Enterrement discret en Tunisie pour le couturier Azzedine Alaïa, à son image

Enterrement discret en Tunisie pour le couturier Azzedine Alaïa, à son image
AFP

Ce fils d’agriculteurs repose désormais dans la même terre tunisienne où il est né, avec vue sur la Méditerranée: le créateur franco-tunisien Azzedine Alaïa a été inhumé près de Tunis lundi en présence de ses proches, dont Naomi Campbell.

De sa maison sur les hauteurs de Sidi Bou Said jusqu’au cimetière, il a été accompagné dans une relative discrétion par plusieurs dizaines de personnalités et de journalistes, et autant d’amis, voisins et membres de sa famille.

La top model Naomi Campbell, qui l’appelait affectueusement « Papa » et avait présenté en juillet son ultime défilé, a escorté sa dépouille depuis la France dimanche soir, puis s’est rendue jusqu’à sa dernière demeure, drapée de noir et visiblement émue.

Elle a traversé l’enchevêtrement de modestes tombes blanches au bras du mannequin Farida Khelfa, qui fut également une muse et proche du couturier. La mannequin et animatrice tunisienne Afef Jnifen a également participé aux obsèques.

– L’homme aux deux rives –

Funérailles du couturier franco-tunisien Azzedine Alaïa, à Sidi Bou Said le 20 novembre 2017

La famille a souhaité un dernier hommage discret, à l’image de l’homme qu’il était, fuyant les podiums et la publicité pour travailler dans l’intimité de son atelier-boutique parisien du Marais.

Après une brève halte à la mosquée, le cercueil a été inhumé en présence de quelques dizaines d’admirateurs, amis, neveux et nièces du couturier, qui était connu pour ses robes sculpturales et intemporelles sublimant le corps féminin.

Azzedine Alaïa repose désormais auprès de sa mère, de son frère et de sa soeur à Sidi Bou Said, haut lieu historique et touristique dans la banlieue nord de Tunis.

« Il a représenté la Tunisie de la meilleure manière », a estimé le président tunisien Béji Caïd Essebsi, qui s’est rendu au domicile du créateur dans la matinée pour présenter ses condoléances.

Le ministre de la Culture, Mohamed Zine El Abidine, a salué le talent du couturier originaire de Siliana, « région ancrée dans l’histoire », et jugé qu’il avait dans ses créations exprimé « la quintessence, la beauté, l’imagination fertile » de la Tunisie.

« Nous sommes très fiers de cet artiste », a-t-il dit à l’AFP, annonçant une manifestation en sa mémoire courant décembre, à l’occasion du quarantième jour après sa mort, un évènement marqué dans la tradition musulmane.

« Il parlait beaucoup de revenir (en Tunisie, ndlr) ces derniers temps. On avait discuté d’une belle exposition au musée du Bardo, de défilés, de rencontres avec des modistes », a indiqué l’ambassadeur de France Olivier Poivre d’Arvor.

« Puisqu’il est là à demeure, on va le faire dans les mois qui viennent avec sa famille, ses amis », a-t-il ajouté, espérant qu’il y ait « un jour en Tunisie un lieu qui fera partager ce monde de beauté incroyable qui était le sien (…), cette rencontre magnifique entre les deux rives de la Méditerranée qu’il incarnait avec beaucoup de tolérance et de gentillesse ».

– Atypique et adulé –

Prière du président tunisien Béji Caïd Essebsi lors des funérailles du couturier franco-tunisien Azzedine Alaïa, à Sidi Bou Said, le 20 novembre 2017

Parmi les admirateurs présents à l’enterrement, le créateur tunisien Salah Barka a rendu hommage à celui qu’il considérait comme un maître.

« J’ai appris beaucoup de choses avec Azzedine Alaïa. Lui qui était un sculpteur, il a sculpté le corps de la femme. J’ai appris à mélanger les couleurs. À mélanger les matières. À donner de la personnalité… », a-t-il dit.

Le créateur était né en Tunisie en 1940 mais cultivait la coquetterie quant à sa date de naissance. « J’ai l’âge des pharaons. Les dates, je les ai effacées », disait-il.

Étudiant la sculpture aux Beaux-Arts de Tunis, ce fils d’agriculteurs commence à travailler pour une couturière de quartier. Débarquant à Paris à la fin des années 1950, il travaille brièvement chez Dior et chez Guy Laroche, puis habille des femmes du monde entier.

Azzedine Alaïa s’est fait connaître dans les années 1980 en inventant le body, le caleçon noir moulant, la jupe zippée dans le dos.

Atypique mais adulé dans le monde de la mode, il travaillait à l’écart des grands rendez-vous institutionnels, grâce à un réseau de clientes très fidèles. Il a notamment habillé Grace Jones, Tina Turner, Rihanna, Carla Bruni ou encore Michelle Obama.

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