fait qu’il existe bien un système judiciaire ».

« Harvey pourra, en vertu de cette nouvelle décision, se présenter à la barre et donner sa version de l’histoire en restant fidèle à ce qu’il a toujours dit », a ajouté Arthur Aidala.

« Il y avait tant de pression, parce que Harvey était le visage de ce mouvement », a-t-il déploré.

« Profondément injuste »

« La cour continue à contrecarrer les victoires régulières pour lesquelles les survivantes de violences sexuelles se sont battues », a pour sa part écrit Madeline Singas, une des juges de la cour d’appel s’étant prononcée contre la décision de jeudi.

« Les femmes qui portent le traumatisme de violences sexuelles et les blessures des témoignages répétés sont oubliées », a-t-elle ajouté.

Harvey Weinstein, 72 ans, est actuellement détenu dans une prison de l’Etat de New York, selon les médias américains.

En 2023, l’ex-producteur a également été condamné à 16 ans de prison à Los Angeles pour viol et agressions sexuelles.

Un groupe de victimes d’Harvey Weinstein a dénoncé la décision de jeudi, estimant qu’elle n’était « pas seulement démoralisante », mais aussi « profondément injuste ».

« Mais cette décision n’affecte en rien la réalité de ce que nous avons vécu », a écrit dans un communiqué le groupe « Silence Breakers », qui rassemble des femmes qui avaient dénoncé, au sein du mouvement #MeToo, les agissements de Harvey Weinstein.

« Le monde a changé », ont-elles affirmé. « Nous continuons à être fortes et à défendre ce changement. Nous continuerons à nous battre pour que justice soit rendue aux survivantes du monde entier », ont-elles clamé.

« Pas en arrière »

La décision « est un immense pas en arrière », a également réagi l’avocat Douglas Wigdor, qui a représenté deux témoins du procès new-yorkais.

« Les tribunaux admettent régulièrement des preuves sur des actes ne faisant pas l’objet d’inculpations, pour aider les jurés à comprendre les problématiques concernant les intentions, modes opératoires ou procédés du prévenu », a-t-il déclaré.

Il s’agit d’un nouveau camouflet pour le mouvement #MeToo: Bill Cosby, gloire déchue de la télévision américaine, avait été libéré en 2021 après une annulation pour vice de procédure de sa condamnation pour agression sexuelle.

Les films produits par Harvey Weinstein ont reçu de très nombreuses nominations et récompenses aux Oscars, une célébrité qui a longtemps empêché ses victimes de parler, par peur de répercussions sur leur carrière.

Depuis 2017, des dizaines de femmes, dont Angelina Jolie et Gwyneth Paltrow ont accusé Harvey Weinstein de harcèlement, d’agressions sexuelles ou de viols. Mais le délai de prescription a été dépassé dans nombre de ces affaires.

Le film « She Said », sorti en 2022, retrace l’enquête de deux journalistes du New York Times sur le tout-puissant producteur, à l’origine de l’avalanche de témoignages qui ont suivi.

bur-la/aem/rle

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici