Angela Merkel sur le départ : Mutti rend son tablier

Fin 2020, peu avant l’annonce de son retrait du pouvoir, sa cote de popularité atteignait 74 % d’opinions favorables ! © Isopix

Angela Merkel quitte la chancellerie allemande après seize ans à la tête du pays. La dame de fer d’outre-Rhin n’est pas simplement celle qu’on imagine…

«Madame Merkel : un sourire !» Flash. «Mutti bitte, Mutti !» Flash. À force de la voir sur les photos des plus grands rendez-vous politiques de la planète, on pouvait croire qu’Angela Merkel ferait éternellement partie du décor.

Mais voilà… Au début de l’année, la première dame à occuper le poste de chancelière en Allemagne, la recordwoman de la longévité à ce poste (à égalité avec Helmut Kohl), celle qu’on surnomme «la chancelière de fer» ou plus affectueusement «Mutti» (maman ou la bonne mère de famille au foyer), annonce qu’elle rend son tablier. À 67 ans, l’heure de la retraite a sonné.

Pragmatique, austère, sans relief ? Méfiez-vous des clichés. La politicienne ultra sérieuse sur les photos officielles n’est pas nécessairement celle qu’on croit.

Ce samedi à 19h30 sur Arte, «Le Dessous des cartes» dresse le bilan de l’ère Merkel en Allemagne.

Patineuse ou agent secret

Premier album souvenir : l’enfance, l’adolescence, l’entrée en politique. Cheveux blonds coupés courts, large sourire, la petite Angela Dorothea Kasner fixe l’objectif. Elle est née le 17 juillet 1954 à Hambourg. Mais peu de temps après sa naissance, elle déménage avec sa famille de l’autre côté du rideau de fer, en République démocratique allemande (RDA), sous contrôle soviétique. Son père est pasteur, sa mère enseignante.

Collectionneuse de cartes postales, Angela rêve alors de devenir patineuse. Sportivement, ce n’est pas ça et son rêve se fracasse sur la glace de la patinoire. Qu’à cela ne tienne, l’ado entre dans les jeunesses communistes. Tout en jouant la provoc en s’habillant comme à l’Ouest, elle s’assure une place dans une bonne école et décroche un doctorat en physique à l’université de Leipzig.

Vu ses compétences, la police secrète de RDA, la Stasi, lui propose de jouer les espionnes. Angela décline, prétextant qu’elle est une vraie commère et ne saura jamais tenir sa langue.

1977 : photo de mariage avec Ulrich Merkel. Elle conservera son patronyme malgré leur divorce cinq ans plus tard.

La Mädchen d’Helmut

1989 : l’image culte d’un mur qui tombe à Berlin, la nuit du 9 novembre. Angela franchit l’ancienne ligne de démarcation et dépenses ses premiers marks pour un kebab…

Photo suivante : elle et Helmut Kohl. Le chancelier de la réunification choisit cette recrue intelligente venue de l’Est qu’il surnomme «Mädchen» (la gamine) pour un premier poste ministériel (Femmes, jeunesse et… sports). C’est ensuite le portefeuille de l’Environnement et du nucléaire… puis la chute de Kohl (qui trébuche sur un scandale politico-financier et qu’elle «pousse dans l’escalier»), la présidence de la CDU (parti de l’Union chrétienne démocrate) et le premier mandat de chancelière en 2005. Trois autres suivront.

Tops et flops

Dans l’épais album consacré à seize ans de pouvoir, impossible d’examiner tous les clichés en détail. Un des plus marquants se résume en trois mots que Mutti prononce en 2015 : «Nous y arriverons», à propos de l’accueil des milliers de réfugiés arrivant en Allemagne. Sur le négatif de cette image apparaît clairement une ombre : la montée du parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD).

Autres moments importants dans ce pêle-mêle des souvenirs : l’annonce de la sortie du nucléaire en 2022, le mariage homosexuel, la place plus grande de la femme dans la société allemande. De manière générale : pas de grandes réformes mais de l’efficacité pour une Allemagne toujours au top économique européen.

Maman apaisante

Et puis il y a l’autre Angela. Apparaît dans cet album hors cadre : Mutti avec des habits identiques à des années d’intervalles, faisant les courses au supermarché de son quartier (elle a refusé d’habiter la chancellerie), cuisinant sa soupe à la patate, blaguant devant un match de la Manschaft à la télé, sa peur de l’orage, ses chiens adorés…

Ça, c’était au temps où les Allemands pouvaient se dire : la sécurisante «maman» garde la maison. Mais, voilà, Mutti rend les clés, ses photos souvenirs appartiennent au passé… 

Cet article est paru dans le Télépro du 23/9/2021

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