Kate Winslet, l’obstinée magnifique

Beauté intemporelle au talent indéniable, l’actrice a toutefois dû lutter pour réaliser son profond désir d’incarner des femmes authentiques aussi têtues que complexes. Ce mercredi à 22h55, Arte diffuse « Kate Winslet – Résolument actrice ».

Plus jeune actrice à avoir eu cinq nominations aux Oscars avant la trentaine, Kate Winslet a toujours opté pour des rôles forts et singuliers, avec des premiers pas brillants dans le beau et dérangeant « Créatures célestes » (1994), puis des adaptations de grands classiques dont en 1995 « Raison et sentiments » (Jane Austen) et « Hamlet » (Shakespeare), l’année suivante. Mais la détermination précoce de cette enfant de la balle ne l’a pourtant pas dispensée des affres du doute et des vents contraires.

Coup de chance

Cette native de Reading (Angleterre), qui a eu 49 ans le 5 octobre dernier, se souvient de ses dires de jeunesse : « Quand je serai grande, je veux être sur scène ! » Kate a de qui tenir : ses grands-parents étaient acteurs et directeurs de la Reading Repertory Theatre Company, et son père avait une formation en art dramatique. À 5 ans, elle joue Marie dans la pièce de théâtre de la Nativité de son école et, à 15 ans, tourne « Dark Season », une série télévisée de la BBC.

Étonnamment, la star actuellement à l’affiche de « Lee Miller » (lisez donc son interview page 21) considère que sa carrière est un coup de chance : « J’ai fréquenté des clubs de théâtre à 25 pence l’heure de cours, dans des cabanes de scouts ou des salles paroissiales. » Et l’un de ses profs lui a prédit qu’avec sa silhouette ronde, elle ne réussirait jamais.

Anormal et traumatisant

Même après le raz-de-marée de « Titanic » (1997), Kate Winslet a le sentiment d’avoir plus le vent en proue qu’en poupe. Malgré le phénomène cinématographique aux onze Oscars, la jeune femme de 22 ans est déstabilisée : « Je n’avais pas de sécurité à l’extérieur de chez moi. J’essayais de comprendre comment sortir sans avoir une crise d’épilepsie à cause des flashes des paparazzis. Issue d’une famille normale, tout était soudain anormal pour moi, c’était traumatisant. »

Ce succès foudroyant s’accompagne de critiques et moqueries sur son allure gironde. La « gutter press » (presse de caniveau) ricane : « Avec son poids, comment Kate a-t-elle tenu sur la planche après le naufrage sans couler ? » L’animatrice de télé Joan Rivers ajoute : « Si elle avait juste perdu 2 kg, DiCaprio aurait pu tenir sur le radeau ! »

Faire des erreurs

Fragilisée, l’actrice ne veut plus tourner de blockbusters qui la dépassent. Et ne font pas le bonheur : « Il y a eu des opportunités phénoménales. Mais honnêtement, ça me faisait peur. Je n’ai pas été élevée dans l’idée que la compensation financière était nécessaire au bonheur. » L’héroïne de « Contagion » (2011) opte pour des fictions plus marginales : « Je n’étais pas sûre de vouloir être célèbre, je voulais encore apprendre, vivre l’anxiété de jouer différents rôles, faire des erreurs et grandir. Je pense que ce choix instinctif a payé. » Dix ans après « Titanic », Katie retrouve le sourire avec l’Oscar de la Meilleure actrice pour « The Reader », puis l’Emmy Award saluant son rôle de femme divorcée et mère-courage dans la minisérie « Mildred Pierce » (2011).

Aujourd’hui artiste respectée, mère de trois enfants, Kate Winslet est aussi philanthrope, s’engage dans maintes causes, soutient les jeunes actrices. Et ne manque jamais de souligner : « Toute jeune femme qui a déjà été rabaissée par un professeur, un ami ou un parent, ne doit rien écouter de cela. C’est ce que j’ai fait. J’ai continué, j’ai surmonté mes peurs, mes insécurités. Il ne faut pas douter, il faut juste y aller ! »

Cet article est paru dans le Télépro du 24/10/2024