Hélène Grimaud, la pianiste qui «voit» la musique
Acclamée tant par la critique que le public, la pianiste ne fait rien à moitié. Tout dans sa vie n’est qu’exaltation. Pas de note moderato pour cette surdouée ! Ce samedi à 21h10, France 4 diffuse un concert d’Hélène Grimaud enregistré en Bavière, où la jolie pianiste interpréte des pièces de Satie, Debussy, Chopin… et le «Kreiseleriana op. 16» de Schumann.
«À 9 ans, j’étais déjà obsédée par le piano», raconte Hélène Grimaud, dont France 4 diffuse un concert samedi soir. «J’étais amoureuse de cet instrument de pur plaisir et d’évasion !»
Ce coup de foudre s’explique sans doute aussi par le besoin de la fillette, nerveuse et rebelle, de trouver une passion comblant son énergie et son besoin de défis. Si cette découverte a changé son destin, elle n’a en rien modifié son caractère enflammé.
Étrange et fascinante
Admiratrice des musiciens qui osent déconstruire et reconstruire les morceaux à leur manière, tel Glenn Gould auquel on l’a comparée, Hélène Grimaud (53 ans) n’a jamais suivi sagement les partitions écrites par d’autres. Aux carcans, elle préfère les risques et affirme : «Une fausse note jouée par élan, vous l’entendez mieux qu’une note jouée par peur !»
En outre, l’artiste n’a jamais eu à travailler d’arrache-pied : «Certains merveilleux pianistes s’entraînent huit heures par jour. Je n’ai jamais été comme eux.»
Dans son esprit où tout va vite – très vite ! –, la belle Hélène au regard décidé a développé une technique étrange et fascinante : la synesthésie, capacité à associer deux sens.
L’artiste entend et «voit» la musique en associant les sons à des couleurs : «Cela améliore ma mémorisation de chaque note.» Pour elle, un do mineur est noir, un ré mineur bleu, ou un mi bémol majeur «très brillant, semblable à la lumière du soleil».
Instinct indomptable
Consciente d’être différente, l’artiste n’en a jamais eu honte. Se décrivant comme «une enfant contraire et indomptable» à l’école, elle a toujours suivi son instinct et veillé à rester libre. Même le piano ne l’a jamais «soumise». Jusqu’à 28 ans, celle dont les albums de reprises enjouées peuvent rivaliser avec les disques pop a refusé d’avoir son propre instrument, assurant ses répétitions d’avant-concert en utilisant son esprit, «des associations d’images, des projections mentales», car «chaque récital doit être un événement émotionnel, spontané et naturel».
Férue de littérature, de philo, d’histoire et d’éthologie, cette militante pour le climat et les droits de l’homme est aussi une féroce protectrice des animaux. Cofondatrice du Wolf Conservation Center, elle s’est découvert une facilité de communication avec les loups !
Rendant un jour visite au propriétaire d’une louve, Alawa, la pianiste est stupéfaite : «À la minute où elle a touché ma main, elle s’est couchée sur le côté.» Et d’expliquer dans son livre «Variations sauvages» :«J’ai senti une étincelle jaillir, l’appel d’une force inconnue, primordiale. C’est incroyable pour un loup de faire ça, c’est un signe de reconnaissance et de confiance. La louve est restée à mes pieds. J’ai dû lutter contre une puissante envie de frotter mon visage contre son museau, la caresser et courir avec elle dans la nuit !»
Et de conclure : «Les loups ne sont pas méchants mais des ingénieurs de la biodiversité essentiels pour préserver les équilibres entre espèces animales et végétales. Et aussi des créatures qui ont beaucoup à apprendre aux humains.» Peut-être un peu comme elle ?
Cet article est paru dans le Télépro du 26/1/2023
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