Bertrand Tavernier est parti, fin d’un long « voyage à travers le cinéma »

Le cinéaste Bertrand Tavernier le 1er septembre 2017 lors du festival du cinéma américain de Deauville © AFP/Archives CHARLY TRIBALLEAU

Réalisateur phare et « encyclopédie du 7e art »: mort à 79 ans, Bertrand Tavernier laisse la marque d’un cinéaste humaniste, érudit et engagé, admiré au-delà des frontières et apprécié d’un large public.

Auteur de films comme « Coup de Torchon » et « L.627 », il est décédé jeudi, a annoncé l’Institut Lumière de Lyon, l’une des mémoires du cinéma en France, qu’il présidait.

« Avec son épouse Sarah, ses enfants Nils et Tiffany et ses petits-enfants, l’Institut Lumière et (son directeur) Thierry Frémaux ont la tristesse et la douleur de vous faire part de la disparition, ce jour, de Bertrand Tavernier », a ajouté l’institution.

Personnalité du cinéma français, artiste engagé à l’œuvre éclectique et reconnue à l’étranger, celui qui arborait une chevelure ivoire et des lunettes, a réalisé des films d’époque et contemporains, avec une prédilection pour les sujets brûlants.

En plus d’un demi-siècle de carrière, ses films ont été largement récompensés : prix 1974 Louis-Delluc pour « L’horloger de Saint-Paul », nomination aux Oscars 1983 pour « Coup de torchon », prix de la mise en scène à Cannes en 1984 pour « Un dimanche à la campagne », BAFTA 1990 du meilleur film étranger pour « La vie et rien d’autre », Ours d’Or 1995 à Berlin pour « L’appât », Lion d’Or à Venise pour l’ensemble de sa carrière (2015).

Rochefort et Noiret

Sa disparition touche des générations de cinéphiles : il rejoint des grands noms du cinéma français disparus ces dernières années, comme les acteurs Jean Rochefort et Philippe Noiret, qu’il enrôlait en 1974 dans l' »Horloger de Saint-Paul » puis, en costumes d’époque dans « Que la fête commence ».

Mais Tavernier avait aussi su renouveler son public, recyclant Thierry Lhermitte en diplomate dans « Quai d’Orsay » (2012) ou plongeant dans la moiteur de la Louisiane pour un thriller 100% américain, avec Tommy Lee Jones, « Dans la Brume électrique » (2009). Le géant de la vidéo en ligne Netflix avait ajouté récemment une partie de ses films à son catalogue.

Tavernier, également scénariste et producteur, fut aussi un grand cinéphile investi dans la préservation et la transmission des films, qui avait signé, en 2016, un « Voyage à travers le cinéma français » pour évoquer les plus grands réalisateurs. Mû par le souci de défendre le cinéma français indépendant, il était aussi passionné par le cinéma américain du XXe siècle.

« Force de conviction »

Un amour qu’il a continué de partager jusqu’au bout, notamment sur le blog qu’il tenait sur le site de la société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD, https://www.tavernier.blog.sacd.fr).

Fin janvier, il y conseillait encore une série de DVD de films américains, échangeant avec passion avec des internautes sur la « cancel culture » et le « politiquement correct ».

« Bertrand Tavernier est parti. Le cinéma français le pleure. Le cinéaste, le cinéphile, la mémoire, tout concourait à l’exercice d’un art auquel il a dédié sa vie », a salué l’ancien président du festival de Cannes Gilles Jacob, sur les réseaux sociaux. « Il ne nous racontera plus ses histoires avec cette percutante force de conviction qui en faisait un auteur si précieux ».

« La disparition de Bertrand Tavernier est tellement triste, tellement dramatique ! », a lancé le patron du distributeur Le Pacte, Jean Labadie, qui l’a accompagné sur plusieurs de ses films.

« Bertrand Tavernier était, à l’égal d’un Martin Scorsese, une véritable encyclopédie du 7ème art qu’il a servi avec passion et talent », a ajouté le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel Roch-Olivier Maistre.

Des personnalités de Lyon, une ville où il était né le 25 avril 1941, fils d’un écrivain et résistant, où se trouve l’Institut Lumière et qui lui tenait à coeur, lui ont également rendu hommage, comme l’ancien ministre de l’Intérieur Gérard Collomb.

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