Marc Ysaye, rédac’chef exceptionnel de Télépro ! (vidéo)
Le directeur de Classic 21 fête les 10 ans de sa chaîne, ses 60 ans et ceux de Télépro. Il est le premier des rédacteurs en chef exceptionnels qui, cette année, le temps d’un numéro, prendront les rênes de la rédaction. Une rencontre à découvrir ci-dessous et dès ce mercredi 12 mars 2014 en librairies.
En tant que rédacteur en chef de Télépro, tout en noir – sa marque de fabrique – des pieds à la paire de lunettes qui ne le quitte pas, Marc Ysaye a pris le temps de répondre à nos questions.
60 ans, c’est grave, docteur ?
J’ai stressé jusqu’au 3 janvier, date de mon anniversaire. Et depuis, tout va bien. Je me sens en forme ! Mes enfants, mes amis et ma compagne m’ont concocté une fête magnifique, un grand moment de magie, de bonheur et d’amour. J’en ai gardé un souvenir ébloui qui m’a donné la pêche pour les trente années à venir. Cela dit, je ne me sens pas dans la peau d’un homme entrant dans le troisième âge !
Télépro aussi a 60 ans. Cette coïncidence vous inspire-t-elle une réflexion ?
Les 60 ans de Télépro coïncident d’abord avec les 60 ans du rock’n’roll et les miens, accessoirement ! À travers Télépro, je découvre d’autres publics, qui n’étaient peut-être pas faits pour écouter Classic 21 et qui me disent : «C’est en lisant votre chronique dans Télépro, que j’ai découvert votre radio.» C’est formidable !
C’est aussi l’anniversaire de Classic 21. 10 ans ! En dix ans, qu’est-ce qui a changé ?
Je suis entré à la RTBF en 82, j’y ai fait tous les métiers : animateur, producteur… En 2000, je deviens le chef d’antenne de Radio 21 et en 2002, directeur. Je me rends compte que la radio présente alors de nombreuses disparités. Les différents clans (blues, hard rock…) ne se parlent pas. Plutôt que d’essayer de faire marcher cette radio avec une équipe aussi hétéroclite, je propose à la direction de la scinder et de créer deux nouvelles radios : une consacrée aux jeunes et une autre basée sur des valeurs, des traditions musicales. Cette idée iconoclaste fait son chemin puis est validée par l’équipe de Jean-Paul Philippot qui vient d’arriver comme administrateur. Je deviens le patron de Classic 21 porté sur les fonts baptismaux le 4 avril 2004. À 6 h du matin, nous diffusons le premier morceau de l’histoire de Classic 21 : «It’s a Beautiful Day» de U2.
«Je suis plus ouvert à la musique qu’à 30 ans»
C’est une success story…
J’en suis très fier. J’ai créé des émissions, mais aussi la radio dont je rêvais, j’ai permis à un tas de gens d’éclore, d’avoir animé des émissions formidables. Certains sont partis, d’autres arrivés. Et bien que ce fût d’abord mon projet, mon plus grand bonheur, c’est de voir qu’il est désormais porté par toute une équipe. Aujourd’hui, le challenge, c’est de continuer à grandir. La radio s’est trouvée.
Votre conception de la musique a-t-elle changé avec l’âge ?
J’ai beaucoup évolué ces dernières années. J’ai lu qu’avec l’âge, on finissait par aimer ce qu’on a toujours détesté… C’est vrai. À 60 ans, je suis plus curieux des nouveautés, plus ouvert à la musique que je ne l’étais à 45 ou 30 ans…
Votre participation à «D6bels» aurait-elle eu une influence sur votre vision de la musique ?
Sans doute. Je suis un peu le papy de l’émission racontant ses anecdotes. Mais en même temps, c’est avec bonheur que j’y découvre des talents, belges la plupart du temps, que je n’aurais peut-être jamais entendus sans cela.
Quel est l’âge moyen des auditeurs de Classic 21 ?
48 ans. Nos auditeurs viennent de rajeunir un peu (rires) !
«Une nouvelle génération de 15-20 ans aime le classic rock»
Et les jeunes ?
L’âge moyen de l’auditeur radio aujourd’hui en Belgique est de 45-46 ans. Nous ne sommes donc pas loin de l’univers. Mais depuis un an ou deux, une nouvelle génération de 15-20 ans nous écoute et nous écrit ! Son truc, c’est le classic rock, Led Zepplin, les Beatles, Pink Floyd, Bob Dylan ou Neil Young… Ces jeunes nous écoutent, et quand ils achètent des disques, ce sont des vinyles ! J’ai engagé récemment un brillant animateur de 16 ans, Félicien Bogaerts. Sa séquence «Vinyle vintage» est passionnante. Il parle pourtant d’une époque qu’il n’a pas connue.
D’où vient cette nostalgie des vinyles ?
Il existe des t-shirts indiquant que le vinyle est en train de tuer le MP3 (rires). Plus sérieusement, le CD est devenu le symbole d’une technologie dépassée, même s’il n’est pas mort, loin de là. Ce public qui rachète des vinyles et qui demande qu’on en fabrique à nouveau, est très jeune. Et ça me touche, ça me parle. Je suis très heureux de voir que des marchands de disque vinyles s’ouvrent encore aujourd’hui. Et très heureux de voir que de grosses boîtes de production en fabriquent à nouveau. Ce sont des produits qui proposent des qualités d’écoute extraordinaires.
Qu’est-ce qui fait qu’on a envie d’écouter des vinyles aujourd’hui ?
Le MP3 est certainement moins bon que le vinyle ou le CD puisque c’est du son compressé. En revanche, on trouve aujourd’hui des vinyles de très grande qualité. Plus ils sont épais – comme dans les années 50 ou 60 -, plus le son est bon, puisque le sillon est d’autant plus profond. Cette fascination pour le vinyle et le classic rock est sans doute portée par des événements passés qui ne se reproduiront plus : Woodstock, les Beatles, le mouvement hippie, la contre-culture, le punk ou la new wave… Le discours que nous tenons à Classic n’est pas de dire que c’était mieux avant – il existe des choses formidables aujourd’hui -, mais force est de reconnaître qu’il y a eu, dans l’histoire de la musique occidentale, une période d’une richesse inouïe, révolutionnaire, venue des Anglo-Saxons. Et la jeunesse du monde entier s’y est reconnue.
«Une audience se mérite tous les jours»
Un moment clé en dix ans ?
En 2007-2008, peut-être : nous nous sommes demandés comment encore grandir, améliorer la radio. Et là, nous avons travaillé sur le format, la rythmique d’antenne, l’habillage, les jingles, l’animation parce que la radio évolue vite. Et le slogan est arrivé : rock and pop. Il faut se remettre en question en permanence. Une audience se mérite tous les jours. C’est la leçon que je retiens de mes trente ans de radio. Il faut être à l’écoute des auditeurs, se remettre en question.
Le samedi 5 avril prochain, Classic 21 fera donc la fête !
La date officielle est le 1er avril. Et ce n’est pas une blage. Le 5 avril, ce sera en effet l’apothéose, la grande fête avec les auditeurs au Palais 12. Toute l’équipe de Classic 21 sera là, celle d’aujourd’hui et les anciens. Il y aura des concerts et des surprises ! Des artistes belges, BJ Scott, Suarez, Hooverphonic, Millo, Casechoice… qui se succèderont sur scène. Puis trois concerts avec le meilleur cover de Led Zepplin, Led Zep, les Beat Box, cover italien des Beatles et les Sneakles cover de Depeche Mode. Nous serons plusieurs milliers à partager le plaisir de la musique.
Le fait d’être rédacteur en chef ?
Je n’avais jamais fait ça. J’ai été impressionné par le degré de préparation de la réunion de rédaction. Chacun est venu avec ses propositions, dont nous avons tous débattu. Avant que le rédacteur en chef – en l’occurrence moi – ne tranche. J’ai trouvé la manière de travailler démocratique et professionnelle. Et vous m’avez laissé les coudées franches !
Que souhaiter pour les dix prochaines années ?
Je ne les verrai pas toutes à Classic 21. Mais j’ai la chance de vivre une fin de carrière en pleine révolution sur le plan de la radio qui va quitter progressivement la bande FM pour le numérique terrestre, le DAB+.
Entretien : Nadine LEJAER
Découvrez ici l’album photo de la visite de Marc Ysaye à Télépro
et ci-dessous la vidéo des coulisses de la réunion de rédaction !
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